leonard méprise profondément ce que yingyue représente. figure connue et reconnue, dégoût pailleté qu'il lui gerberait bien aux pieds s'il en avait l'occasion ; mon dieu qu'il hait les filles, mon dieu qu'il en hait toutes les nuances. et des nuances, elle en a plein : de rose et de bleu, jusqu'au vert pomme de ses ongles - elle a le profil de ces demoiselles n'existant que pour charmer et tromper.
quelle horrible personne qu'il se dit, une sorcière des temps modernes qui n'usent point de potions mais du charme du maquillage et des sourires.

se croyant intouchable, inatteignable de part son dégoût à peine caché pour la gente féminine, il se contente de sourire méchamment quand on évoque yingyue en sa présence. indélicate fleur qu'il ne veut pas dans son bouquet final, il n'y a aucune gloire à la conquérir ou la posséder.
le voilà pourtant confronté à ce qu'il considère comme de l’exubérance ridicule. il baisse un peu les yeux pour regarder la silhouette qui s'avance vers lui et trace un rejet net de ses iris, et dessine la courbe de son corps, la jaugeant de haut en bas. trop occupé à attendre quelqu'un d'autre, il ne prend même pas la peine d'engager la discussion s'il doit y en avoir une. moins doit-il lui parler mieux s'en porte-t-il car il craint de vouer une haine à vie aux menteuses s'il se retrouve trop confronté à celles comme yingyue.

pianotant sur son téléphone à nouveau, il fait d'abord mine d'ignorer sa présence, passant une main dans ses cheveux. il ne se retrouvera jamais affaibli par une fille, il se l'est promis ; c'est un homme d'honneur qui ne peut être blessé que par une entaille causée par la trahison d'un frère.
les femmes ne sont pas dignes de son sang et encore moins les presque inconnues comme l'autre élève.

impertinente aux doigts vernis, poupée reluisante de son propre éclat - factice, permanent, artificielle. elle s'accroche et de ses paillettes il en reste toujours un peu quand elle nous touche - minuscules morceaux de plastiques qui viennent jusqu'à partout jusqu'à dans nos lits les lendemains de soirée.

leonard préfère les fêtes sans confettis.

qu'elle parle ! qu'elle parle il ne daignera pas un regard, qu'elle parle et qu'elle s'épuise - qu'elle crève à ses pieds si elle le souhaite parce qu'il n'en a pas grand chose des contrefaçons. non c'est vrai que parfois leonard met des formes dans ses rejets, parfois il prend la peine de leur sourire tout doucement - pour voir leurs larmes d'amour sucrées le long de leurs joues pleines de roses sans épines. parfois oui mais avec yingyue ça ne vaut pas la veine car si ses phalanges viennent jusqu'à en-dessous de ses cils, il sait bien que tout cela sera une incroyable comédie.

mais elle s'accroche et lui arrache un soupir ; il pose sur elle deux yeux féroces et voraces. c'est une charogne et lui un rapace, il n'a pas peur de la dévorer si c'est ce qu'il faut pour qu'elle cesse ses plaintes gémissantes de fin de vie. ses lèvres restent inflexibles parce qu'il ne fait pas encore risette - non cela va venir tant c'est risible ! mais ce n'est pas encore le cas.

et elle parle, elle parle... il l'écoute pour qu'elle lui fiche la paix. il laisse traîner ses oreilles quand elle prononce ses mots tout doux. va droit au but. si elle veut un service parce que ça il peut bien le faire, et il s'en vantera partout pour faire bien sur le livre de sa vie.

pourtant tout se mue dans un étrange spectacle qu'il n'aurait pas soupçonné. elle abaisse sa tête, courbe son dos et il voit son cou gracile et blanc se dessiner ; yingyue semble si fragile. ça doit faire partie du tour de charme. peu importe tout ce qu'il aurait pu imaginer, ça, il n'aurait pu le soupçonner - alors il a un éclat de rire nerveux. puis ça monte - et puis plus rien. il attend la suite, la chute - quand est-ce qu'elle va lui taper sur l'épaule et s'en aller en disant que c'est une vaste blague et qu'elle l'a bien eu ? très drôle yingyue. tu peux circuler. il abaisse ses yeux sur son écran puis revient à elle en fronçant des sourcils, perturbé et le coeur noué par l'incompréhension. attends t'étais sérieuse ? mais t'es folle ?

elle rayonne de vérité.
quand elle s'affuble de noms d'oiseaux il opine doucement pour approuver, il ne voudrait pas interrompre son adorable verbe ! il est prêt à recevoir la plus incroyable des demandes en mariage, bien que toujours surpris. elle s'agrippe à lui, marque son territoire, le saisit physiquement et dans les mots - se l'accapare avec une force farouche, une volonté au-delà du désir. il est question de survie. alors il l'écoute et même qu'il pose tendrement une main sur la sienne - qui finit évidemment par s'évader pour serpenter sur son torse travaillé par le sport. il y a une nette différente physique entre eux, dans l'image qu'ils rejettent, et pourtant exactement la même volonté envers autrui ; toutefois leonard a déjà tout tandis que yingyue cherche à enfin posséder richesse.
et c'est vrai qu'il ne se rappelle pas d'avoir déjà pris le bus dans sa toute tendre jeunesse - mais peut-être la mémoire lui échappe, mais il ne lui semble pas avoir connu la vie battante, les bras grouillants, s'agrippant pour ne pas chuter, le froissement des manteaux... non ça ne lui dit rien des souvenirs de france.

il baisse un peu le minois pour bien la voir, admirer ses lamentations de sirène multicolore, écouter son chant disgracieux mais pourtant limpide - il apprécie cette sensation immense d'avoir le pouvoir sur quelqu'un, et l'honnêteté tranchante de cette cruauté. ça m'intéresse pas une esclave sans admiration, sans adoration je sais pas si tu vois ce que je veux dire. il se souviendra des mots de yingyue à jamais, et puisqu'elle est théâtrale, il se saisit de ses mimines à griffes pour les tenir dans les siennes, avec une tendresse bien imitée. t'as l'air marrante. et de savoir ce qu'on attend des meufs qui apparaîtront dans les magazines people. ça leur plaira la pétasse manga prolo et le bâtard t'sais, et moi je m'en fous. je préfère une meuf qui s'assume qu'une salope qui me fait les yeux doux. il ne se rend pas compte du poids de ce qu'il dit, de l'engagement à vie - non il y a un coup de foudre d'associés quand il voit yingyue. ça ne peut que bien se passer. donc deal ? ça peut être archi marrant. il lâche les mains et tend comme un enfant son petit doigt. faudra que tu me files ton num prin-cesse.

encore cette mélodie de percussions en plastique, et tout cela rondement menée. elle fait tinter tous ses trésors accrochés à son téléphone, pendouillant fièrement - étincelant dans leur habit brillant et glissant. les paillettes accrochent le regard et viennent se mêler à celles des ongles de yingyue - encore. il n'y en a jamais trop, alors il énumère avec une habitude lancinante les chiffres de son numéro un à un, observant sur l'écran si elle note correctement le moyen de communiquer tous les deux en échappant aux oreilles et yeux voyeurs. il sourit gentiment, avec sa douceur de garçon doré, quand il la regarde droit dans les prunelles - regarde comme je suis aimable, regarde comme je suis serviable ! alors elle lui doit tout et plus encore maintenant et dans le futur. c'est acté - en échange il lui offrira tout l'or, tout le luxe - toute la luxure désintéressée aussi s'il le faut.
juste, pas avec lui - loin de son torse et de sa bouche, loin de son coeur et de ses lèvres. il ne compte pas céder à la faible inclination qui pourrait naître à un moment ou à un autre.
bah parfait alors. il relève les yeux et voit quelques mètres plus loin cet ami qu'il attendait initialement et qui le laisse toujours faire ses affaires avec les filles sans chouiner. leonard sourit (encore) à yingyue et déposer un baiser sur sa joue, comme à la française dira-t-on. mon pote m'attend mais on parle par texto, right ? il tapote gentiment son épaule - non pas comme s'il avait bâti un pacte à vie, mais plutôt une rencontre ce qu'il y a de plus banale.