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l'important c'est d'aimer – jones, flashback.
Nancy Decker
DEUX ÉTOILES
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Nancy Decker

Messages : 79
Classe : université, ingénierie.

l'important c'est d'aimer – jones, flashback. Empty
MessageSujet: l'important c'est d'aimer – jones, flashback.   l'important c'est d'aimer – jones, flashback. EmptyMar 7 Avr - 6:58


Elle est assise en bord de lit, une main posée sur la couverture, là où le corps de Jones s'est emmitouflé. Elle ne sait pas s'il somnole ou s'il est dans le coma ou juste mort.

Elle avait quitté la soirée vers trois heures, fracassée, riante mais éreintée. Lui était resté, se roulant un pénultième ter, tandis que Manolo lui resservait une pinte de rhum pur. Il avait les paupières telles deux ouvertures scellées et, le corps tanguant, il l'avait prise et étreinte contre lui comme pour se retenir de tomber puis balbutiant un pâteux « svoit dmain » il avait avalé un cachet sorti de nul part et son verre cul sec.

« Tu m'as encore laissé un message. » dit-elle sans savoir si elle s'adresse à lui ou à elle-même.

En se réveillant ce matin, la voix de Jones sur son répondeur ; Jones à six heures quarante-sept, en descente et qui pleure. En proie au délire il a des visions, une perceuse dit-il, un bruit cinglant dans le mur qui lui vrille les tympans, fait vibrer son crâne et lui troue la tête. Les couleurs lui font mal (il poursuit) des flashs multicolores qui me martèlent, Nancy, putain ça me broie je sais plus si mes yeux sont clos ou fermés ou ouverts.
Et il dépérit là, aussi simplement, sur sa messagerie et au creux de son oreille. Elle l'écoute répéter son nom des centaines de fois, Nancy, Nancy, comme une prière ou une invocation qui l'arracherait à cette agonie. Qui l'achèverait. C'est un râle inhumain né d'une souffrance inhumaine : il supplie Nancy de l'anéantir, en espagnol, en anglais, il suffoque dans sa morve, dans ses larmes, dans sa bave. Entre ses sanglots qui rompent le cœur, il lui dit qu'il l'aime. Puis il vomit.

C'est ainsi, depuis des mois. Des enregistrements de mort-vivant, elle en a des dizaines sur son répondeur.

Elle est ici à présent, à ses côtés, dans sa chambre suffocante mais qu'elle trouve soudainement glaciale. En arrivant elle a même déposé une bouteille d'eau à son chevet avant de s'asseoir sur le lit.

Enfoui dans un bruit de tissu, il bouge à peine mais sa tête se découvre de sous la couverture.
Alors elle se lève avec brusquerie et tressaille. Il fait chaud pourtant : dans la chambre règne une chaleur de renfermé mêlée à de la transpiration et à l'odeur grisâtre des lendemains d'alcool. Debout elle lui fait dos, incapable de soutenir la vue de son visage.

« Jones » prononce-t-elle tout bas, plus bas que terre, en dessous de la poussière. « Je t'aime, tu sais » elle tremble encore un peu et souffle « Bien sûr que tu sais ».

Il y a un bruissement de feuilles.
C'est triste à en pleurer mais Nancy ne pleure pas, son corps seul implore. De ses épaules frissonnantes se naissent des tiges d'où écloses des tulipes, des tournesols, des marguerites. Les bras serrés mais elle n'a déjà plus de bras, ce sont de branches épineuses de conifères dont les pommes de pins se détachent et s'échouent sur le sol. Sur son visage, elle plaque ses mains dont s'échappent des lianes de saule pleureur qui dégringolent en fracas.

Nancy aime Jones. Et peut-être, dans un recoin encore inconnu de son mal-être, Jones aime Nancy.
Mais ils se plongent chacun dans le néant, aux confins des abysses noires et sans empreinte, ceux des espaces froids qui ne connaissent pas la lumière.


Jones Cole
SANS ÉTOILE
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Jones Cole

Messages : 158
Classe : université

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MessageSujet: Re: l'important c'est d'aimer – jones, flashback.   l'important c'est d'aimer – jones, flashback. EmptyLun 13 Avr - 20:55

fatalement il sait qu'il devra se réveiller.
cela provoque en lui une atonie des muscles. il devient soudain un tout petit bébé.

jones a trois ans et observe depuis le landau le monde se déplier devant lui. il traverse la rue poussé par un géant et se déplace d'un espace vers un autre. soudain une forme se découpe et s'approche jusqu'à le percuter. le landau heurte le banc juste le temps que son papa réponde au téléphone. cela lui vaut trois points de suture et une nuit un peu agitée chez maman furieuse de les avoir laissés se promener tous seuls. après ça il n'a plus jamais pris le landau, il a appris à marcher.

puis tout lui revient. il se rappelle qu'il a tout inventé. qu'il n'a jamais existé et que toutes ces histoires sont des choses qu'il se raconte pour éviter de disparaître. il a créé le monde et l'univers, et la somme de toutes les choses qui gravitent dans leur champ. il a créé la vie et la voie lactée n'est jamais que son éjaculation si précoce quand il se touche le soir.

les mots sortent de sa bouche sans ton ni volonté.

- ah je viens de comprendre.

il regarde nancy et en la voyant il lui semble inutile de vivre. elle est triste. elle lui parle. voilà bien la plus belle chose qui aie pu lui arriver. quelle bonne blague ! comme si une fille comme ça pouvait exister, et demeurer près de lui, et l'aimer sans raison. nancy était le plus formidable tour de passe-passe qu'il aie jamais bricolé pour se donner contenance. alors elle n'existe pas non plus, et sans doute encore moins que le reste. cette certitude le rassure dans sa douleur. rien ne vaut rien. sereinement il accepte de se donner au silence froid de l'infini.

- ça veut rien dire, je t'aime.

pauvre jones. l'amour le poursuit mais il est plus rapide. pauvre jones qui a oublié à quoi il ressemble. il y a longtemps qu'il ne se regarde plus dans la glace, qu'il évite les vitres et les rétroviseurs de crainte que son reflet ne lui crache au visage.

il a oublié aussi à quoi elle ressemble elle. elle n'est plus que l'ombre de ses propres fleurs. dissout dans la couette comme une larve en métamorphose, il ne formule plus de paroles ou de gestes. il se recroqueville en position fœtale et espère que ni le monde ni nancy ne viendront le chercher.

subitement il se rappelle l'existence des téléphones portables et il éclate de rire.

- je suis tout seul dans l'univers.

il glisse au fond du lit alors que nancy se lève. il a déjà oublié qu'il n'est pas dans un espace abstrait de sa conscience mais dans son pitoyable délire. et nancy doit le vivre à ses côtés.

sans bouger, sans parler, gagné par l'impression de ne faire qu'un avec l'univers, puis par celle que l'univers est essentiellement constitué de merde, jones ouvre les yeux. deux fentes d'un bleu ignoble, démoli.
ce qu'il voit lui déplaît tant qu'il souhaite mourir.

- je souhaite mourir, nancy. je suis désolé.

quand il le prononce ce prénom lui semble être une suite de syllabes désignant un concept absurde. il avait longtemps pensé que c'était le plus beau prénom du monde.
cela le plonge dans une colère épouvantable.

jones frappe les murs plutôt que ses adversaires.
il enfonce son poing dans le placo comme un imbécile qui n'a pas assez de mots dans son vocabulaire pour exprimer sa souffrance indicible. et bien voilà, les mots sont là. souffrance et indicible. il se rappelle qu'il les a eux aussi inventés, très spécifiquement pour cet instant. il ne ressent rien. pas même la fracture de sa première phalange.

brutalement il se lève et sort du lit. il prend nancy dans ses bras. ses sanglots martèlent toute la pièce comme un épais cauchemar. la chambre est si sombre, ses bras sont si lâches.

il ne comprend pas si la personne qu'il serre très fort est quelqu'un d'autre ou lui-même.


l'important c'est d'aimer – jones, flashback.
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