Marie-Louise*, 13 ans et demi (*identité connue de la rédaction): Alors euh il paraît que tu vois les âmes soeurs des gens?
Val: Oué.
M.L.: Tu peux voir la mienne?
Val: Oui.
M.L.: Hii. Tu peux me dire qui c'est?
Val: Non.
M.L.: Euuuh mais pourquoi?
Val: Je préfère ne pas me mêler de ça. Il faut laisser faire le destin! Et puis ce serait comme connaître ton avenir. Un peu dangereux et pas très drôle!
M.L.: Mais si j'ai envie?
Val: Bah c'est dommage parce que c'est mon Alice, pas le tien.
M.L.: Maiiiis!

10 minutes de lourde insistance plus tard

Val: Oké j'accepte en échange de 5 rabbits.
M.L.: Oh la la t'es dur en affaire... Tiens!
Val: Merci. Donne-moi tes mains.

il ferme les yeux et prend un air concentré

Val: Mmh... Je vois.... Je vois...
M.L.: Ouiii?
Val: TA MÈRE!
M.L.: Menteur! Et mes 5 rabbits?
Val: C'est pour être sûr que tu reviendras pas.


Valéry, c'est ce nain (1m72) qui devrait passer inaperçu, mais pas du tout. Déjà faut voir ses fringues, heureusement que l'uniforme existe sinon il aveuglerait jusqu'au Soleil, et les astronautes lui feraient coucou depuis l'ISS. Non, Val n'a pas un style très harmonieux. Il s'impose pas mal pour compenser son gabarit de crevette et remettra en question tout ce qui sort de votre bouche, mais ne vous laissez pas impressionner car intérieurement, il a l'ego d'une chaussette. Une chaussette sale. Sale et usée. Avec un gros trou au talon.

Bref, Val est comme toi et moi.

Il ne vit pas très dangereusement au quotidien. Le matin, c'est toujours thé et pain au chocolat. Jamais de café, son corps n'est pas habitué, ça le rend nerveux. Il n'aime pas être en retard et fustige ceux qui le sont, mais il attend. Toujours. Il ne dort que sur le côté et très mal accompagné. C'est-à-dire qu'il pousse inconsciemment l'autre personne à coups de pied. Quand il a une bonne note en cours il demande au prof s'il est sûr de ne pas s'être trompé. Il ne lève jamais la main, parce qu'il ne sait jamais rien. Alors quand on l'interroge, c'est la panique.

(Moi? Ah non pas moi! Lui, là! Mais j'en sais rien! Napoléon? 1942? JE ME SENS OPPRESSÉ PAR VOS QUESTIONS INCESSANTES, MONSIEUR - Val, tu sors. - Oké.)

Val, c'est un petit être sensible, il ne faut pas brusquer ses habitudes. Derrière ses manies et ses préférences très marquées, il ne sait pas prendre de vraie décision.

(Pain au chocolat ou chocolatine? Euh non merci je rentre pas dans ce conflit.)

Que fera-t-il dans deux ans? Demain est déjà difficile. Val suit sa routine sans se poser de questions, l'incertitude l'angoisse. Comme tant d'autres choses. Heureusement, Val est doué pour faire l'autruche. Le déni, ce grand ami.

(Lui au moins il m'abandonnera pas.)

Il contrôle parfaitement son Alice, ce qui n'est pas très difficile. Il maîtrise nettement moins ses résultats scolaires, d'où la bifurcation en arts, car c'est un manuel. Mais ce qu'il gère le moins au monde, ce sont ses relations amoureuses. Il a fait tellement d'expériences foireuses qu'il est devenu de très bon conseil... à défaut d'aider les autres avec son Alice. Il a appris, à ses dépends, qu'il valait mieux ne pas s'en servir. Et puis, faut pas déconner

(c'est pas marqué Madame Irma sur mon front!)

Le plus drôle dans l'histoire, c'est que ça ne marche pas sur lui. Val voit tous les fils rouges autour de lui, sauf le sien. Quelle grosse arnaque. Il a bien le seum, Val, il faut le dire, et vraiment pas que ça à foutre d'aider à former des couples. Il se console comme il peut (plus tard il aura un cochon) et répète à l'envi qu'il ne croit pas en l'amour. En même temps, qu'est-ce que tu veux faire quand tes propres parents se séparent après avoir découvert qu'ils n'étaient pas des âmes soeurs?

Valéry oscille régulièrement entre le «aaw» quand il voit un petit couple parfaitement assorti et lié par le fil de leur amour, et une jalousie violente qu'il a mis des années à canaliser. Enfant, Valéry a fait des choses dont il n'est pas fier, par rancœur

(je sais que t'as pas d'âme soeur)

(ça veut dire que personne t'aimeras jamais)

ou pure convoitise, et

(de toute façon t'es moche)

(et conne)

(sale pute)

et c'est une des raisons pour lesquelles il essaye d'aider au mieux, sans son Alice. La culpabilité se nourrit des regrets. Valéry avance sans trop réfléchir, et quand la solitude tourne trop fort dans sa tête il fait des trucs bêtes, pour ne plus penser. Comme ses autoportraits de dépressif ultra moches là, avec mille couleurs qui t'agressent la rétine. C'est toujours mieux que de se bourrer la gueule à 3h du matin.

À part ça, il le vit bien. On croit souvent que Val déprime, parce qu'il oscille entre la mono-expression et ce petit sourire en coin, légèrement insupportable. Surtout quand il trolle ceux qu'il n'aime pas

(ton âme soeur c'est Collins!)

(waw)

(j'suis trop jaloux)

mais il va bien.