il y a quelques mois, il s'imaginait dans cette pièce. il avait un costume et elle portait une longue robe. ah, sûrement s'était-il projeté trop vite. ah, sûrement s'était-il imaginé des choses qui n'auraient jamais lieu. pourtant, il s'imaginait toujours, dans cette pièce, il portait un costume et elle portait une longue robe.
il s'était assis au centre et regardait les plafonniers d'un air nostalgique. cassiopée. elle avait été sa reine, mais il n'était que le prince. ça n'avait pas duré, et il s'en voulait encore, cherchait à comprendre ce qui avait amené qu'elle s'en aille.

il s'était relevé, avait marché, fait les cent pas. il s'était imaginé la musique, la valse, le bruit de leur pas. il n'y avait rien de tout ça, à présent, seulement le silence de sa propre morosité. le silence de sa tristesse, qui était elle aussi muette. il n'avait pas voulu en faire une scène, il n'avait pas voulu la retenir, parce qu'il savait bien, il la connaissait, elle ne serait pas restée même s'il l'avait supplié.
il ne servait plus à rien de rester ici à se morfondre, alors il était parti. il avait ouvert la porte et s'était glissé dans le couloir.

et puis, elle était là.
cassiopée. il l'avait murmuré.
et soudain, il avait tout oublié. il avait oublié qu'elle ne se laisserait jamais convaincre et avait voulu se jeter à genoux et prier pour qu'elle se laisse une dernière fois glisser entre ses bras, glisser entre ses draps.
tu me manques.
on ne pouvait faire plus direct.

il était de retour dans la salle de réception. une nouvelle fois, ses fantasmes l'envahissait. il voyait les ombres d'un public, les vestiges d'un buffet, les rires et les sifflements. sa main dans la sienne. sa main sur sa hanche. les pas d'une valse. c'était toujours la même chose.
j'ai dit que tu me manques.
et il sait qu'il a l'air idiot de penser que ça lui ferait quelque chose, et il sait que rien ne la ferait réagir et revenir à une relation d'un passé qu'elle avait oublié. pourtant, il espérait, que quelque part, elle se souvenait.

des moments passés, des sourires échangés, des petits mots envoyés. lui, il se souvenait de chacun d'eux. il se faisait pitié, d'une certaine façon, à s'accrocher aux ruines de l'ancien temps.
je n'ai jamais su ce qui t'a poussée à partir.
était-ce moi? ai-je fait quelque chose de mal? il finissait par se demander s'il n'avait pas été le monstre de leur histoire, le cauchemar de ses cauchemars, la propre cause de ses incertitudes. elle pourrait enfin lui répondre, si jamais elle le voulait, et il l'espérait.
il n'en pouvait plus de vagabonder en s'accrochant à des illusions. il fallait tourner la page - non, brûler le livre.
réponds-moi, je t'en supplie.

son ton était celui du pathos, plaintif, excessif, indubitablement pathétique. son image, d'habitude si précieuse, était ici capturée sous un angle différent ; laid. et il n'en tiendrait rigueur, car tout ce qu'il sait voir à l'instant, c'est ses iris qui croisent les siens.
est-ce qu'il y a une raison, même?

pas fait l'un pour l'autre. alors que faire de ses faibles illusions? il avait cru... l'espace d'un instant...
ses poings se serrent, sa mâchoire se crispe. il avait cru, il avait cru...
non, je n'ai pas avancé.
il ne mentirait pas pour lui faire plaisir - il allait peut-être finalement lui faire la scène qu'il avait évité de lui faire subir il y a quelques mois. elle ne la méritait pas. il le savait. il ne se contrôlait pas.
je comprends pas, il y avait tout.
il y avait leur capacité à briller sous la lumière, leur personnalité... il pensait l'avoir trouvée, l'âme soeur. il se trompait. il savait qu'il s'était trompé. à présent, il ne s'en rendait pas compte, mais il le savait.
il y avait vraiment tout.

on l'était, cassiopée... il y avait vraiment tout.
il ne faisait plus sens et ses pensées non plus. il n'y avait que de la brume et s'il avait pu cogner le mur sans lui faire peur, il l'aurait fait. il était du genre à rire, quand il voyait des gens le faire, pourtant, il comprenait, bizarrement, viscéralement, quelque part, il ressemblait à ces garçons. ces garçons en colère, ces garçons remplis de frustrations.
il détourne la tête.
dis-moi, réfléchis, il y a forcément une raison, quelque chose, chez toi, ou chez moi, que j'ai fais... qu'on a fait...
il se perd.

il se perd les méandres de ses réflexions. il se haït, il aimerait s'en aller, ne pas aller plus loin et la laisser tranquille. elle avait raison. peut importe la raison, elle avait eu raison de s'en aller. il n'était pas en capacité, il ne l'avait jamais été... il ne pouvait pas l'aimer.

elle avait brisé son reste d'espoir en quelques mots. elle avait pris peur, et il aurait dû s'y attendre. il savait, pourtant, qu'elle était ainsi, il l'avait vu, il l'avait compris, parce qu'il avait tout su d'elle. il était resté aveugle, en se disant qu'avec lui, ça serait différent.
non, il était comme tous les autres. temporaire.
eh. il avait ri, dans un rictus rapide.

il avait perdu ses sens et ne savait plus que dire.
tu savais ce que tu faisais, cassiopée, tu le sais très bien.
il n'y croyait pas, à ses hésitations. il n'y croirait pas. il ne pouvait se persuader qu'elle puisse être incertaine - peut-être l'était-elle vraiment, ollie n'y réfléchirait pas.
et n'essaye pas de me convaincre du contraire avec ton alice de sorcière.
il bouillonne, il se perd dans sa colère. l'ire est terrible et elle déchaîne les flots de son coeur meurtri. il était cette fragile porcelaine dont on se moque. il avait sa fierté étalée sur le sol. cassiopée l'avait piétinée.
tant pis, c'est trop tard maintenant.

il s'était éloigné et avait parcouru la salle de réception une dernière fois, en effaçant ses projections qui n'auront jamais lieues. il s'était laissé abattre par la situation et avait baissé la tête.
va, avance avec tes mensonges. au moins, t'auras essayé, hein? un mec de plus.
c'était bas, même venant de lui. il aurait pu essayer de se pourfendre en excuses "désolé, c'est pas moi, je ne me reconnais pas", mais c'était bien lui.
la mocheté, la méchanceté et l'irrespect viscéral qui prenait possession de chaque cellule de son être à la moindre inconvenance.

il inspirait la pitié et elle avait raison. c'était plus facile ainsi.
il n'avait rien dit lorsque son dos avait touché le mur, lorsque son bras avait frôlé sa pomme d'adam. il s'était tu et c'était pour le mieux. il réalisait alors, à quel point son comportement était déplacé, à quel point elle ne méritait pas ses injures. mais il n'était pas prêt à s'arrêter, il n'arrivait pas à le faire. il se trouvait une nouvelle fois dans une spirale de pêché qu'il n'arriverait pas à stopper.
il se regardera dans le miroir ce soir, en maudissant son visage et en L'implorant de le pardonner. comme toujours.

elle s'éloigne mais il la rejoint. il la toise et l'écoute.
non, je ne viendrais pas. tu pourras dédicacer ta chanson à ton futur jouet. préviens-le dès le début que tu vas le lâcher, ça lui évitera de s'investir trop.
il l'avait dépassé et avait posé sa main sur la poignée. il était temps de partir, il était temps de mettre un terme à cette mascarade.
il passe la porte et avant de la fermer - claquer - il murmure kehba, comme s'il n'en avait pas fait assez.

ollie, sous ses airs de grand homme, n'était qu'un homme comme les autres. celui à qui on croit pouvoir faire confiance, le nice guy qu'on adore, sans se douter que loin des regards curieux, il n'avait rien d'appréciable.
non, il se haïssait tout autant que les autres devraient le haïr, mais ne le feront pas car il sait le déguiser.