Chef, un jour, j'aurais une belle maison. On habitera tous dans le même village, ce sera chez nous, ce sera notre vie. Chef, faut qu'on s'case d'ici.

Elle était attendue Arianne, pas pour sa naissance, non, pour sa deuxième naissance. On avait essayé de lui expliquer qu’elle était destinée à de grande chose. Qu’elle allait être comme sa sœur, une sorte d’enfant prodige, et que lorsque cela arriverait, ils seraient fière, plus que jamais, de leur petite fille. Et en attendant ce moment, fallait travailler dur, suivre les traces de Scylla. Elle avait plein de carnet, plein de couleurs dans ses crayons. Un beau bureau même à disposition. Faute de savoir sur quoi elle devait travailler, on la faisait travailler sur tout. Elle s’était bien tenu Arianne, attachée à sa chaise par une pression déjà trop grande. Seulement fallait toujours plus. Fallait se lever tôt, ne pas bouger d’un centimètre avant d’avoir fini le livre entamé. De moins en moins de pause goûter. De plus en plus de cris dans la maison. Parce qu’Arianne n’est pas aussi discipliné qu’il l’aurait voulu. Ca ressert la visse. Ca fait du chantage affectif. Si habillement. Tu seras bientôt si précieuse Arianne, ils ne peuvent te laisser t’échapper, tu comprends ?

A discuter les ordres, ils on fini par t'enfermer à clef.

Les doigts chaque jour un peu plus crispés sur les crayons, brisant les mines sous la pression. L’envie d’hurler à plein poumons. Elle a tambouriné à la porte Arianne, de toutes ses forces. Pas encore Arianne, pour seul réponse a sa frustration. Et tout s’est envolé sur le jolie bureau, elle a attrapé les livres propulsés, les a mutilé, une page après l’autre dans une colère sans nom. Puis ce fut au tour de la tapisserie d'être arraché. Elle eut le temps d’arracher presque tout un mur avant d’entendre enfin le locker de sa chambre. Elle s’attendait à tout Arianne, mais pas à sa mère replaçant simplement le bureau. Installant en silence les livres, les carnets, et la lampe de chevet.

Arrête tes caprices Arianne. Ne fait pas l’enfant.

Ca a creusé un vide immense dans son cœur de gamine, grandissant chaque jour, sous la peur de ne jamais sortir d’ici. Elle a vécu ainsi, dans cette chambre, sans que la tapisserie ne soit refaite, jusqu'à ses sept ans. Elle se rappelle du noir qui a inondé ses yeux ce jour là, elle se rappelle l’envie de fuir, devenue vitale, tambourinant dans sa tête. Et d’un seul coup, elle était dehors. C’est fou, à quel point c’était beau. Tout semblait prendre une nouvelle teinte, même les immeubles grisâtres semblaient s’étendre fièrement vers le ciel. Elle ne saurait dire combien de temps, combien de minute ou de seconde avant d’entendre comme un écho dans ses oreilles, trop lointain pour qu’elle n’en comprenne le sens. Elle est revenu sur ses pas , son regard traversant la fenêtre de cette si petite chambre, et ca a fait comme un éclair. Ca hurlait si fort, qu’elle pouvait l’entendre à travers la vitre. Sa mère paniquée, son père arrivant en trombe dans la chambre. Et au milieu de tout ce bruit, son corps à elle, aussi. Elle s’est cru morte Arianne, le jour de ce qu’ils avaient coutume d'appeler, la renaissance

Son départ pour l’académie, peut de temps après, avait sonné comme un surcie. Travaille bien Arianne. Nous avons hâte de voir ta progression. Vous avez hâte surtout, de vous faire du pognon.

Et puis les nouvelles règles, et les nouvelles instructions. De nouveaux murs, toujours une même prisons. Mais des plus jamais dans son coeur d’enfant.
Elle dit non Arianne. Elle dit qu’elle veut pas. Elle croise les bras et ne démords pas. Elle se cache même parfois pour qu’on ne la trouve pas. Punition sur punition, y’a rien pour la faire bouger. Et puis y’a eut la bagarre. La bagarre pour pas grand chose. La bagarre pour la bagarre. Une drôle de sensation. Il dit rouge quand elle dit jaune. Il l’attrape par les cheveux, elle ne lâche son veston. Il cogne dur, avec ses poings, il vise juste avec ses mots. Et au fond, c’est lui qu’a raison.  

Il s’apelle Anaël. Il l’appellera Cosmos.
C’est pas mal, il avait dit. Et elle avait sourit, cheveux en bataille, entaille sur le menton.

C’est quand il a perdu son étoile qu’elle a vraiment compris. La vie c’est pas ici, la vie c’est dehors. Anaël, je jure de vous faire sortir d’ici. Elle te suivra où que tu ailles, elle fera ce qu’il faut, elle travaillera dur si c’est pour toi. Si c’est pour vous. Parce que la bande s'agrandit et que ses projets aussi. Qu’est ce que tu vas faire de tous ces mômes dans ton sillon Anaël. Toi qu’ils portent en modèle, toi le coupable désigné de toute la direction. Le mauvaise exemple d’une bande de gamin turbulent. La mauvaise graines c’est ainsi qu’ils nomment les dissidents de votre génération.

Chef, on se laissera plus marcher sur les pieds. Chef, il est tant pour nous d’exister.