orion n'est pas timide, il ne l'a jamais été. il ne sacralise pas non plus ses sentiments, même les plus profonds, et se louvoie avec indifférence dans sa propre existence - alors il ne sait pas quelle autre raison qu'une affection singulière pourrait le pousser à braver des tabous.
il s'est refait plusieurs fois la scène dans sa tête. si elle refuse, ils pourront faire mine que c'est à cause de leur différence d'âge et surtout de statut - si elle accepte, ils n'auront qu'à dire qu'il est question d'une courtoisie polie entre un jeune homme et son aînée. il est gracieux de sa part d'accorder la dernière danse symbolique à la professeure de l'équipe gagnante en étant président du conseil, n'est-ce pas ?
il se convainc ainsi de la justesse de ses actes et n'éprouve pas de remords particuliers à l'idée de lui faire face pour l'emmener potentiellement avec lui.

elle semble être venue avec un autre professeur tandis qu'orion a fait le choix honnête de s'accompagner lui-même, et de vaquer de fréquentation en fréquentation. ses cheveux plaqués en arrière, ses yeux dégagés, il a une allure princière, voire même d'un jeune général des armées marchant toujours à la même vitesse - avec la tranquillité de ceux qui sont sur leur propre territoire.

quand vient le moment fatidique, il s'approche humblement mais avec la politesse orchestrée qu'on accorde à ces moments. il jette un regard aimable au professeur principal des SPE, un léger sourire et un mouvement de tête, puis revient vers daisy. ses yeux demeurent un mirage indéfrichable, on peine à s'y repérer - pourtant demeure une chaleur particulière et qu'on ne trouve pas en eux d'habitude - celle d'un intérêt grandissant, et des minauderies jusque là condamnées d'adolescents.
bonsoir à vous monsieur. bonsoir madame. sa voix sourit davantage que ses lèvres. est-ce que vous me feriez l'honneur et le plaisir de m'accorder cette danse ? il est solennel et son corps appuie son propos, droit mais le bras légèrement tendu en invitation à accepter la proposition.

quand ils avancent, orion réalise peu à peu à quel point son acte est insensé - et surtout qu'il ne mène à rien. il est rare de sa part d'entreprendre quelconque action qui n'a de but et qui s'ancre dans un désir illogique, qui pourrait le mener à sa perte.
orion peine à vivre dans le présent et pourtant, quand il sent la chaleur de la main de daisy, il semble y être. il vaut mieux laisser la mélancolie à plus tard et ne se draper que ce plaisir intense qui fait rugir de plus en plus son coeur qu'est d'être avec celle qui convoite bien secrètement.
ils laissent un temps aux différents duos qui osent danser cette valse au symbolisme singulier s'installer sur la piste de danse, alors orion fait mine de s'arrêter pour enfin se mettre face à la professeure. il a un sourire tendre sur les lèvres et c'est quand il se rend compte de leur proximité liée à la nécessité de quelques pas en trois temps, qu'il devient un peu nerveux. sa main se contracte davantage autour de celle de daisy quand elle parle, puis il la lâche pour déposer pudiquement ses doigts à sa taille - comme le veut les bonnes manières envers sa partenaire. je n'ai d'audace que pour les choses qui me semblent être bonnes d'être faites. dans la superficie, il pense que c'est à moitié un mensonge, que tout cela est une erreur qu'il regrettera - et lui ne regrette rien ! mais inconsciemment, n'est-il pas persuadé de la justesse de son acte ?

sinon il n'aurait pas osé. il ne décroche pas son regard, savoure l'instant de cette symbiose aussi simple qu'il aimerait que ce soit de continuer à l'apprécier un peu trop. non je n'ai pas de copines, c'est la première fois que je participe à la dernière danse. et vous, où trouvez-vous l'audace d'accepter l'invitation d'un élève ? puissent-ils continuer à jouer aux non-dits et sous-entendus ainsi, cela leur permet de continuer à marcher sur le même fil.

force et courage, épaules redressées avec acharnement : orion aime les statures fortes, la rudesse de la vie qui se déploie. oui il y a une puissante audace qui pousse orion a aimé un peu plus à chaque instant l'ombre de daisy - mais aussi ses lèvres, et ses yeux, et sa voix. pourtant elle n'est pas brutale et s'arme aussi de sursauts de rires poinçonnant son coeur déjà fragilisé à la simple évocation du nom. c'est idyllique comme vision, c'est un amour qu'il n'aurait jamais espéré.

et pourtant - c'est un interdit qui lui tord aussi les intestins. il est fébrile à la simple évocation, la simple hypothèse de ce trop dans la bouche de daisy. son équilibre s'en voit affaiblit mais si daisy accepte, si daisy consent à cette affection démesurée pour eux deux - elle aura la force de l'aider à tenir, n'est-ce pas..?
il est revigoré des deux bras autour de son cou et garde bien délicatement ses mains sur ses hanches sans les étreindre grossièrement, pour ne pas l'étouffer de son affection. ce n'est pas un président de conseil ici, ce n'est pas une figure presque légendaire de l'académie. non il est question d'un jeune homme qui aime sincèrement et qui n'est pas sûr de quoi savoir faire avec ses émotions. je n'ai pas le droit de répondre honnêtement. suggérer par la négation, litote sentimentale pour ne pas forcer de trop la muse à s'engager dans cette discussion - lui laisser un échappatoire. vous savez pourquoi je ne peux pas, et quand bien même j'aimerais vous le dire. ses mots sont hachurés par l'émotion. je ne peux pas madame.
il continue à danser.

l'abandon de ses sentiments dans les mains de daisy ne rime à rien ; les voilà vendus au sort des vagues qui les poussent au bord de la piste, pour échapper aux oreilles frivoles. de l'aube jusqu'à la fin, maintenant il fait nuit sur la planète sentimentale, car la réponse est logique et qu'il s'y attendait de toute évidence. ça n'aurait pas eu de sens qu'elle accepte, mais au-delà d'une déception persistante il est dégagé du poids des aveux. s'il est enivré de tristesse et de déception, son coeur en est plus léger ; et il sait bien à quoi s'attendre.

il ne trouvera rien en elle.

ainsi soit-il ! il ne mime pas un sourire et acquiesce gentiment, loyal à son honnêteté maîtrisée. je le savais. c'est bien pour cela que je ne pouvais pas vous le dire. il ne dit plus "madame", mais il ne dit pas daisy non plus : il ne veut juste pas la mettre mal à l'aise d'une quelconque manière. c'est normal d'ailleurs, mais vous m'avez posé une question et j'ai voulu y répondre. sachez-le, jamais je n'essaierai de vous imposer quelque chose d'aussi complexe, que ce soit à recevoir ou dans les faits. il veut dire par là qu'il ne le prononcera pas pour ne pas briser le fil dangereux, et qu'il ne veut pas non plus lui forcer la main dans une relation non-consentie (par pitié ou illusion). amusons-nous alors, je compte sur vous pour me guider. il réengage un mouvement pour se réinsérer dans la foule, affichant un léger sourire serein, ses mains n'ayant jamais quitté la taille de la professeure.