Qui aurait pu imaginer qu’une telle fin était possible. D’une part, tu avais perdu ta cartouche si avancée, avait écopé d’un léger temps à l’hôpital pour au final, te retrouver isolée dans ta propre chambre. Non pas que tu n’appréciais pas ta chambre, bien au contraire. La misère de la pièce ne t’avait jamais véritablement perturbée, le parquet qui couinait, le mur délavé sans la moindre apparence attrayante. Un strict minimum qui aurait pu en déranger plus d’un. Mais pour toi, oui pour toi Aries, ton seul besoin était tes consoles, tes jeux pokémons et tout ce qui pouvait se rapprocher de près ou de loin de cette sublime licence nippone. Alors, l’isolement, de mot, ne t’avais jamais vraiment fait trembler. Car la simple idée d’être enfermée, de ne plus croiser la moindre tête de con, ne plus avoir cette idiote obligation de se rendre en cours toute la journée durant, sonnait comme un merveilleux rêve à tes oreilles.

Du moins, parce que par une magie impensable, tu avais réussi à l’y échapper depuis ton arrivée à l’académie. Mais, maintenant que tu étais face à cette réalité que tu avais, disons-le, idéalisée, ton ressenti à l’idée de l’isolement avait radicalement changé. Un soupir si profond, qu’il aurait pu en éjecter tes poumons. Allongée sur le sol, qui était parfois bien plus confortable que les ressorts qui te servaient de lit, tu avais cette impression que ta tête était prête à exploser d’une seconde à l’autre, puisse-t-elle encore être assez utilisée pour fumer d’une telle pression.

Durant les premiers temps, lorsque tu étais retournée dans ta chambre pour commencer cette punition (qui pour toi n’était pas juste), tu avais eu ce léger sourire aux lèvres. Ces idées de farm intensif de shiny que tu pourrais faire durant cette semaine entière. Le rire que tu avais tenté de contenir pour ne pas que quelqu’un puisse comprendre le fond de ta pensée… Mais quand bien même avais-tu pu être prise sur le fait, personne n’aurait vraiment compris. Du moins pas plus que ton idiotie naïve, qui te rattrapa très rapidement lors de ton retour dans ta chambre.

Tu ne savais pas par quelle sorcellerie, mais tout avais disparu. Tes consoles, tes jeux, tes cartes. Et même ta peluche pikachu. Rien avait été laissé, tout avait été kidnappé. Alors, au premier coup, tu avais pensé à une mauvaise blague et que tu reviendrais. Mais le premier jour d’attente te fit comprendre que l’isolement n’était pas seulement social, mais aussi divertissant. L’espoir incertain, tu avais passé l’ensemble de ton second jour à retourner tout ce qui restait dans ta chambre – c’est-à-dire un lit, un matelas de ressort, une chaise et une table. Espérant peut-être mettre la main sur quelque chose qui aurait pu tomber, qu’ils n’auraient pas vu… Mais non. Rien.

Finissant donc allongée sur le sol, remettant toute ta vie en question. Comment allais-tu survivre jusqu’à la fin de cette semaine de prison ? Comment l’école pouvait se permettre un tel traitement ? Après tout, tu avais été blessé au cœur deux fois. La première, lorsque tu avais perdu ta cartouche à tout jamais. La seconde lorsque cette pute avait réussi à t’atteindre. Tu ne parlerais même pas d’une quelconque douleur physique, car tu ne t’en souvenais pas. L’évanouissement avait été presque instantané au vu de la douleur qui t’étais donc inconnue.

Une chose était sûre. Tu étais prêt à lui rendre la pareille.

Mais avant cela, tu avais un affaire un peu plus urgente à régler. Celle d’assurer ta survie pour les prochains jours à venir, maintenant que tu avais compris qu’ils n’allaient pas te rendre tes jeux pokémon. Alors, retournant sur tes deux jambes, tu t’approches de ta porte pour la cogner frénétiquement.

« Eeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeh ! »

Un cri sans fin, espérant que quelqu’un pourrait te rendre au moins une carte. Une simple carte. Car la contempler te serait suffisant.


@ALEXIS PRESSMAN

Pourtant, tu ne t’attendais à rien. Qui même, viendrais s’occuper de sans étoiles dans ce monde qui se voulait stellaire. Alors tu avais continué, encore et encore à taper ta porte et à crier. L’idée de défoncer la porte t’avais d’ailleurs traversé l’esprit un court instant, bien qu’il t’aurais fallut plusieurs coups, elle aurait sans aucun doute fini par succomber. Mais, tout autant que l’idée était apparue, elle avait été rapidement confronté à la réalité. Seule once d’intelligence de l’année, celle que sortir n’était peut-être pas la bonne idée, surtout si tu étais désireuse de retrouver tes Pokémon. Alors c’était tout. Pour l’instant, tu te contenterais de ces cris hystériques, espérant malgré tout.

Parce que l’espoir était bel et bien possible, comme un rêve inimaginé lorsqu’une réponse y fait écho. Non pas du type que tu espérais. Mais une réponse malgré tout.

« Eeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeeh ! »


Et ce fut un cri différent. L’intonation qui auparavant se voulait être entendu, celle qui recherchait une attention particulière. Mais celui-ci, celui-ci l’avait trouvé. Ce n’était peut-être pas l’attention que tu avais attendu, mais elle était là bien suffisante pour égayer ta journée. Alors, c’était cette sonorité plus mélodieuse, plus provocatrice. Ce cri qui n’était plus accompagné de tambourinement de porte, mais de l’amusement enfantin.

« ALORS COMME CA ON EST PUNI M.D.R. »

Parce qu’il était évident qu’en temps de cours, personne n’était dans les dortoirs. Parce que cette voix, tu ne l’avais peut-être pas entendu à de nombreuse reprise, mais elle était bien assez significative pour que tu puisses t’en rappeler ainsi. Alors, vous étiez toutes les deux enfermées à l’autre bout l’une de l’autre, mais la médiocrité du grenier n’était pas capable de vous séparer véritablement par vos cris destructeurs. Et le rire explose, de manière si fort et à l’air forcé.

Tu en arrivais presque à oublier que c’était aussi ton cas.


@ALEXIS PRESSMAN

Tu t’esclaffes si fort, si longtemps que tu en viendrais presque à étouffer. Peut-être bien que cela enchante grand nombre du monde et c’est bien pour cette unique raison que tu te permets d’y mettre fin soudainement, afin de reprendre ta respiration comme si de rien était. Comme s'il pouvait être possible que tu leur rendes pareil service.

« Eeeeeh eeeeh eeeh. »

Un peu plus rythmé, lorsque ton oxygène retourne en ton sein.

« Oh non. »

D’une fausse tristesse, si le face-à-face avait été présent, il ne ferait aucun doute que tu aurais feinté le visage triste, une moue enfantine qui ne pouvait pas accepter de telles paroles. Le cœur qui se serait brisé d’apprendre que tu étais vraiment chiante. Mais la vérité s’échappe non loin dans tes cris d’existences. La vérité était que tu avais survécu dans un étrange silence durant le premier jour, comme si t’as mort avait été orchestrée. Mais le second, qui n’était même pas la moitié de cette sordide punition, l’espoir avait existé. Celui d’avoir un amusement, aussi énervant pouvait-il être. L’envie irrésistible de démonter ta propre porte pour terminer ce que vous aviez entrepris quelques jours plutôt.

« Ton absence me chagrine d’avance. »

Un jour de solitude que personne ne partagera avec toi. L’hôpital qui n’avait pas été ton compagnon pour cette fois, l’impression même d’avoir été trahis. Pourquoi donc est-ce que son coup avait été si dévastateur ?

« Tu dis ça parce que tu as déjà essayé ? »

Sans doute que non. Les étudiants qui étaient envoyés à l’isolement avaient -généralement- pour habituer à rester le plus discret possible. Tu en ignorais la raison, bien que celle-ci t’était à porter de main. Encore cinq jours pour découvrir cette douce réalité.

« Et je suis persuadée qu’au fond, tu adores m’entendre. »

Parce que tu avais cette mélodie dans la voix, celle qui donnerait à quiconque de te botter le cul. D’un soupir de lassitude, le corps lourd dont les épaules s’élèvent. Dos contre la porte, c’est ton corps tout entier qui glisse jusqu’à atteindre le parquet.

« Alloooooooo »

Toujours l'espoir, qu'on puisse t'apporter tes jeux sur un plateau d'argent.


@ALEXIS PRESSMAN

C’est que tu rumines sans même prendre la peine de le cacher, de toute manière ce n’était pas assez puissant pour qu’elle puisse l’entendre de sa chambre. Est-ce qu’elle te prenait pour une idiote ? Tout le monde savait que Molly était sans fond ni raison, que lui crier dessus était aussi inutile que de lui parler par simplicité. Après tout… C’était un robot. Et cela, à l’inverse de Rex qui n’était en vérité, qu’un humain déguisé pour faire régner la justice avec un accoutrement ridicule. Sans doute un rêve d’enfant qui n’avait jamais pu être achevé jusqu’à aujourd’hui. Ce qui le rendait d’autant plus pitoyable à ton humble avis.

Et tandis qu’Alexis affirmait sa disparition, quand bien même elle restait à quelques portes de toi, ne le cachons pas. Tu avais glissé de plus belle. Ta tête atteignant à son tour le sol de ta misérable chambré, bloqué de toute recul par la présence de la porte. C’est ainsi que le regard bien droit, fixant le plafond comme si il pouvait s’agir d’une nuit de zarbi filant. Tu te mit à chanter la totalité des opening pokémon durant toute l’après-midi. Cherchant simplement à faire passer le temps plus vite, attendant avec impatience ton plateau repas même si tu le savais misérable. A ton plus grand damn, ni Tatsuya ni Côme ne seraient présents pour partager leurs mets : tu devrais te contenter une fois encore de ce manque de nourriture.


@ALEXIS PRESSMAN