Une journée qui aurait dû commencer dans le calme, qui aurait dû se poursuivre dans le calme, qui aurait dû se finir dans le calme. Malheureusement, Yi n’a pas lu l’avenir dans sa boule de cristal ce matin, et il s’est dit, sage et innocent en enfilant ses vêtements, que rien ne pourra gâcher sa relative bonne humeur. Le soleil brille dans le ciel, les oiseaux chantent – enfin, il ne peut que le supposer – et il n’a que peu de cours sur toute la journée. Il s’entraînera au tir à l’arc, apprendra quelques termes de mandarin, se reposera de ses nuits trop courtes, l’esprit occupé ailleurs, à des préoccupations qu’il ne pensait pas avoir.

C’est dans la simplicité qu’il avala son repas du matin rapidement et à l’écart du groupe des une étoile. Pas envie de leur parler, même en utilisant un support écrit, bien plus simple et agréable pour quelqu’un d’embarrassé par son problème d’audition. Pas envie d’écrire aujourd’hui, de dialoguer. Il ne veut pas voir sa joie gâchée par les questions bêtes de ses compatriotes.

Il n’en a pas besoin, des autres. Il tente assez de s’en convaincre.

Ses pas le mènent dans les couloirs où il attrape ses affaires pour aller en cours. Le minimum, pour ne pas se surcharger, mais tout de même se montrer efficace. Il comptera les heures, le regard trop souvent posé sur l’horloge, le cœur prêt à s’évader loin, si loin, là où il sera tranquille, là où il pourra progresser et trouver un sens à sa vie, un sens qu’il n’est pas sûr d’avoir déjà entre les mains, alors que son humeur varie trop.

Mais ses prunelles claires sont attirées par des mouvements qui n’ont rien d’usuel dans la vie de l’Académie. Un petit groupe de trois adolescents est autour d’un quatrième. Yi fronce les sourcils et attend quelques secondes, observe. Il a un mauvais pressentimment. Il ne connaît pas les quatre personnes, il ne leur a jamais prêté la moindre attention mais… le dernier semble très gentil, un peu effrayé peut-être. Yi lit mal les signes. Il n’est pas sûr de lui, il n’est pas sûr du tout, mais il ne veut pas tourner le dos, pris par les doutes.

Il est peut-être face à une scène de harcèlement.

Les élèves sont plus jeunes, alors il approche. Il se refuse de parler alors il doit trouver un autre stratagème pour en avoir le cœur net. Il ne sait pas quoi faire, il hésite mais finalement, il rompt le groupe en deux, attrape la prétendue victime par l’épaule et la traîne plus loin. Le reste des garçons n’a pas bougé lorsqu’il lance un léger regard en arrière.

Immédiatement, ses mains fouillent son sac. Le stylo, le cahier sont sortis et il inscrit des termes simples et rapides, pour ne pas le faire fuir :

« Ces garçons t’ennuyaient-ils ? Te voulaient-il du mal ? »