(end) aux autres lendemains | Jason + Juno-Bianca

aux autres lendemains
juno-bianca & jason

Dans le miroir les traits étaient las. Dans la courbure des cils pleine de mascara, des plis au bord des yeux ; la fatigue était morale. A ne plus trouver de sens en rien, Juno-Bianca avait perdu la saveur des victoires (de ses triomphes habituels), perdu le goût d'abattre, car désormais il n'y avait plus d'adversaire qu'elle voulait mettre à terre. Juno-Bianca avait découvert au fond d'elle-même des tendresses qu'elle ne donnait à personne ; des conforts solitaires au creux de la poitrine.
Elle ne devait remercier personne pour ça. Elle avait commencé, lentement, doucement, à s'aimer un peu. Et depuis cette sensation fugace, éphémère, le reste n'avait eu que peu de sens.

Son Alice avait dicté des pas étranges. Elle s'était rendue à Central Town tôt dans la matinée, et avait passé dix minutes à écouter la boulangère sans y prêter grande attention. Elle avait attrapé entre ses doigts manucurés à la perfection la petite boîte en carton rose et aux lettres dorées que la dame lui tendait, un grand sourire aux lèvres qui n'avait fait aucun effet à Juno ; c'était à peine si son regard s'était attardé. Un ruban rouge refermait la boîte, et elle s'en saisit, quitta la boutique.

Elle portait une jupe blanche dont les pans volatiles glissaient sur ses jambes nues et y avait rentré le bas de sa chemise noire alors que par-dessus le tout, sur ses épaules, trônait sa veste rouge carmin, assortie aux couleurs qu'elle avait données à ses lèvres ce matin.

Le claquement des talons contre le sol, signature de Juno-Bianca arpentant les couloirs des dortoirs, n'avait fait aucun écho cette fois-ci. Les couleurs violettes n'avaient pas cessé de mordre la peau de ses hanches et elle avait du sortir sa paire de baskets blanches, celle de rechange puisque l'autre paire était encore aux soins de la laverie (merci le vomi). Elle s'était arrêtée à chaque palier, les escaliers restant l'épreuve la plus rude ; elle profitait qu'il n'y ai que peu de monde dans les couloirs pour s'autoriser quelques témoignages de douleurs - des plaintes muettes mordues dans les joues. Arrivée à son étage, elle continua l'ascencion, d'un escalier plus haut.

Elle avait regardé à droite, à gauche, avait cherché du regard quelconque remue-ménage, mais rien. Elle ne savait pas bien à quelle porte se présenter, alors l'Alice fit son travail et c'est à la sienne qu'elle frappa ; deux coups de ses doigts repliés. Une satisfaction pudique décora le bord de ses lèvres lorsque sa silhouette dans l'encadrement de la porte lui confirma que son Alice était toujours en bon état.

« Jason. »

Elle leva la boîte qu'elle tenait par le ruban devant elle, et lui tendit, lentement.

« Félicitations pour ton major. »

Elle ne témoignait pourtant d'aucune joie. Quelque part, Juno-Bianca ne put lui faire l'affront d'ignorer les tourments qui avaient hanté son regard ce jour précédent, et ses félicitations étaient peut-être gorgées d'une certaine fierté à son égard, mais elles disaient surtout Je t'ai vu ; Je te vois.

A se tenir là, debout, Juno ne sut plus exactement pourquoi elle était venue. Elle hocha vaguement la tête, avant de reculer d'un pas.

« Des baisers de Malmédy. Ce sont mes préférés. Tu me remercieras quand tu auras fini la boîte, pas avant, d'accord ? »

Elle lui adressa un sourire, et s'apprêta à partir.

Croissants aux amandes

jason & juno-bianca

" the stars were dancing across my skin "

Au milieu de sa chambre régnait le roi muet.
Les derniers événements avaient été mouvementés.
La défaite au festival sportif, lui qui se reconnaissait malgré tout compétiteur, l'intervention des parents dans le stade et leur arrestation, sa promotion au rang de major...
L'intervention de ses parents.
Venait avec cette promotion ses doutes quant à sa légitimité.
Jason avait l'impression d'avoir vendu ses parents contre une nouvelle étoile, un coin télé et un dressing.
Bien qu'il n'eut jamais ressenti le besoin d'entretenir une relation avec ses parents, il était même le principal responsable de leur venue en ignorant chacun de leurs courriers, il aurait été stupide de nié qu'il avait été touché par cette rencontre.
S'il ne laissait d'habitude rien transparaître à ce sujet et qu'il aurait pu se contenter d'avoir atteint son objectif, la victoire était amère.
Seul dans une chambre bien plus spacieuse qu'avant mais bien trop étroite pour contenir sa culpabilité.

Pour preuve, il avait à peine déballé ses cartons suite à son emménagement dans sa nouvelle chambre.
Les licornes étaient encore toutes emballés et ne ressortait de sa chambre aucune personnalité.
Vide et inexpressive, à l'image de son occupant.
Las de toute chose, il avait même loupé l'entraînement de baseball.
Lorsque l'on frappait à sa porte, il enfilait rapidement son masque et s'y dirigea.
Devant sa porte se trouvait une jeune femme à l'apparence soignée et à l'attitude raffinée.
Une silhouette qu'il aurait su reconnaître entre mille tant elle hantait ses pensées lors des moments de solitude.
Juno-Bianca se présentait devant lui, une boite entre les mains.
Ses lèvres s'écartaient dans un large sourire et quand bien même le contenu de la boîte l'intéressait ― il n'avait jamais dit non à des sucreries, c'est bien la présence de la reine qui venait lui apporter un peu de joie.
Véritable rayon de soleil.

Jason l'admirait, hésitait à lui dire à quel point elle était magnifique ― aujourd'hui encore ― mais de ses lèvres ne s'échappaient aucun son.
Incapable de formuler quelque réplique que ce soit, le corbeau se contentait d'un vif hochement de tête pour la remercier de ses paroles.
Et de ce sourire capable de le mettre à genoux.
Lorsqu'elle reculait d'un pas pour annoncer son départ, Jason s'empressait de l'attraper par la main.
Ses joues s'empourpraient, alors qu'il réalisait son geste, et il relâchait sa main pour frotter l'arrière de sa tête.
Balbutiant quelques mots.

« ― Je. J'ai du thé. Enfin. Je peux en faire. Je crois. Si tu veux. »

Le major se sentait ridicule.
Il lui était encore plus difficile d'inviter quelqu'un dans sa chambre que d'arriver premier dans son épreuve à la course de relais.
Et c'est de Juno-Bianca dont il s'agissait, raison de plus pour être intimidé.
Elle était si belle et lui si...

Mais Jason prit son courage à deux mains et marmonnait de manière presque inaudible, le regard plus expressif que n'importe quel mot qu'il aurait pu prononcer.

« ― Reste avec moi. S'il te plait. »

J'en ai marre d'être seul.
Loin de toi.

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juno-bianca & jason

Les sourcils haussés dans une mine circonspecte, les yeux de Juno s'étaient arrêtés sur leurs mains suspendues dans le temps, ses doigts accrochant les siens. Puis son bras retomba le long de son corps quand il la lâcha, et elle leva les yeux vers lui. Elle était restée immobile et silencieuse pendant plusieurs longues secondes durant lesquelles elle sembla le jauger du regard.

« Hm. »

L'instant parut durer une éternité, avant qu'elle daigne le libérer : avançant de plusieurs enjambées, elle s'invita alors dans sa chambre en passant devant lui, le pas lent pour éviter de boiter.

« Deux sucres. Et une cuillère de miel. »

Elle ne s'interdisait aucune majesté, peu importe qu'elle ne porte pas les talons qui le lui permettaient d'habitude. Ainsi elle était allée s'installer au bord du lit et croisa une jambe sur l'autre, le menton relevé et le regard insistant.

« Je suis restée. Et maintenant ? »

Elle regarda autour d'elle. Il y avait quelque chose de désolant ; d'aseptisé ; dans cette chambre. Des cartons encore pleins, rien d'accroché aux murs. Juno-Bianca n'était pas aveugle. Ça n'avait rien à voir avec le fait que le déménagement était récent. Elle leva les yeux vers Jason.

« On se sent seul, tout en haut, pas vrai ? »

Juré d'assassiner son père, écarté sa mère, détruit sa sœur ; Juno-Bianca avait collectionné les victoires en dépit de tous les échecs émotionnels que ça avait causés.
Il y avait un prix à tout. Le prix de la gloire avait des saveurs de solitude.

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Le sentiment de honte qui l'avait envahi au moment de prononcer ses quelques mots était difficilement descriptible.
Un malaise qui se voulait de plus en plus pesant pour Jason, à mesure que le regard de Juno-Bianca se déposait sur lui dans une forme de jugement taquin.
Si elle avait préférée s'en aller, certainement qu'il ne lui en aurait pas tenu rigueur.
Mais elle acceptait son invitation et si cela ne pouvait représenter pour elle qu'un moyen de plus de lui exposer sa majesté, il l'accueillerait malgré tout avec grand plaisir.
Elle s'installait sur le coin du lit alors qu'il se dirigeait en direction de différents placards, à la recherche d'une bouilloire.
C'est vrai qu'avoir ce genre d'espace avait ses avantages, le rang de major arrivait avec une rentrée d'argent bien plus conséquente et un confort de vie qu'il avait pendant longtemps recherché.
Etrangement, c'était le fait de pouvoir en profiter devant elle qui le gavait de fierté.
Une fierté bien éphèmere car elle ne s'empêchait pas de lui faire une référence à leur dernière conversation.

On se sent seul, tout en haut ?
Oui, terriblement.
Mais Jason l'avait accepté depuis bien longtemps, tout comme elle.
Après avoir mit l'eau à bouillir, il s'approchait de Juno-Bianca pour finalement s'asseoir en face d'elle, à même la moquette.
Un court instant de réflexion pour lui proposer la réponse la plus sincère possible.

« ― Je ne sais pas. J'ai toujours été seul. Alors, autant être tout en haut. »

Son regard se redressait, pour plonger dans le sien.
Il avait prit l'habitude de lui transmettre pour par le regard que par la parole.
Mais cette fois-ci, il essayerait d'assembler les deux.

« ― Mais ça ne veut pas dire que ça ne fait pas mal. »

Ses yeux se perdaient finalement dans le vide, le vide de cette pièce uniquement animée par le bruit de la bouilloire.
Il se perdait aussi un peu à contempler Juno-Bianca, son apparat toujours aussi impeccable.
De quoi forcer le respect.
Pourtant, de nouveau, il remarquait l'absence de ses talons.
Pertubant car, à l'accoutumé, tout le monde avait prit l'habitude d'entendre les pas de Juno-Bianca dans les couloirs avant d'avoir la chance de l'apercevoir.

« ― Tu as definitivement abandonné l'idée de porter des talons ou tu ne voulais simplement pas m'en faire profiter aujourd'hui ? »

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juno-bianca & jason

La solitude avait des allures de monstre, comme une ombre qui planait derrière sans jamais être nommée ; ou dont le nom était devenu si banal qu'on en diminuait le réel danger. Si Jason avait toujours été seul, Juno ne pouvait en dire autant ; il y en avait eu du monde qui s'était bousculé à ses pieds, elle avait créé un royaume entier où elle disposait de l'attention qu'elle voulait, sur un simple caprice, un claquement de doigts.
Non, Juno n'était pas seule ; la solitude dont elle était baignée était interne, et elle en était la seule responsable. Juno n'était pas victime d'un quelconque isolement, elle s'était isolée elle-même ; elle ne se plaignait pas de son malheur, elle le déplorerait une fois qu'il n'y aurait personne pour l'entendre.
Mais là, face au regard de Jason, des aveux se battaient à ses lèvres.
Elle aurait aimé lui dire.
"Je suis malheureuse."

Au lieu de ça elle avait esquissé un rire moqueur et détourné les yeux, en secouant la tête.

« Ne rêve pas trop, Jason. Tu n'es pas débarrassé de mes talons. »

De dix, douze, quatorze centimètres, qu'importe. On ne changeait pas une équipe qui gagnait. Elle baissa à nouveau les yeux vers lui.

« Mais je suis ravie de savoir que personne n'a remarqué. »

Elle avait craint qu'on l'ait vue, mais elle avait finalement plutôt bien joué son manège. La seule personne qui avait remarqué qu'elle boitait était Chandresh, et Dieu savait qu'il avait du la fixer plus longtemps que n'importe qui.

« Je me suis blessée. Pendant la chorégraphie du premier jour du festival, je me suis mal rattrapée pendant un saut, et pour ne pas tomber j'ai du forcer sur ma hanche. »

Elle avait préféré blesser ses muscles que de blesser son image. Tout pour sauver l'amour-propre.

« Initialement j'étais censée participer à la course. »

Pas fâchée d'avoir échappé au bosquet de tentacules (puisque c'était l'épreuve à laquelle elle avait été assignée au départ).

« Du coup ça vous a facilité un peu la compétition, vous devriez être ravis. »

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Ô grand jamais il n'aurait voulu se débarrasser des talons de Juno-Bianca.
Ni d'aucune parure qui faisait d'elle ce qu'elle était.
Elle pouvait renvoyer l'image qu'elle désirait, cela importait peu à Jason qui avait décidé depuis leur première discussion de ne plus se laisser aller au moindre jugement.
S'il n'aurait pas un seul instant cautionné les raisons de sa blessure ― forcer sur sa hanche ― par simple ego, il n'irait pas jusqu'à insulter sa fierté en lui rétorquant que sa réaction n'était pas appropriée.
Comme toujours, il gardait le silence sur ce qui pouvait sembler désagréable à son interlocuteur.
Sauf que dans le cas présent ce n'était nullement par désintérêt complet mais bien parce qu'il n'avait aucunement l'intention de la froisser.
L'important c'était sa présence.

Elle lui avouait qu'elle devait aussi participer à l'épreuve mais que cette blessure lui a fait déclaré forfait.
Cela aurait facilité la compétition ?
Bien qu'il ne doute pas un seul instant des compétences sportives de Juno-Bianca ― après tout, elle était bien un membre actif des cheerleaders ― il ne pouvait nier le caractère aléatoire de ces épreuves.
Au final, peu importe les compétiteurs, chaque épreuve relevait plus ou moins de la chance.
Tu devrais peut-être apprendre à saisir les traits d'humour n'est-ce pas, Jason ?
Plutôt que de te lancer dans la sur-analyse.
Jason haussait les épaules, en réponse.

« ― Merci à ta blessure, alors. Tu as eu l'occasion de m'admirer dans mon costume de lapin depuis les gradins. »

Le major se levait pour aller récupérer la bouilloire et servir le thé au jasmin dans une tasse, la plus classe qu'il pouvait trouver dans ses placards.
De retour jusqu'à elle, il lui tendait la tasse de thé.

« ― Dis moi, est-ce que tu voudrais quelque chose pour ta hanche ? Un gant de toilette avec de l'eau froide, ce genre de chose ? »

Un peu plus détendu.
Il s'autorisait même à s'asseoir à ses côtés, sur le lit.
Son regard se perdait de nouveau dans le sien, seule lueur qu'il aperçu depuis les derniers événements.
Pour Jason, Juno-Bianca avait quelque chose d’envoûtant.
Une confiance en soi débordante, qu'on pourrait presque assimiler à de l'arrogance, mais elle s'évertuait à dissimuler sa sensibilité.
Peut-être que rien ne pouvait vraiment l'atteindre, comme elle le prétendait, mais il n'y croyait pas.
Jason était bien placé pour savoir que personne n'était vraiment insensible, pas même lui.

« ― Merci. D'être là, je veux dire. J'ai l'impression d'être un peu moins seul. »

Et ça fait du bien, parfois.
Souvent.

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« Et Laëstiel dans son costume d'asticot. »

Elle leva les mains pour y accueillir la tasse qu'il lui tendait. Elle fit glisser ses ongles sur la faïence, dans des tintements qui l'apaisaient.

Elle ricana légèrement à sa proposition. La douleur n'était pas importante, elle la faisait grimacer une fois toutes les demi-heures et c'était tout - elle finirait bien par passer (elle avait d'ailleurs un rendez-vous à l'hôpital plus tard dans la journée). Au final ce n'était pas la hanche qu'il fallait soigner.

« J'ai plus mal à mon orgueil qu'à ma hanche, si tu veux tout savoir. Alors à moins que tu ais un remède pour ça... »

Elle porta la tasse à ses lèvres, avant de s'énerver (sur elle-même).

« J'avais répété ce saut une centaine de fois sans jamais le rater, comment j'ai pu me louper ? Ça me dépasse. »

Elle l'avait écouté sans plus relever que ça, le regard toujours sans aucune pudeur ; c'était que Juno-Bianca n'était pas vite gênée et elle haussa un sourcil en guise de réponse.

« Ne me remercie pas trop vite. »

Une nouvelle fois elle sirota son thé, et tout en buvant elle avait insisté avec ses yeux, une lueur de malice s'y glissant. Elle déposa ses mains au creux créé par l'entremêlement de ses jambes.

« Tu dois encore te mettre deux fois à genoux. Et je n'accepterais pas que tes dettes envers moi restent impayées très longtemps. »

Un nouveau rire, avant de relever la tasse vers elle.

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L'on pouvait en effet constater, au discours de Juno-Bianca, que la blessure se révélait plus mentale que physique.
Est-ce qu'elle avait peur de l'échec ou en était-elle simplement dégoûtée ?
Elle ne semblait pas être une femme qui refusait d'entreprendre des projets alors peut-être qu'elle se faisait suffisamment confiance pour s'imposer cette perfection dans tout ce qu'elle engageait, que ce soit sa manière d'effectuer un saut jusqu'à sa façon de siroter son thé.
Face à une telle rigueur, Jason ne pouvait que s'incliner.
Ils partageaient les mêmes chaînes de la perfection, même si c'était à des degrés bien différent, alors comment pouvait-il la blâmer ?
Mais il aimerait pouvoir apaiser le poids de ses chaînes comme elle était capable de lui enlever celui de la solitude, rien que par sa présence.

Juno-Bianca évoquait les promesses qu'il avait formulé, notamment celle de se mettre à genoux face à elle.
Et cela par deux fois.
S'il n'était pas pressé de se débarrasser de ses dettes ― ça lui faisait une bonne excuse pour qu'elle recherche sa compagnie ― il espérait que cela pourrait, à défaut d’alléger sa colère contre elle-même, faire apparaître ce sourire si charmant sur ses lèvres.

Sans plus attendre, ses deux genoux s'écrasaient sur la moquette, face à elle.
Son torse pouvait presque entrer en contact avec ses jambes croisés.
Le regard vissé sur son visage.

« ― J'imagine que ça veut juste dire que tu dois encore t'améliorer ? A ce niveau, je ne pense pas qu'il existe quoi que ce soit que tu ne puisse réaliser. »

Jason ne cherchait pas vraisemblablement à cacher l'admiration qu'il pouvait ressentir face à l'intransigeance qu'elle s'imposait.
Pourtant, il voulait se rendre utile auprès d'elle.
Peut-être que la meilleure manière de lui faire savoir qu'elle n'avait plus rien de terrifiant pour lui, c'était de se livrer à elle ?
Afin qu'elle puisse comprendre qu'il ne redoutait pas ses paroles.
Qu'il ne redoutait pas son jugement.
Il se perdait à contempler ses lèvres.

« ― Est-ce que ça t'arrives à toi aussi, parfois, de trouver que l'armure est trop lourde ? Parfois j’étouffe, Juno-Bianca. »

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Encore une fois, il s'était agenouillé - jusqu'au bout cette fois - sans opposer la moindre résistance. A cette pensée, le regard de Juno s'était affûté, et son sourire avait fané. Elle l'avait regardé.
Encore.
Son visage entravé, maudit. Juno serra les mâchoires. Une forme de colère avait pris ses yeux, et de sous ses longs cils noirs, dans la chaleur qui s'en dégageait désormais, elle blâma tout ce qui pouvait l'être.

Son père, l'académie, les parents de Jason, les autres.
Elle se blâmait elle-même.
Car elle avait mal, et cherchait un coupable.

Elle s'était relevée légèrement, tendant le bras pour déposer la tasse à moitié vide sur la table de nuit. Le mouvement de son bassin lui fit fermer les yeux et serrer les mâchoires, avant qu'elle ne se remette sur le lit, assise devant lui.

Impériale, malgré ses jambes qu'elle avait dé-croisées.

« Ce n'est pas l'armure, Jason. »

Ses mains s'étaient aventurées à ses joues, ses ongles avaient glissé sur sa peau et jusque dans ses cheveux. Comme le cadeau qu'une reine ferait à son serviteur, elle le libéra de sa muselière, en détacha habilement les sangles à l'arrière de son crâne. Et le laissa tomber au sol.

« Qu'est-ce que tu attends pour respirer ? »

C'était la troisième fois que son visage était à découvert devant lui.
Mais cette fois, c'était elle qui l'avait rendu nu.

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jason & juno-bianca

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Faible devant toute la grandeur de Juno-Bianca, Jason restait silencieux.
Il détaillait chacun de ses mouvements, serrait la mâchoire lui aussi lorsque sa hanche semblait la faire souffrir.
Prit d'une empathie sincère, il acceptait toute la splendeur qu'elle dégageait.
Ne lui renverrait d'elle aucune image déformée, simplement la vision qu'il se faisait de Juno-Bianca.
A défaut d'être une reine, de régner véritablement sur l'académie, il lui offrait son monde.
Pour cette heure, cet instant, elle pouvait régner sur son monde.
Les genoux encrés profondément dans la moquette, comme s'il ne serait jamais en mesure de se relever face à elle, il laissait ses doigts parcourir son visage.
Détache une à une les chaînes qui entravaient sa voix.
Son alice destructeur et pourtant si insignifiant face à son regard.

Elle avait rompu sa malédiction avec une facilité si déconcertante qu'il se demandait encore comment cet alice pouvait tant lui peser.
Ne faiblit pas face au danger, consciente qu'il saurait se retenir.
Se contrôler.
Parce que dans ses yeux, il ne se voyait pas monstre, sans ce masque.
Humain pour de vrai.
Humain pour la première fois.
A genoux face à elle, il ne s'était pourtant jamais senti aussi grand dans les yeux de quelqu'un.
Elle n'avait que faire de son masque, de son armure, tout ça n'avait aucun sens face à Juno-Bianca.
Insignifiant devant ce qu'elle lui offrait, une libération bien plus symbolique que n'importe quel suppresseur d'alice.

Respirer ?
Pour la première fois depuis la fin du festival sportif, il respirait enfin, en sa présence.
Obéissant.
Il prenait une grande inspiration, relâchait l'air sans un bruit.
Privé de ses mots mais pas muet de ses sentiments, il déposait délicatement le bout de ses doigts contre ses jambes.
Bombait le torse, peut-être un peu fier.
Une seule vision, celle de cette reine à la chevelure flamboyante qui d'un mouvement de la main avait simplement balayé les ombres de la pièce.
Juno-Bianca.
Et il brûle pour elle.

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C'était dans les yeux et au bord des lèvres.
Aux habitudes glaciales et impérieuses s'étaient mélangées des lueurs braisées que le silence avait alimentées plus que tout autre moteur.
C'était dans les yeux et au bord des lèvres ; le souffle tremblait.

Elle s'était levée du lit, désormais debout face à lui, et le bout de ses doigts étaient allés relever son menton pour qu'il la regarde encore ; de là où il était.

Était-ce le silence obligé par son alice, qui lui donnait l'impression qu'il attendait sa sentence ? Son regard, à Juno-Bianca, n'avait cessé d'être hautain, mais était pourtant lavé de tout dédain.
Non. Il ne s'agissait pas de son alice.
A se trouver là, debout devant lui, et leurs regards qui crevaient de tout mais pas d'ennui, Juno-Bianca se demanda qu'est-ce qui lui avait pris ; rentrer dans cette chambre, s'asseoir sur le lit.

Ce n'était pas l'alice de Jason qui avait conduit là, mais bien le sien, à Juno-Bianca.

Elle ferma les yeux, se parla à elle-même.

« Qu'est-ce que tu attends de moi ? »

Elle savait, mais ne voulait pas voir. Quelques tristesses fugaces se débattirent sur ses lèvres pincées, avant de disparaître.

Elle ouvrit les yeux. Le bout de ses doigts dessinèrent des chemins sur ses joues et jusque dans ses cheveux, passa sa main jusque dans sa nuque. Elle tendit l'autre main à Jason, attendit qu'il s'en saisisse pour lui intimer de se relever.

Lui faire face, mais debout.

Juno n'était pas certaine d'être prête ; pas certaine de vouloir ressentir encore les plaies béantes qu'il ouvrirait à faire le pas qu'elle l'invitait à faire ; les angoisses tapies dans l'ombre d'une Juno-Bianca dont le cœur isolé avait fini par crever.
Renaître sous l'alice de Zéphyr,
et mourir d'asphyxie de son départ.
A s'abreuver d'amours ici et là
Juno était devenue lasse.

Elle releva la tête vers Jason - sans ses talons, il était effectivement plus grand qu'elle.

Aucun mot ne sortit, car elle n'était pas sûre de ses propres pensées. C'était au cœur et aux lèvres, les guerres intestines entre celle qui a peur de souffrir et celle qui crève d'envie de ressentir.
Encore,
ou pour la première fois,
Juno ne sait plus,
elle veut savoir.

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Elle se grandissait de nouveau devant lui, relevait son menton afin qu'il puisse se laisser à la contemplation.
Ce n'était pourtant pas nécessaire, elle contrôlait déjà l'ensemble de cette pièce ainsi que ses occupants.
Dans cette bulle d'intimité, tout voguait au gré de sa volonté, pour son plaisir et son amusement.
Jason se faisait esclave de ses envies, à elle, sans rien demander.
Sans rien réclamer.
Parce que jamais dans la vie il n'avait senti le droit, la légitimité à ce genre de chose.
Il s'était volontairement condamné à la solitude, persuadé dans cette volonté égoïste qu'il ne ferait souffrir personne en n'existant qu'à moitié.
Que son alice était le poison, alors que le toxicité venait de son esprit.
De cette morale tordue dont il s'était affublé pour se rassurer sur son comportement désobligeant.
Pour se persuader.
Se dire que le problème ce n'est pas lui.
C'est le clan.
C'est les étudiants.
Les délinquants.
Que l'enfer, c'est les autres.

A qui pensait-il pouvoir faire la morale ?
A ses parents ?
Aux autres membres du clan ?
La vérité c'est que Jason souffrait de la peur du rejet, d'avoir été abandonné pour ne pas avoir été suffisamment parfait.
Pour la laideur de son visage dissimulé derrière un masque à l'allure macabre.
Oiseau de malheur au bec moqueur.
Il crève de solitude.
Au final, il ne connaissait pas vraiment Juno-Bianca.
N'avait aucune idée des tourments qui l'habitaient, de la voix qui encombrait son esprit l'empêchait elle aussi d'être heureuse.
Car derrière son sourire qui enflammait sa poitrine et ses manies qui capturaient son esprit, Jason avait l'impression de pouvoir distingué de la tristesse dans son regard.
Une lutte interne similaire à la sienne, celle de deux monstres.

Elle le hissait à sa hauteur et plus que jamais, il se sentait en phase avec elle.
Peut-être que ce n'était pas suffisant pour lui permettre d'apprendre à vivre réellement, peut-être qu'elle n'avait pas encore ce pouvoir sur lui.
Mais pour une fois, il voulait étreindre.
Partager une partie de son existence avec elle, voir si elle pouvait elle aussi supporter ce qu'il supporte.
A genoux ou debout face à elle, cela importait peu, si c'était en sa compagnie.
Tout était plus simple et cette fois-ci, il demandait.
Il s'autorisait à réclamer.
Guidé par un instinct dont il se pensait dépourvu, ses mains se déposaient tendrement sur ses hanches pour l'inciter à s'approcher.
S'abaisser un peu, plaquer son front contre le sien.
Mélanger sa respiration à la sienne, quelques instant.
Une âme pour deux corps.
Il ne réclamerait plus, ne demanderait plus.
Juste pour cette fois, que les lèvres se confondent.

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C'était sous les cils qui se relevaient lentement que le regard se gorgea de fièvre. C'était à la pression des mains sur les hanches que le souffle creva au bord des lèvres. En apnée, Juno-Bianca avait arrêté de respirer, le temps d'une inspiration qui ne vint jamais.

« Jason »

Il ne réclamerait plus, ne demanderait plus.
Et lorsqu'il eut finit à ses lèvres, la poitrine de Juno se souleva soudainement, prise d'un souffle ; une douleur lancinante qui se serait réveillée quoiqu'il arrive.

Submergée tout à coup d'émotions dont elle pensait avoir fait, depuis longtemps, le deuil, Juno-Bianca se sentit vulnérable, et dans le baiser se glissa un sanglot.

La main s'était refermée sur sa nuque, et elle avait refusé qu'il s'éloigne, avait répondu en demandant encore ; des lèvres du cœur, peu importe ; encore.

Ses mains attrapèrent le tissu de son haut, l'attira d'abord vers elle, puis se retourna pour le pousser sur le lit. Elle resta debout quelques secondes, ouvra les yeux sur Jason qu'elle venait de jeter sur les draps. Le souffle était brûlant à ses lèvres, et il ne fallut pas longtemps avant qu'elle ne grimpe à sa suite. Au diable la hanche, elle se hissa au-dessus de lui, retourna à ses lèvres ; les scella.

Ses ongles avaient dessiné des chemins rouges sur sa nuque, et un nouveau sanglot prit sa gorge. Son visage se réfugia dans le creux de son cou, et c'est sur sa peau plutôt que ses lèvres que les baisers se déposèrent.

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Jason se livrait à elle, plus qu'il ne l'avait jamais fait à n'importe qui.
Lui qui n'avait encore jamais goûté les lèvres d'une autre, innocence dissimulée sous un regard de glace et un masque envahissant.
Les jambes s'affaiblissaient devant la marée des sentiments, la prise de Juno-Bianca sur sa nuque.
Ils s'étaient échangés les paroles, les regards et désormais c'était au tour des sentiments.
Faible de ses mots mais habile de son silence, Jason savait se montrer à l'écoute et le premier sanglot parvenait à ses oreilles.
Mais tu es égoïste, Jason.
Il voulait recevoir, découvrir ce qu'on ne lui avait encore jamais offert.
Ce qu'il n'avait encore jamais recherché.
Alors il ignorait ce premier sanglot, lâchement, se laissait emporté au bonheur qui se propageait dans son corps.
Comblé en cet instant, sûrement pour la première fois, il se laissait pousser sur le lit sans la moindre résistance.
Elle le chevauchait, s'accaparant de nouveau ses lèvres.

Traçant des sillons rougeâtre dans sa nuque, ce qui lui fit serrer les mâchoires un court instant suivi d'une grimace de surprise, c'est au creux de sa nuque qu'elle vint mourir d'un nouveau sanglot.
Et s'il n'aurait jamais voulu que les baisers cessent de s'échouer contre sa peau, il se redressait doucement.
La laissait reposer sur ses jambes, l'empêchait de s'en aller à l'aide de son bras qui s'enroulait autour de sa hanche pendant que son autre main écartait son visage de sa nuque.
Jason l'observait, à la recherche de ce qui pouvait bien provoquer ses sanglots.
S'il voulait recevoir, ce n'était pas dans la tristesse.
Plongeait son regard dans le sien, s'exprimait de nouveau.
Je ne serais pas une de tes cicatrices, Juno-Bianca.
Je serais le remède.
Pensée qu'il ne pouvait exprimer, les lèvres scellées par son alice.
Mais elle l'avait sûrement compris, n'est-ce pas ?

Qu'il n'attendait rien d'elle que ce qu'elle désirait lui offrir.
Qu'il ne condamnerait ni ses actes ni ses paroles.
Qu'il aurait voulu, si dieu le lui aurait permis, lui réciter mille poèmes.
Une ode à Juno-Bianca.

Ses lèvres s'échouaient à nouveau contre les siennes (ok DMITRY), de manière plus passionnées que le mouvement chaste qu'il lui avait offert en guise de première embrassade.
Jason avait attendu bien trop longtemps de pouvoir goûter à ce sourire.
Ses lèvres s'écartaient, murmuraient au volume le plus bas qu'il le lui était possible ce nom qui nouait sa gorge et enflammait son âme.

« ― Juno-Bianca »

L'alice s'activait mais peu importe, une oreille qui siffle n'a jamais fait de mal à personne.

aux autres lendemains
juno-bianca & jason

Le cœur était lourd et il n'y avait aucun mots, peu importe tous ceux que Juno-Bianca pouvaient manier, qui pouvaient répondre aux questions qu'il lui livrait dans son mutisme. Elle avait baissé les yeux, ses mains abandonnées dans son dos, et ne le regardait plus ; lui imposait les silence des yeux autant que celui des lèvres.

"Juno-Bianca"
Et elle plissa d'un œil lorsque l'oreille siffla. Elle n'avait pas de réponse pour ce qu'il lui demanda. La gorge était nouée, et les mots ne sortaient pas.

C'était impossible à dire, impossible à exprimer, impossible à admettre, impossible de lui dire ; Je suis ce monstre qu'ils imaginent ; pas maintenant, pas aujourd'hui. Pour l'heure, elle voulait encore croire que ces tendresses elle les méritait.
Reste encore aveugle ; comme les autres, Jason, ferme les yeux. Et montre moi comme je suis belle sous tes paupières closes.

Elle affronta son regard.
Non, ce n'était pas ça.
Ce n'était justement pas ça.
Il la voyait ; et ça lui faisait peur, à Juno-Bianca.
Il la voyait, et ça la rendait vulnérable.

Sa main vint se hisser à ses yeux, pour l'empêcher de voir.

« D'accord. Mais attends. »

Je vais te livrer un peu de Juno-Bianca.

Elle passa ses jambes de chaque côté de son bassin, les genoux relevés et appuya sur ses pieds et ses mains pour supprimer la maigre distance qui séparait encore le bas du ventre. Elle avait déposé sa joue sur son épaule et les bras en-dessous des siens, les ongles dessinant des poèmes sur le tissu à son dos.

Elle ne donnait plus voix ; c'étaient des murmures.

« Je ne suis pas triste. Et ce n'est sûrement pas ce que tu crois. »

Croyait-il même quoi que ce soit ?

« Mais j'ai mal. »

Elle serra les mâchoires, ferma les yeux.
Juno ne ressentait rien, jamais ; et depuis des mois tout allait de travers ; elle ressentait tout, toujours.

« Mes émotions me font peur. Elles m'ont déjà mise à terre une fois, et je ne veux plus que ça recommence. »

J'ai tellement souffert, Jason.
Que j'ai décidé de ne plus jamais ouvrir.
Et toi, tu as osé venir réveiller
tout ça. Ouvert la porte des sentiments enfouis.
Ses griffes s'étaient plantées dans son dos.

« En tous cas je croyais que je ne voulais plus de ça. »

Mais ce dont je ne veux plus, c'est d'être morte comme je l'ai été toutes ces années. Tu comprends, n'est-ce pas ?

« Je »

Une inspiration.

« veux te faire confiance, Jason. »

Je veux fermer les yeux, te donner la clé, et être sûre que malgré ça tu n'ouvriras pas sans me le demander.

Croissants aux amandes

jason & juno-bianca

" the stars were dancing across my skin "

Les corps se collaient, fusionnaient presque alors qu'elle venait entailler son dos de ses ongles.
Que ce soit sa nuque ou n'importe quel autre endroit de son corps, il n'avait que faire des blessures qu'elle désirait lui infliger.
Si elle souhaitait se venger de quelqu'un, de quelque chose, il accepterait de subir.
Toute forme d'injustice ou de rancœur ne saurait subsister envers elle.
C'est finalement bien plus que physiquement qu'il se livrait à elle.
Sans même le savoir, à mesure qu'il l'écoutait, il lui prêtait allégeance.
Le cœur à genoux, il l'écoutait s'ouvrir à lui, dévoiler les tristes secrets de Juno-Bianca.
Celle qu'il y a encore quelques semaines revendiquait encore le fait de n'avoir aucune faille dans son armure possédait finalement le même trouble affectif que lui.
Elle avait peur.
Lui aussi.
Mais lorsqu'elle se pensait monstre, il la savait parfaite.
Jason aussi connait ce mal qui nous force à faire chuter le monde avec nous, peu importe la manière.
Elle écrasait les insectes, les autres humains sur ça passage.
Lui, il condamnait ses parents à vivre dans le même mutisme que lui.
Les autres élèves à s'imposer la même rigueur que la sienne.
Comment pouvait-il l'en blâmer ?
Pour lui aussi la peine s'allégeait, dans ces moments.

Juno-Bianca exprimait sa volonté de lui faire confiance et à ça, Jason ne sut trouver aucun mot.
Même s'il eut été capable de s'exprimer, en possession de son masque, probablement qu'il serait resté muet.
Non pas car il refusait le poids de cette confiance, c'est bien lui qui l'avait réclamé de tout son être, mais bien car il considérait qu'aucun mot ne serait à la hauteur de son aveu.
De preuve il ne pouvait pas lui en fournir, pour l'instant.
Mais rien ne lui empêchait de répondre par des attentions.

Aux ongles qui se plantaient dans la peau de son dos, il répondait d'une douce caresse entre ses omoplates.
A la douleur qu'elle lui infligeait, il offrait un sourire sincère et emprunt d'une infinie douceur.
Jason n'était pas fort, avec les émotions.
Pendant des années il s'était contraint à les enfouir au plus profond de son être, pour s'épargner une solitude encore plus acide qu'elle ne l'était déjà.
Il n'était pas sûr de pouvoir aimer plusieurs personnes, de s'offrir réellement à d'autres humains.
Alors il s'offrirait complètement à Juno-Bianca, uniquement à elle.
Son alice, son apparence sans le masque, son oreille attentive, tout lui appartiendrait.
A elle seule.
De cette pensée, il enfoui sa bouche et son nez dans la chevelure enflammée de celle qui dirigeait son monde, à cet instant.
J'accepterais toutes les punitions.
Toutes les misères que tu infligeras aux autres.
Toute la douleur que tu partageras avec moi.
Du moment que tu ne m'abandonnes pas.

aux autres lendemains
juno-bianca & jason

Le cœur lacéré, le souffle court au bord des lèvres, l'hypotension la fit perdre pieds quelques secondes, et Juno-Bianca avait serré la prise de ses bras autour de lui pour s'assurer de rester sur Terre ; utilisé Jason comme son point de repère pour la conscience qui avait décidé de faillir à ce moment précis.

Elle avait serré les mâchoires. Raillé un rire dans sa gorge cynique. Elle détestait cette position-là ; détestait se sentir faible, fragile.
Il avait fait s'effondrer ses barrières avec une telle facilité qu'elle avait trouvé son drame presque risible.
Pourtant, là, au creux de lui, elle n'avait pas envie ; de s'y trouver bête, ridicule, pathétique. Ce n'était plus à propos de son image, ou de ce qu'on attendait d'elle, ce n'était plus à propos d'une Juno dont le mascara avait coulé.

Son mascara avait coulé ?!
Elle releva la tête, se poussa légèrement de Jason puis, en passant deux doigts sous ses yeux elle constata les traces noires qui peignaient sa peau.

« Ah, pardon.. »

Sa voix était faible, enrouée, et elle se leva du lit en grimaçant de poser sa jambe au sol. Elle se dirigea d'un pas malhabile vers sa salle de bain ; aussi vite que sa hanche lui permettait, et en quelques secondes elle en était sortie sans plus une séquelle d'avoir pleuré - il avait suffit de deux larmes, tout ce qu'elle avait pu offrir.

« D'habitude je ne pleure pas. »

Elle avait pincé les lèvres, toussé légèrement pour que sa voix revienne.

« Dis-le moi tout de suite si tu as l'intention de me faire pleurer encore, j'achèterai du waterproof la prochaine fois. »

Elle avait laissé son dos embrasser la porte de la salle de bains qu'elle referma sous son poids. Elle était détourné le regard.
La prochaine fois.

« Ou non, tu m'en achèteras. »

Croissants aux amandes

jason & juno-bianca

" the stars were dancing across my skin "

Juno-Bianca s'écartait de lui, dans un mouvement qu'il redoutait encore plus que celui de son départ.
Peut-être parce que c'était le début de la fin ?
La fin de ce moment si particulier.
Un moment qui faisait encore chavirer son cœur, qu'il s’efforçait déjà de graver dans sa mémoire, jusqu'à mémoriser la forme de son mascara déformé par les larmes.
Elle se précipitait dans la salle de bain et c'est d'un œil circonspect qu'il observait son mouvement, profitait du moment de calme pour rouler sur le lit et s’aplatir sur le ventre, le temps de filtrer toutes ses émotions.
Sous son emprise il avait été complètement hors de contrôle et c'est bien la première fois qu'il se laissait aller à autant de démonstration d'attachement.
N'avait jamais apprit à aimer, s'était toujours contenté d'observer les gens construire des relations.
Le goût de ses lèvres hantaient encore son esprit.

Elle s'écrasait contre la porte de la salle de bain pour la refermer.
Il lui offrait un regard inexpressif et un haussement d'épaule, lorsqu'elle évoquait la possibilité qu'il lui offre un mascara adapté à une situation aussi intense.
Jason lui achèterait ce qu'elle désirait, du moment qu'il y aurait une prochaine fois.
Parce que c'est bien de ça qu'il s'agissait, n'est-ce pas ?
Le début de quelque chose que ni l'un ni l'autre le semblaient capable de contrôler.
Toujours à plat ventre sur le lit, il étirait son bras pour saisir le masque resté sur la moquette et l'appuyait contre son visage, sans l'attacher.

« ― Si c'est important pour toi, alors c'est d'accord. »

Gardait son masque en main mais le décollait de sa bouche pour lui offrir un sourire joyeux, afin d'habiller sa phrase qu'il jugeait un peu trop froide par rapport à leur précédente étreinte.
Soudain, son visage semblait s'illuminer d'une sorte de révélation.
Rapidement, il plaquait de nouveau le masque sur son visage pour parler dedans et supprimer son alice chaotique.

« ― Dis moi, Juno-Bianca, est-ce que tu aimes les croissants aux amandes ? »

Une idée derrière la tête.

aux autres lendemains
juno-bianca & jason

Juno-Bianca était restée silencieuse, pris de court peut-être, devant le sourire qu'il lui avait offert. Avait-elle jamais vu Jason arborer une telle lumière ? Ainsi elle le lui rendit, peut-être un peu touchée, bien qu'elle aurait préféré ne pas en témoigner si ouvertement.
Elle releva les yeux vers lui à sa question, et pencha la tête, légèrement.

« Les... ? »

Elle s'arma d'un rire, dans un souffle bref.

« Oui, j'aime les croissants aux amandes. Non, on n'ira pas à Central Town manger des viennoiseries aujourd'hui. »

Quoiqu'elle ignorait quelles étaient les intentions dans sa question, Juno-Bianca avait réellement des choses à faire. Elle avait jeté un coup d’œil à son téléphone qu'elle extirpa à peine de sa poche.

« J'ai un rendez-vous à l'hôpital dans moins d'une demi-heure. »

Elle se mordit la langue, baissa les yeux quelques secondes, avant de les relever vers lui.

« Jason ? »

Sa voix ne témoignait d'aucune hésitation, elle était ferme, et peu importe que les mots qu'elle voulait dire allaient lui écorcher les lèvres.

« Ce que je vais te dire, je n'ai pas envie que tu y répondes, ou que tu y réagisses. »

Marqua une pause, confirma qu'il avait bien compris ce qu'elle lui avait ordonné.

« Merci. »

Croissants aux amandes

jason & juno-bianca

" the stars were dancing across my skin "

Elle riait, de manière brève, à sa question.
C'est vrai que, hors contexte, Jason avait tendance à dire ce qu'il lui passait par la tête.
Peut-être parce qu'il parlait très peu et pensait beaucoup, il avait tendance à mélanger les deux.
L'important, c'est qu'elle aime les croissants aux amandes.
Jason aussi, il aime les croissants aux amandes.
Il se surprenait même à ne plus chercher à comprendre si son rire pouvait être moqueur ou sincère.
Peu importe, du moment qu'elle rit.
Elle pouvait bien se moquer, si cela pouvait lui permettre de faire disparaître la tristesse de son visage.

Juno-Bianca prononçait son nom, captivait son attention, exposait ses consignes.
Se montrer silencieux et inexpressif, il savait faire.
Ça ne devrait pas lui poser trop de problème.
Cependant et afin d'être sûr de n'afficher aucune réaction, il gardait son masque plaquer contre son visage.
Des remerciements.
Pour être tout à fait honnête, il ne s'attendait pas à ce qu'elle formule quelconque forme de remerciement envers lui.
Jason avait plus l'impression d'être celui qui avait profité de sa présence, d'être celui qui avait provoqué ses sanglots.
N'était pas fier.
Mais de ses mots, elle allégeait la potentiellement culpabilité qu'il aurait pu ressentir.

Il respecterait ses consignes, les commandements de Juno-Bianca.
Accepterait la pudeur de ses sentiments.
Pas de réponse, pas même un haussement de sourcil.
Et dieu sait que c'était plus difficile que prévu, tant les paroles de sa reine avaient de l'importance.

Jason se relevait brusquement du lit, étrangement énergique, le masque toujours appuyé sur son visage.

« ― Je pourrais t'en apporter. Tous les matins. Des croissants aux amandes. Si tu me donne ton numéro. »

Laissait retomber son masque à ses pieds pour fouiller dans ses poches et en sortir son portable.
Le portable désormais tendu dans sa direction, à elle de décider de la suite.
Aux autres lendemains.

aux autres lendemains
juno-bianca & jason

Le sourire à nouveau avait illuminé son faciès, quelques joies débattues dans le plis de ses yeux lorsqu'il respecta à la lettre chaque instruction.
La rigueur dont il faisait preuve faisait écho à l'intérieur d'elle, avec d'autres de ses propres préceptes enfouis, et elle l'en remercia silencieusement ; de valider ce qu'on lui avait toujours pointé du doigt comme des défauts. De les rendre attachants.

Elle songea que tout avait l'air plus léger entre ces murs, sous son regard.

Elle papillonna des yeux lorsqu'il lui tendit son téléphone, et s'arma d'un rire bref, mais sincère.

« Des croissants aux amandes tous les matins sur une durée indéterminée... Pour toi c'est ça le prix de mon numéro de téléphone ? »

Elle aurait pu lui dire qu'elle lui aurait donné sans les croissants, mais l'idée de passer à côté d'un room-service personnalisé à cause d'une humilité totalement déplacée et qui, de toutes façons, ne lui seyait pas du tout, l’exécrait d'avance. Elle hocha la tête.

« Les croissants, et un thermos de thé. »

Avait-elle ajouté en pianotant son numéro dans un nouveau contact qu'elle avait ajouté au nom de Juno-Bianca. Elle lui rendit son téléphone en s'approchant de lui, d'un pas, leva le menton, un peu.

« Je vais être en retard si je pars pas maintenant. »

Et si Juno savait se faire désirer, l'hôpital faisait plus ou moins exception à la règle.
Elle lui adressa un sourire, posa le bout de ses doigts près de ses côtes, et déposa un baiser chaste à ses lèvres, avant de quitter la pièce, toujours le pas maladroit.

« A demain, alors. »

Pour les croissants du matin.

» hush ― jason
» (end) ❝ take my breath away — Jason
» à raison ou à tort (jason)
» end | on s’en sortira toujours ✧ Jason.
» (end) ❝ i only rock with kings — Jason