j'suis venu au monde en pleurant et chaque jour je comprend pourquoi
La valse des sentiments n'avait jamais véritablement heurté le jeune homme.
Pourtant à son âge, certainement qu'il s'est déjà posé toutes les questions en rapport à la sexualité que se pose un adolescent en plein développement.
Devenu un adulte format miniature, la notion de sentiment et de relation amoureuse se dissimulait toujours derrière un prisme angoissant et extrêmement flou.
Peut-être avait-il déjà, au cours de sa vie d'étudiant de l'académie, déjà ressenti ce genre de chaleur qui fait battre notre coeur.
Mais jamais n'eut-il de souvenir plus douloureux et chaotique que le rejet auquel il avait été confronté, tout ça à cause de sa condition monstrueuse d'arme vivante.
Coupable d'être lui-même, jugé et condamné par son bourreau, c'est dans le mutisme qu'il s'était une fois de plus réfugier, s'effaçant à chaque trace de son passage et offrant à Carmen un calme qu'elle aurait probablement méritée depuis le premier jour.
Pourtant, elle n'était pas elle-même une existence respirant le calme.
Elle qui s'était vue affublée une réputation tout aussi ambivalente que la sienne.
Jason avait la réputation d'un être froid et dangereux alors qu'il s'imaginait doux et silencieux.
Carmen avait la réputation d'une fille folle et hystérique alors qu'elle s'imaginait bien plus lucide que qui que ce soit.
Des termes pour la qualifier il en existait tout un tas et pourtant, l'étudiant au masque s'était presque interdit les pensées à son égard.
Car n'en résultait que la douleur et une exposition à un fait qu'il ne saurait nier : son existence elle-même est un problème.
Peut-être aurait-il mieux valu qu'il périsse dans une des catastrophes causée par son alice ?
Ce genre d’hypothèse le terrifié, car il ne pense finalement pas mériter un destin si funeste.
Finalement, ce fut la source de ses tourments amoureux qui vint le sortir de son existence terne en l'attrapant par le bras avec urgence, alors qu'il arpentait les couloirs de l'académie.
Jason l'observait d'un regard circonspect, dans une incompréhension que son masque ne suffisait à dissimuler.
Pourquoi diable brisait-elle le silence qui s'était établit entre eux depuis plusieurs années ?
Un peu perdu, il ne savait quoi lui répondre, lui dont l'expertise se résumait plus à ignorer ses interlocuteurs qu'à leur offrir une oreille attentive.
Mais il ne pouvait se résoudre faire l'impasse sur la curiosité qu'éveillait ce nouveau contact.
D'un mouvement de bras, il lui indiquait de s'écarter pour qu'ils puissent profiter d'un peu de calme.
― Peut pas parler ici. Lieu clos. Mieux dehors.Comme à son habitude, il réduisait les mots dans ses phrases de la même manière qu'il réduisait les risques.
S'il avait confiance en ce masque fabriqué par l'académie, il ne pouvait toutefois omettre l'hypothèse d'un dysfonctionnement qui se révélerait dramatique.
A l'extérieur, il pourrait s'exprimer plus librement, son alice présentant moins de risque dans un espace ouvert.