l'appel aux débordements c'est comme s'ils savaient qu'on était fait pour les cercles vicieux. dans toutes les circonvolutions dont on cherche à s'éloigner ils tendent la main et comme on est titubant malgré les courbes décrites c'est systématiquement au milieu des chaos qu'on retourne -
pas d'accalmie au cœur des ouragans.

Felix a la rage Felix est à cran
Felix a les dents longues à force de ronger les os et d'emprisonner toutes les dissonances en dedans - on voudrait vraiment
garder les cataclysmes au tempo agitato loin des yeux mais ça devient fou de tourner en rond. et on aime, pourtant -
les mélodies oniriques ça change tellement des ritournelles infâmes avec lesquelles on s'est toujours endormi. précieux, presque sacrés ces repos où les arpèges des voix ne s'affolent jamais et qu'on a des souffles paisibles sur lesquels se synchroniser. et c'est si neuf, intact encore ce qu'on vit avec elle malgré tous les coups portés ils sonnent encore juste
les accords avec Aglaé.
c'est la seule symphonie qu'on voudrait jouer mais
on a jamais pu saquer le solfège et c'est maladroit
et si tu parles par dessus, Leonard
on va plus s'entendre.

c'est misérable comme Felix les connaît par cœur tes cantilènes. rien que les ouvertures et l'on reconnait automatiquement, pressent les mouvements qui vont suivre on tente de retenir les automatismes - vos complaintes se jouent les yeux fermés depuis le temps.
mais ça appelle ça appelle
ça rappelle à Felix ce qu'il est persuadé d'être et ça réécrit comme il faut à l'encre par dessus les promesses au crayon de se tenir
loin de toi.

tu sais très bien qu'une image floue ça suffit à rendre les contours des troubles nets au possible
qu'une image comme un indice des trames qu'on redoute c'est ce qu'il faut pour réveiller les peurs et les rancœurs. et qu'ils sont évidents vos mécanismes, lorsqu'on est face à quelque chose qui désarçonne !
dans ces moments là
on désamorce.

premier mouvement provoque deuxième mouvement répond
troisième mouvement en suspens
tu laisses dans le vide les messages qui demandent confirmation.
est-ce que c'est elle sur les photos osées ?
Felix exècre l'absence de réponse - ce n'est pas grave
on viendra chercher. à l'inverse de l'autre fois où l'on s'était dit que c'était le dernier fracas, tu montais à son étage
aujourd'hui Felix descend au tiens
les marches quatre à quatre (temps) et connaît par cœur, se passe de chef d'orchestre et de ton accord pour ouvrir la porte à la volée, referme derrière lui parce que ce n'a jamais été des visites volatiles Leonard tu sais bien comme on aime s'éterniser. ça faisait longtemps
avoue que ça t'avait manqué
les répliques de western.

montre ton téléphone
sale chien.

sur le sien on voit pas bien, Leonard

et vois comme aujourd'hui on répond présent
aux appels manqués.

tire des révérences avant les premiers pas de vos danses misérables Leonard aux airs teintés d'acrimonie toise et dit non. que c'est mesquin comme pantomime ! ça fait tourner la tête une seconde comme si c'était trop d'assister à la scène offerte, l'expiration narquoise diluée de dépit on a des vertiges furieux.
c'en est assez de remuer la terre non ? les charniers adolescents suffisamment gorgés du sang des ecchymoses griffés - ce n'est pas ce qu'on est sensé faire ? laisser fleurir autre chose. paraîtrait qu'il existe autre chose que vos passions teinte viscérale qui tranchent trop facilement les épidermes - des religions qui réparent les abimés.
Leonard tu aimes avoir seize ans et Felix méprise tous les âges, surtout les plus grands. on se ressemble. on a de la colère contre tout ce qui rend adulte trop vite - c'est des monstres aux crocs souillés d'innocence dévorée. nous, on n'est pas des gens mauvais. quand on (se) fait du mal ce n'est pas sous couvert de pensées tordues c'est presque insouciant. une belle dévotion, il n'y a rien de plus sincère. c'était peut-être une trahison que de se rendre à d'autres églises, et comme pour rappeler vos croyances originelles - vos promesses tacites - tu craches sur les nouvelles idoles.
tu rends fou - rappelles qu'on ne sera jamais un bon fervent, tellement on gâche toutes les adorations à briser les dogmes,
piétiner la confiance des autres comme bon nous semble.
tu te moques à coup de cloches qui sonnent atrocement, attendant patiemment qu'il accourt comme un fidèle,
il est là maintenant
et tu te fais prier Leonard - c'est bas ce que tu fais.

putain tu cherches trop.

trop comme il faut, et Felix franchit toutes les frontières, brûle les étapes qu'on a l'habitude de suivre exactement après tout ce n'est plus comme avant pas vrai ? sans cérémonie on a fait les pas jusqu'à toi et on se fiche de ce que tu as dans les mains comme les fois précédente, il ne dit plus montre et prend, une main venant tordre le poignet pour arracher de l'emprise. tu veux vérifier à quel point tu l'atteins, Leonard ? jusqu'où porte ta rancœur. elle résonne fort, Felix n'en peut plus de l'entendre.
et les moyens de communication dérobés on serre fort au creux de la paume pour étouffer, se redresse d'une impulsion et recule avant que tu ne viennes récupérer, Felix se détourne et lance
de toutes ses forces l'appareil d'un bout à l'autre de la chambre
pour faire taire contre la porte close dans un fracas de métal de plastique et de bois. sans réfléchir, mué par la haine intestine
tais-toi Leonard, tais-toi
elle aime toujours aussi fort briser les choses
tu vois bien.

trois lettres à l'origine de toutes les détresses. dire non c'est l'ouverture des symphoniques dysfonctionnelles de Felix, la genèse des caprices. c'est contredire ses prédictions et s'ébruiter, filer entre les doigts comme les mots comme les photos comme les émotions. c'est Felix qui dit non et pas toi Leonard, lui qui dicte qu'on n'a plus rien à faire ni aux creux des mains ni au bout des poings de l'autre parce que c'est rien qu'un mot rien qu'une photo et ça le met dans tous ses états
fait montrer les crocs aussitôt qu'on contrôle un peu moins.

et il voudrait scander hargneusement - laisse-moi tranquille ! il voulait qu'on lui accorde le vœux de fermer les yeux sur qui on est vraiment même si c'est un temps, même si on est un idiot au moins c'est insouciant. comme lui et toi avant mais sans les cris et les cassures. il n'a pas le droit ? à un peu d'accalmie dans ses orages. si c'est rien qu'une photo pourquoi tu tentes d'arracher, pourquoi tu brandis fièrement les morceaux d'images dérobées ? tu fous les nerfs. fais faire des volte-face, toujours des volte-face
on n'est bon qu'à ça. revenir hausser le ton et être cruel avec toi.

mais ferme-la ! jamais tu la fermes ?

on ne comprend pas, les messages les signaux - tu fais revenir et tu n'accueilles pas comme les autres fois, entache les photogrammes d'elle et lui tu laisses intact. loin ça ne va pas, près ça ne va pas.

c'est pas qu'une photo joue pas au con avec moi !

comme si on s'était pas fait assez mal comme ça tu en veux encore c'est ça ? et Felix planté sous tes yeux la violence au bout des doigts serre les poings voudrait garder à l'intérieur des paumes et dire non
pas encore une fois Leonard tu n'as pas le droit pas sans raison valable
sinon ça voudrait dire qu'on ne vaut pas mieux qu'avant.

inévitable. le galop des chevaux fous de colère qui piétinent tout ce qui pourrait dissuader. les torrents furieux balayant les terres fertiles d'adolescence. c'est fatiguant, ces travers - de travers on a grandi. c'est fatiguant de ne pas pouvoir mettre le doigt sur les commencements. à quel moment exactement on a planté des mauvaises graines dans les entrailles - toujours elles se tordent, que la raison soit sérieuse ou bien frivole. voudraient se tordre pour des causes honorables, ou du moins normales.

se faire des nœuds à chacune des retrouvailles avec Leonard. ah, c'était peut-être normal. après tout, on a l'âge qu'on a et sûrement qu'on a désobéi à des contrats jamais lus à haute-voix en coupant court. on suivait certaines règles. bousculer et électriser l'autre, se faire se sentir en vie, de la tension mais jamais au point de faire claquer le cœur. on a tout éteint. débranché. Leonard, la machine enrayée tu veux casser briser écrabouiller, faire en sorte que ça ne reparte jamais. de l'auto-sabotage toi aussi. c'est ce que Felix pensait en recevant tes provocations signées à ton nom. et désormais tu restes assis ? les poings serrés sur les dessus de lit et puis rien. rien que tes mots qui insupportent, ils sonnent creux. tu ne donnes même pas de bonne raison d'être là aujourd'hui alors
lève-toi au moins. lève-toi.
au quart de tour. pas une seconde de réflexion et il saisit au col pour redresser, de toutes ses forces d'habitude car on a les mêmes carrures c'est comme se faire mal à soi, il y a un peu de résistance. aujourd'hui pas du tout, tu en manques cruellement et ça achève l'envie de se retenir. debout l'un en face de l'autre c'est constater le manque d'implication, elle fout en rogne comme jamais. on voudrait te hurler dessus. demander si ça t'amuse - et puis non. on sait très bien que ça ne fait marrer personne tout ça et les sourires feints tu peux les garder Leonard. une main tient même si tu n'as pas l'air de vouloir te dérober, l'autre se referme en poing et on frappe. ricoche sur la pommette d'habitude on s'applique un minimum mais c'est brouillon et on se blesse au diapason. vacille dans l'impulsion et laisse retomber sur le lit, Felix manque de chuter avec et se redresse, part un peu en arrière. le souffle déjà court.

là on sortirait une réplique bien sentie, piochant dans les insultes qu'on se réserve toi et lui. mais rien. rien que la pulsion de combler vos silences, c'est trop de vide Leonard ni d'amour ni de haine on y jette tout le reste - ce qu'il y a de plus sale. les hauts-le-cœur, à vomir ce mal-être d'être insuffisant, tu ne te lèves toujours pas. et face à vos représentations pathétiques Felix vrille plus fort encore, saisit les chevilles de Leonard pour faire glisser du lit, il recule et tire jusqu'à ce que ce soit dans le vide jusqu'aux épaules, tire encore d'un geste brusque et omoplates et crâne heurtent le sol en premier dans un bruit sourd. il lâche pour laisser tout le corps épouser le parquet et enfin
enfin ça crie.
lève-toi !!
le deal c'est qu'on se pousse et tombe à deux - les dégringolades font moins mal c'est limite si on s'en félicite - aujourd'hui ce n'est plus le cas
alors que les chutes libres c'est tout ce qu'on redoute
aujourd'hui tu ne veux pas ? vraiment pas ?
Felix croit devenir fou.

les plaintes sincères font peur aussi, des confirmations qu'on fait souffrir à l'échelle souhaitée et encore, elles ont déjà résonné plus fort. plus fort Leonard ! un peu d'entrain ! tu fais du théâtre pourtant, tu devrais savoir que les inflexions de voix font toute la différence. elles ne rivalisent pas avec celles de Felix et ça l'agace autant que ça lui glace le sang de te voir endurer sans riposter. pas de bras devant le visage, pas de jambes contre la cage des os, rien qui ne se recroqueville. les assauts tu encaisses, c'est encore pire que repousser, c'est mépriser les déplacements qu'on a fait. et sinon quoi ? il va te frapper ? oui ? et alors quoi ? tu ne veux plus de Felix ? et bien ça tombe bien car il ne veut plus de toi non plus - si on est là c'est parce que tu cherches à faire flancher à l'aide d'images dérobées d'elle et regarde, on n'est pas celui qui se prélasse dans la poussière.

elle lui en voudra d'être venu jusqu'à toi - oh elle lui fera le reproche de toujours te rejoindre. et lui se maudit de continuellement te donner ce que tu veux, alors qu'on s'était juré d'arrêter
on ne sait quoi.

Felix ne sait pas quel combat on mène lorsqu'il contourne et prend de l'élan tout à coup pour shooter dans tes côtes. le bruit file la nausée, fait chanceler au dessus de Leonard qu'on s'efforce de toiser écœuré. il retrouve des souffles dans le tien coupé, du poison dans la bouche il crache presque les mots. c'est ce que tu veux non ? sinon pourquoi tu cherches encore la merde ? ne lui répond pas - il ne veut pas savoir. tes consentements font voir rouge et les inspirations de Felix s'emballent. il frappe encore, au même endroit. c'est passionné. parce que sinon rien, on n'a pas la réponse à tes questions Leonard, chez Felix aussi c'est muselé. te cogner une troisième fois comme trois points de suspension. on ne peut pas répondre Leonard tu t'es vu ? tu l'as vu ? aimer, on ne sait pas -
on ne sait que se taper dessus et s'exclamer. putain mais LÈVE-TOI !

seul dans des jardins de ronces, il n'y a que sur la peau de Leonard que les roses éclosent. celle de Felix toujours aussi blanche pourtant c'était comme s'être extirpé de sumacs vénéneux - le cou et les mains lui brûlent. honteux. souvent on se rejoignait coupable et l'on ressortait des affrontements vainqueurs, gagnants à deux. aujourd'hui les retrouvailles ne sont que des défaites cuisantes au cœur de grands silences. les hurlements sonnent creux, dysharmonieux on n'a même plus envie de les écouter et Felix grimace en voyant se tordre à ses pieds. égoïste Leonard tu es le seul à avoir mal et égoïste Felix il est le seul à blesser. ailleurs elle n'existe pas cette solitude alors pourquoi on reste ici avec toi ?

au moment où tu te redresses tant bien que mal il sent le paradoxe de vouloir saisir les épaules, pour que tu tiennes mieux droit ou bien que tu retournes au sol il ne sait pas. Leonard chancelant on n'est pas sûr d'avoir désiré un jour assister à ce genre de spectacle. sur les deux pieds on se toise et Felix tressaille, face à vos représentation pathétiques, aux trames qu'on voudrait bousculer tant elles ne suivent plus aucune logique.

Leonard, parle ! la prochaine réplique c'est la tienne. lis donc les didascalies, tu vois bien. avec les insultes elles précisent rendant les coups à Felix. si tu as oublié on peut te souffler la suite. t'intimer de te ressaisir pour que tu le saisisses par le col des chemises et que tu cognes - il mérite. il a presque envie de te dérober ça à l'aide de son alice. combien de fois on s'est drapé de parfums mortifères pour filer des urgences de faire taire à tout jamais. quand il a des peurs intestines ou bien des colères c'est ces fragrances doucereuses qu'on inspire - ça sent les chrysanthèmes - et il faut dans ce cas porter absolument nos mains à sa gorge et serrer. on pourrait. ce serait simple. on comprendrait alors ce qu'on fait là.
mais ça n'arrive pas. il n'y arrive pas après tout il réalise qu'avec toi comme avec elle et contrairement à tous les autres on n'a jamais eu besoin. et si continuer c'est commencer à user de tricheries alors non. Felix fait non de la tête - ah ça ne plaît pas à tout ce qu'il y a de furieux en dedans ! les poings tremblent dissonants. on est un garçon écœurant ! c'est ça que l'on doit faire ! mais non, non
non il recule même si c'est la moitié d'un pas, hors de leurs portées, tout ce qu'on offre c'est un regard aussi noir et dégoûté que celui de Leonard. j'sais pas pourquoi tu m'appelles, si c'est pas pour saboter les bails, j'pige pas c'que tu veux,
j'te comprends pas.
pour la première fois aujourd'hui - on ferait mieux d'en rester là Leonard avant qu'on ne se comprenne plus jamais. enfin, c'est sûrement déjà trop tard.

Felix fuit - et l'on aurait pu s'interrompre à ces deux mots car c'était bien ça, c'était bien lui - Felix fuyard, fêlé qui s'accapare et tente de garder entre les doigts comme les poignées de sable, inévitablement ça s'écoule par les entailles. perméable, qui laisse échapper tout ce qu'il y a de mauvais sang. on a beau être lézardé de blanc ça traverse la peau encore aujourd'hui et où qu'il aille il pollue à la source. on voulait rien qu'une fois dire tout haut - fini les éparpillements ! les torrents hémorragiques et les fleurs d'ecchymose ça suffit ! voyons si l'on est capable d'eau claire où porter des lèvres confiantes et de bouquets de cœur décorant joliment sa chambre.
en échange on délaissera les charniers pour de bon. on abandonnera Leonard même si nos parterres sont les plus fertiles pour que s'épanouisse le chiendent adolescent.

marre d'être une mauvaise herbe, marre de déplaire lorsqu'on compose de cette manière. elle avait dit que c'était laid et qu'elle ne voulait plus avoir ça sous les yeux alors on a tout emporté hors de sa vue et on cache. on enterre quelque part entre la tête et le cœur, à mi chemin des deux, c'est un poids sur les épaules qu'on consent à éprouver. même si ça pèse lourd, on y arrivera. il y arrivait très bien jusque là. l'envie de contredire Leonard qui dit que non mais les phalanges écorchées pulsent d'approbation lancinante. oui, va, si tu veux on marchait bas ! le ventre frôlait presque le sol lorsqu'on est venu ramper par ici, et alors ?
alors même si tu trébuches sur les mots
celui qui se tient toujours bien droit
c'est bien toi, Leonard.

toi le vainqueur de vos retrouvailles, le roi de la triste fête ! celle dont tu parles elle en penserait que les ornements sanguinaires te vont mal et que ce que tes bégaiements révèlent est ignoble.
et Felix n'arriverait pas à être une énième fois
d'accord avec elle.
frappe-le.

c'est ce que hurlent les veines, c'est ce qui suinte sur sa peau. des grands parfums mortifères, Felix fragrance hostile, émane des humeurs qui t'appellent en chœur - frappe-moi Leonard ! si se tenir devant toi ça ne suffit plus alors on va tricher. pour la première fois, on en est là. à feinter la pulsion de mort face aux bestioles qui agonisent et se tordent à nos pieds, la vision de lui rendue insupportable par l'alice
Felix saisit le col des chemises et lève le poing et puis rien -
toi d'abord Leonard, à défaut d'autre chose
frappe-moi
un peu beaucoup passionnément
frappe-moi
à la folie.