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Deux mois, tout au plus, que nessa était là – douze fois, au moins, qu’elle se perdait
Elle était de celles qui aiment se balader, cavaler, à chaque occasion donnée alors

Une fois la classe terminée elle avait pris les jambes à son cou et était parti encore plus loin que d’habitude –
Elle reconnaissait vaguement le terrain de sport, le lycée ((là où anton se trouvait)) et pas à pas, s’était approché d’un bâtiment aux murs blancs au parquet lisse et d’un silence
Angoissant

Traversant les couloirs, à peine assez haute pour voir à travers la vitre, Nessa se surprit à apprécier le silence,
Rare, surtout dans la classe c – une ribambelle d’enfants tous plus excités les uns que les autres
Oh, Nessa ne s’en plaignait pas, ça lui faisait presque oublier
Son Papa.


Car les moments de silence contrastent si violemment avec la voix qui s’élève et les hurlements incessants que la petite perd pied facilement ;
La quiétude l’attriste et elle réalise soudain qu’elle est perdue, sans personne, sans anton sans jasmin sans
((rien))
Que le bruit des machines et le matériel –
quelqu'un
Son corps la pousse vers la silhouette blonde n’importe qui
Elle voit la blouse et elle sait,
Papa lui a dit

Vous soignez la tristesse des gens s’il-vous-plaît ?

Ces gens-là soignent toutes les maladies

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@Krystian Swertsen

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Elle a le visage qui s'illumine la voix qui s'égaye
Papa avait raison, Papa –

Elle essaye de se hisser à la force de ses petits bras, elle est grande seule dorénavant, elle doit être forte et surmonter les obstacles. Un essai, puis deux, puis la gorge qui se serre les yeux qui piquent, Nessa utilise l'escabot – la mine déconfite et

La gentillesse dans la voix du monsieur blond, elle pose les mains sur ses yeux elle –
se casse en deux.

J'ai mal au coeur.

La voix qui tremblote

Il y a des gens qui l'ont dit dans ma classe, que je reverrai jamais papa et que mon frère est pas mon frère –

Essaye d'articuler à travers les sanglots et le nez qui coulent;
coulent avec les souvenirs de son père qui semblent lentement s'enfuir

Je me sens si seule...

Alors, une pensée vilaine s'insinue en elle: quand on lui a promis qu'elle serait comme chez soi,
Nessa avait juste oublié que la solitude faisait partie du tas.

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@Krystian Swertsen

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Elle écoute du mieux qu’elle peut à travers les sanglots – se dit que même s’ils sont seuls, c’est nul de devenir méchant par solitude
Puis elle réalise vaguement que le monsieur blond a raison, que la solitude rend cruel parfois même terrifiant,
Elle a pu pardonner à son Papa, alors elle doit pardonner aux autres enfants, elle hoche la tête en reniflant fort ;

Je dois rester ici aussi longtemps que vous ? Je reverrai pas mon Papa avant d’avoir votre âge ?

Car même si Nessa veut grandir vite, ça lui semble soudainement trop loin – et si son père l’oublie, si Anton part avant et le rejoint, et qu’ils n’ont plus besoin d’elle qu’ils ne viennent jamais la chercher
((stop))
Elle déglutit, tente de ravaler la tristesse mais elle se coince dans la gorge et attriste la voix :

Je m’appelle Nessa. Bonjour Monsieur Krystian. Merci de rester avec moi et de me soigner, c’est très gentil, merci. Je viens d’arriver, du coup je n’ai pas énormément de gens à qui parler. Vous voulez bien qu’on soit copains ?

Elle lui tend la main, fière d’avoir réussi une introduction parfaite, sourit à travers les larmes séchées.

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@Krystian Swertsen

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Elle a le cœur qui s’allège, la sensation de réconfort alors que Krystian lui serre la main puis le choc, soudain – les yeux qui s’écarquillent et l’oreille tendue, d’une concentration redoutable Nessa écoute ;
Avant de se reculer d’un pas pour le dramatique, mettre un main devant ses lèvres et s’exclamer :

C’est vrai ?

Ebahie d’apprendre qu’un adulte peut avoir peur du noir, avoir peur tout court, elle hoche vivement la tête et dresse son index devant sa bouche.

Promis je ne dirai rien !

Ne se dit pas un instant qu’il ment, non, la petite est juste ravie de se sentir moins coupable, d’avoir trouvé un allié.

Et vous ne soignez pas les peurs, vous ? Non parce qu’à votre âge, avoir peur du noir, ça doit être compliqué hein. Ou alors vous dormez la lumière allumée ? Vous n’avez pas quelqu’un pour vous lire des histoires ? Ca chasse les démons, selon ma maman.

Avant qu’elle ne parte, loin, emportée par des démons qu’elle n’a pas réussi à faire disparaître ; sa mère qui se tenait si droite, le dos voûté des conflits avec Papa.

Vous êtes là depuis longtemps, Monsieur Krystian ?

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@Krystian Swertsen

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Un sourire maigre, le dernier enseignement de maman ; si tu souris, tout ira bien
alors Nessa sourit de toutes ses dents, une médecine facile et à peine amère, tout ce qu'il faut pour un enfant.

Votre papa et votre maman ne vous ont pas manqué, pour prendre cette décision ?

Elle joue avec ses doigts et observe la tignasse de Krystian – se demande si c'est un choix « artistique » comme Anton – en l'écoutant attentivement.

C'est moins drôle quand c'est tout seul.

Parle d'expérience, des soirs où seule face au mur, Nessa dessinait de ses petits bras des contes par dizaines et personnages par milliers – des soirs où sa voix revêtait des accents étrangers, pourvu que l'histoire puisse exister sans celle de Maman pour la narrer ;

J'en ai beaucoup, beaucoup ! Il y a les classiques comme le Chat Potté et le Petit Chaperon Rouge, mais il y a aussi –

Croise les bras et lève le menton.

– E-enfin, je connais un peu mal maintenant parce que je ne suis plus vraiment une enfant vous voyez ? J'aimais ça quand j'étais petite et que j'avais peur du noir, mais ça va mieux !

Nessa se sent obligée de rappeler que ce petit corps contient un esprit fort, qu'elle n'est pas comme les autres enfants à se moquer et être méchants – ne réalise pas encore que vouloir grandir trop vite, c'est d'un triste.

Si vous voulez, je peux venir vous en compter quand vous n'arrivez pas à dormir. Vous vous sentirez moins seul.

(et elle aussi)

Vous préférez quoi, les histoires d'amour ou celles d'épée ?

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@Krystian Swertsen

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Il y a le mot « autorisation » qui ramène Nessa durement dans la réalité, se rappeler qu'elle n'a pas le choix de grand-chose dans ce monde si l'académie en décide autrement.
C'est plus raisonnable, de toute façon, aller se coucher avant la nuit tombée et laisser ça aux grands et leurs cernes creusées.

Je comprends, mais faut prendre soin de vous aussi.

Le laisse faire, le geste ravivant la nostalgie d'une époque lointaine et bénie. Elle sourit un peu moins, dorénavant.

Mon histoire est pas très longue, vous savez.

Onze ans – cinq et six depuis que maman est partie – seulement, et ça semble peu à raconter ;
lourd au coeur toutefois, Nessa a la gorgée serrée :

Je viens d'arriver, ça ne fait même pas quelques mois. Je vivais avec mon papa, jusque là. Il ne voulait pas que je vienne ici parce qu'on a déjà pris mon grand-frère vous voyez ? Et ça a fait partir Maman.

C'est dur pour elle d'aborder ce sujet, qu'elle a toujours vécu sans vraiment le réaliser et l'accepter, l'innocence de l'enfant là pour la protéger ;

Ca faisait six ans qu'on vous fuyait. C'est assez facile avec l'Alice de Papa –

Fait onduler son ombre pour illustrer

– puis on a fini par accepter parce que c'était plus simple, je veux dire, Papa était pas au top de sa forme et...

Nessa sourit pour endiguer la tristesse qui perle aux yeux.

Me voilà ! Je pense que c'était le bon choix. Je crois.

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@Krystian Swertsen

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C'est des étoiles qui meurent dans ses yeux quand Krystian lui annonce devoir partir, elle aurait désiré qu'il ne soit pas question de temps – parce qu'elle n'a rien pour le retenir, celui-ci, parce qu'il file depuis toujours entre ses petits doigts.
Puis il y a le sourire succinct, le regard qui vogue de visage en horloge ;

le hochement de tête
l'émerveillement

Elle lui attrape sa main promesse de galaxies sans attendre, oui oui oui, peut-être qu'elle arrivera même à soigner les coeurs, qu'elle trouvera un remède à la tristesse ;

C'est promis ? Vous le jurez ?

Elle secoue de nouveau sa main, l'enthousiasme évident. C'est qu'elle s'y croit déjà, plus tard en blouse, Nessa grande sans talons aucun, à la place où est assise Krystian à aider les enfants éplorés. Soudainement, l'académie porte moins des airs de prisons que ceux d'une maison
d'une passion
d'un futur qu'elle pensait avoir à jamais perdu.

Je trouvais peut-être même le remède à la tristesse d'ici là, Monsieur Krystian, mais ça ne vous dérange pas ? Vous êtes sûr d'avoir le temps ? C'est une promesse, hein !

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@Krystian Swertsen