parcourant les quelques mètres séparant vos chambres cassiopée prise de terreur tu avais besoin de venir te confier. passant en revue toutes les personnes à qui te livrer cassiopée un nom se démarquait de la liste et c'était celui de lindberg qui t'apparus en premier

le son transcendant des talons parcouraient le couloir qui séparait ta chambre de la sienne et quelque part lui annonçait ta venue. les pas lourds et le visage grave tu t'avances vers sa porte puis
tu toques doucement contre le bois
« lindberg c'est flores ... tu es là ? j'aimerai te parler »

scrutant tout autour de toi comme pour éviter les invités indésirables tu replaces une mèche rebelle derrière ton oreille ton myocarde d'un battement de plus en plus vite et sourd. quand il ouvre la porte tu te rues à l'intérieur de son presqu'appartement puis tu lui lances un regard entendu

quand enfin tu te sens à l'abri des oreilles trop indiscrètes des murs perméables tu soupires et cassiopée plongeant tes ambres dans les siennes tu lui dis « je crois que ... qu'on s'est trompé de camp orion »

dans le grand silence de cet étage, orion est tranquille. cette vacuité, ce très blanc couloir - c'est son quotidien depuis un moment maintenant. des âmes finissent par rejoindre cet enfer doré d'une étoile cerclée de rouge et certains finissent par s'en séparer.

orion n'a pas d'avis sur celui-ci. il progresse dans son monde, accepte sans être farouche un luxe mérité, étalé sur son immense lit avec la switch entre ses mains. son esprit est ailleurs avec sa cravate défaite et sa chemise qui n'est pas boutonnée jusqu'en haut. ce n'est qu'orion en tant que personne, qu'orion en tant que jeune adulte, orion sans tous les artifices des nova et des rois. ça toque à sa porte. il se lève, dépose sa switch dans un geste mécanique, ouvre avec son visage d'indifférence, sans sourire tout fait à servir (car il ne sait pas le faire) et laisse cassiopée entrer sans plus de cérémonie.

il reconnaît en elle l'urgence, l'aboutissement d'un trop plein, le besoin terrible de venir trouver quelqu'un. bonjour. il referme sans précipitation et pose une main sur son épaule dans son geste, sans familiarité, juste pour ne pas qu'elle s'entrechoque avec la porte. un pas de recul, il interroge du regard, cherche des réponses sans la presser : il a une éternité pour les problèmes s'ils en valent la peine. de quoi parles-tu ? et il se surprend à espérer qu'il va trouver une alliée dans son inquiétude.

orion comme d'habitude offre son attitude détaché et soudain cassiopée tu doutes d'avoir toqué au bon endroit. et si lui se complaisait dans le leurre doré qu'ils offraient au plus 'méritants' dans quoi tu avais mis les pieds ? pourtant tu laisses ta méfiance naissante de côté et tu écartes les bras tournant tout autour de la pièce
« de ça orion. de tout ce qu'il nous entoure et nous étouffe »

tu ne prends même plus la peine de camoufler les tremblements violents de tes doigts : quelque chose s’apprêtait à exploser en toi et tu n'avais même pas pris la peine de t'en rendre compte. « chaque nuit je m'endors en me demandant si on est bel et bien les gentils dans l'histoire. mais regarde où ça nous mène orion. regarde où ça nous mène!  » pointant la console du garçon, son lit démesurément grand. vous méritiez votre confort c'était certain mais tu ne pouvais pas refréner les salves de pensées paranoïaques depuis le festival

et à chaque fois que le soleil se couchait tu suffoquais dans ton piège doré (la cheville broyée) « peut-être que je suis devenue folle mais
tu le ressens toi aussi ce malaise, n'est-ce pas ? » prière muette ; qu'il te réponde que pour lui aussi rien ne va

ce n'est pas de la folie mais une réalisation, l'impression de sortir d'un mirage imposé depuis des années - plus d'une décennie pour lui, et tout pile pour elle. le regard d'orion reste calme et contrairement à elle, il ne tremble pas.

il s'est longtemps posé la question si la gentillesse se trouvait dans la droiture. s'il fallait mieux être bon que dans la légalité totale, représentant d'un empire plutôt que roi de la dévotion sentimentale. l'âge lui a fait penché vers le premier choix mais peu à peu, les lignes se floutent de plus en plus à nouveau. voir tous ces gens-là, d'une moralité banale, d'une volonté d'agir pour ce microsystème, les voir tous flancher un à un - il s'en pose des questions sans culpabiliser. son confort, on lui a donné - il le prend. il ne crachera pas dessus mais ce n'est pas ça qui le motive, pas ça qui l'inspire.

alors pour aller où ?

oui je le ressens. personne dans notre situation peut l'ignorer. assis-toi. elle ne compte pas la laisser partir, pas maintenant du moins. orion lui désigne son lit et se dirige dans sa salle de bain pour revenir avec un gobelet d'eau. il lui tend et s'assied à ses côtés, comme de très vieux amis. cette proximité est étrangement naturelle maintenant qu'ils se sont trouvés dans leur désaccord, dans tout ce qui vrille depuis quelques temps. avant je pensais que le moyen que tout aille mieux était de convaincre ceux du grenier de se conformer un peu. je pensais réellement que sans grenier, tout irait mieux. un petit temps. mais ils sont en colère et à nous, on nous donne des armes pour les enfoncer encore plus. on nous sépare mais pas assez pour qu'ils ne passent pas devant notre étage tous les jours. il parle tout doucement. c'est injuste ce qu'il se passe, et je ne sais pas ce que nous pourrions faire - en plus de cela l'armée est maintenant mêlée à l'académie... il passe une main dans ses cheveux en soupirant. je suis perdu.

la tendance à l'éveil semblait prendre chacun des novas pour les secouer à l'image d'une vague cassiopée mais tu ne pouvais t'empêcher de courir après le tsunami. ce que tous suspectaient depuis un moment déjà n'était que l'aboutissement d'un chemin : vous étiez piégés et maintenant quoi ?

orion confus était un spectacle aussi innovant que terrifiant. lui si placide et lucide semblait égrener ses pensées sans possibilité de les ramasser et toi cassiopée tu semais derrière toi des perles de rage muette
« le grenier n'a toujours été qu'un moyen de pression pour certains et une répression par privation pour d'autres j'ai toujours trouvé ça déplorable » sans vraiment le dire à voix haute
« la résiliation n'est pas une option je crois : autant rester au courant de ce qu'il se passe et ne pas perdre ce qu'il nous reste d'un potentiel double-jeu

mais je ne veux pas la guerre moi » tu es fatiguée de répondre à l'appel du trône et tu y perds toujours plus que tu n'y gagnes ; mais tu refuses aussi de rester spectatrice

« qu'est-ce qui nous retient tous ici orion ? pourquoi est-ce que la guerre n'a pas déjà éclaté ? » tu n'attends pas vraiment de réponse seulement si le silence venait à se poser tu en mourrais cassiopée