croissant et petit beurre. des yeux bien fixes dans les siens. le couteau étend la graisse sur la pâtisserie, puis sur son pouce, puis sur la pâtisserie, puis sur son index. pepo, la tête fait oui, mais la partie gauche de son cœur, elle, beaucoup moins certaine.
le bol de chocolat chaud fume. on espère pouvoir y boire une gorgée avant que ça ne refroidisse.
croissant et petit beurre. pepo happé par les gesticulations de bernice. on ne sait plus, au final, où placer les yeux. et sans point de repère, tu comprendras, bernice, qu’il est difficile de se faire une bonne idée de tes harangues.
baisse le regard, réalise qu’il s’est beurré les mains. prendre la serviette et façon gentleman anglais s’essuyer. bien éduqué le pepo. et pendant sa toilette, le cœur pompe pompe pompe
parce que tu t’emportes. on croit que c’est de sa faute ; la passion comme concept c’est encore flou. alors pepo, de sa voix lente et articulée ose te couper
il dit
mais bernice, ce n’est pas ma faute, je ne comprends pas ce que les businessmen font dans ton pot d’hummus. tu es businessman ? pas moi, tu sais. et en ce moment, il n’y a personne d’autre à notre table.
qu’un pot d’hummus acheté par bernice. par goût et aussi tentative d’expliquer à pepo les droits des étudiants de l’académie. métaphore jusqu’à maintenant insaisissable. et c’est très angoissant pour lui. pepo, l’impression d’être forcé à manger du plat. parce qu'il se sent comme un salary man qu'on vient de monter en bussiness man. et vraiment, diriger, ce n'est pas sa spécialité.
s'il-te-plaît, bernice, au secours il ne comprend rien.
Sujet: Re: propaganda w/ bernice Mar 14 Jan - 4:40
p r o p a g a n d a
« Ok ok ok, je reprends du début. »
Bernice et ta sainte patience, faudrait peut-être reconnaitre quand arrêter. C’est la troisième fois que tu présentes les bases – et bases, c’est dit vite. Tu songes à une carrière en architecture ? Faudrait songer à la réorientation darling parce que jamais on a vu des fondations aussi fragiles. Ouais, une fois la maison construite, ça fait un beau tout harmonieux, mais tu peux pas faire de la tuyauterie avec les tuiles du toit Bernice.
And yet, le message passe pas. Tu prends le pot d’humus et tu le centres bien devant toi.
« So. We’ve got a big pot of hummus. »
Visuel à l’appuie, tu fais des gestes exagérés avec tes mains, un peu comme des feux d’artifices étaient projetés des pois chiches écrasés. Son brun très bio n’incarne pas la joie, tu compenses en ajoutant plus de couleur – tu serais douée en marketing.
« Les businessmen – ils sont pas là avec nous, ok, faut les imaginer – ils ont le contrôle absolu du pot de hummus. Tu me suis ? Genre, c’est eux qui décident qui y a accès, qui peut manger quoi. »
Boom. Tes mains devant le pot érigées en barrière.
« Et les businessmen, ils te disent ‘tu peux pas payer ? ben tu mangeras pas de hummus’. »
Sourcils froncés. La démonstration arrive à son point culminant.
« Ça, c’est le capitalisme. Et c’est mal parce queeeeeee ? »
Grand sourire encourageant. T’es sûre que Pepo a la réponse sur le bout de la langue. C’est que le début – genre la ligne deux à trois de ton manifeste (la première c’est l’entête, duh) – et oh, Pepo l’ignore, mais il y a encore tellement de choses à dire.
Sujet: Re: propaganda w/ bernice Dim 19 Jan - 19:58
marx hummus ?
oui, s’il-te-plaît ; reprends du début. c’est écrit en taille soixante-douze zoom 200% dans
ses yeux qui fixent le pot. on a enroulé ses doigts autour du verre d’eau. le reste du corps, suspension. so. we’ve got
sa tête fait oui. coup sec. ça, pepo l’a compris. après, c’est là que le discours se complique. pour la troisième fois bernice, même erreur, pepo le cœur sur le bord de lâcher. le regard énervé par tes gestes. qui-vive. détresse. pepo, comme s’il pressentait un danger.
crispe les doigts autour du verre. yeux écarquillés. rigide, mais vivant. que le cerveau en marche, qui assimile la parole de bernice. analyser l’espace,
non. parce qu’on ne sait plus traiter l’information. sursaut quand tes mains s’abaissent. la partie gauche, vraiment, elle va lâcher. pepo, se calmer durant tes explications. pour cela, se souvenir des fissures dans les toilettes de sa chambre. cinq grandes six moyennes dix petites. cinq grands six moyennes dix petites cinq six dix cinq six
pompe un peu moins, le cœur. on commence à se détendre et puis
parce queeeeeee ?
pepo replacer sur l’échadaud, poupée de chiffon pepo. yeux retourner dans ceux de bernice. plantés piqués rivés vissés.
mais si les businessmen ont le contrôle, bernice, pourquoi c’est toi qui a le pot. je ne comprends pas ce que tu fais dans le réfectoire avec le pot contrôlé par les businessmen. c’est pour ça qu’ils ne sont pas là ? ils ont décidé que tu y as accès ? et que voudraient-ils que tu manges d’autre s’ils contrôlent un pot d’hummus ? et puis c’est vrai que c’est un business comme tu dis, un pot d’hummus, mais les marques doivent varier, non ?
comme une révélation.
c’est pour ça que c’est mal ? parce qu’on ne prend pas la bonne marque ? il faut dire qu’un hummus bio, c’est mieux. est-ce que ton hummus est bio bernice ?
Sujet: Re: propaganda w/ bernice Sam 25 Jan - 3:39
p r o p a g a n d a
Bernice, fière, tu crois que c'est si simple. Pas pour tous. Pepo Pepo Pepo se lance dans un grand solo à côté du topo. Et là, c'est toi qui es complètement larguée. Y'a une logique derrière ce qu'il dit, t'es sûre Mais t'arrives pas à trouver le fil, le saisir dans sa course et l'arrêter avant qu'il ne se perde pour de bon. Alors tu le laisses débobiner tout ce qui lui passe par la tête, et tu le regardes, t'attends la grande finale Et oh, qu'elle est belle.
« … Non. Non, il est pas bio. Y'en avait plus quand j'ai pu aller à Central Town. »
Elle rougit presque devant sa faute. Bernice, c'est pas grave, y'a pas de militant parfait. Comme a dit un sage, il faut choisir son combat – et y'a des choses beaucoup plus importantes qu'un hummus bio ou non !
« Mais c'est pas ça la question, ok ? » Défensive. Mais on se reprend. Le dos droit. Prête à recommencer. Ou pas. C'est la troisième fois. Il faut peut-être changer de stratégie ?
« Ok. On oublie le pot de hummus. Tiens prends des carottes et goûte, c'est bon. »
Invitation cordiale. On détend la conversation. Essaie. Mais l'analogie te surprends toi-même. C'est trop beau pour être ignoré, alors retour au pot d'hummus :
« Tu vois, partager, c'est du communisme. Et c'est bien, tu trouves pas ? »
Tout sourire. Certaine qu'on peut pas se perdre cette fois.
Sujet: Re: propaganda w/ bernice Ven 31 Jan - 22:29
marx hummus ?
je sais bien. tu ne l’as pas posée, ta question. tu as commencé, tu as dit :
imite bernice.
parce queeeeeee.
pepo, fin de l’imitation.
et puis c’est tout. mais bernice,
reprend l’imitation.
parce queeeeeee
fin de l’imitation (bis).
marque une réponse. pas une question. mais il faudrait savoir quelle est-elle pour que la réponse parle de businessmen. mais ok. on oublie.
il aime bien ce mot, pepo. ok. les gens semblent relaxes quand ils le disent. ils semblent cool. et ça sonne cool aussi. ok. le dit une seconde fois, essaie d’avoir l’air cool pepo. tend la main de façon cool prend une carotte de façon cool dit c’est vrai que c’est bon de façon cool s’apprête à tremper le bout dans l’hummus de façon cool
se fait surprendre, se fige, les grands mots en -isme sont fichés dans la liste noire des concepts abstraits les plus tortueux, les plus hermétiques. pepo pris de court. pas cool.
je ne sais pas bernice. d’après la ferme des animaux de georges orwell, cela commence par ce qu’on nomme une bonne intention, mais les cochons ont peur que les autres animaux ne comprennent pas la bonne intention alors ils contrôlent tout. c’est compliqué le communisme. tu t’y connais bernice ?
non pas qu’elle tente de le lui expliquer depuis le début du repas. pepo croque dans sa carotte.
mais le partage c’est bien. bien vrai, bernice. et c’est encore mieux parce qu’on peut partager partout. il est bon ton hummus bernice.
Souris, Bernice, souris. La bienveillance passe d'abord par la bonne volonté. Pis esti que t'en as besoin en cette minute. Pas que tu supportes pas qu'on te contredise – naah, t'es toujours partante pour les débats et les discussions houleuses. T'aimes le rush d'adrénaline, la possibilité de vaincre – de faire entendre la voix de la raison. Tu n'es pas née Cassandre, c'est les autres qui sont sourds. Et pour Pepo, t'es prête à hurler dans un mégaphone pour lui ; tu t'époumones, tu investis dans l'hummus, tu trouves mille exemples…
Et il sait déjà de quoi tu parles le calice. Pis il te demande si tu connais ça, toi, le communisme.
Ferme les yeux, Bernice. Tableflip intérieur. Continue à sourire. Ouvre les yeux. Enthousiasmée :
« Oh ! T'as déjà lu Orwell, c'est cool ! »
Une nouvelle carotte plongée dans le hummus, des ronds tracés comme un requin qui tourne autour de sa proie.
« Et tu as raison, les bonnes intentions ne sont pas tout ce qui compte ! Il faut surtout bien les… exécuter, sinon ça peut donner des trucs comme La ferme des animaux. C'est pour ça, Pepo, qu'il y a plusieurs formes de communisme. »
Comme il y a plusieurs formes de féminismes ou d'hummus, mais tu tais cette comparaison rapidement parce que tu le sais que tu vas juste t'enfoncer, t'as appris ta leçon. Mais ça te donne une idée. Et si on faisait l'inverse ?
La tête appuyée contre ta main, tes yeux tombent sur Pepo, encourageant, penses-tu, mais tu donnes plutôt l'impression qu'un lion prêt à bondir à n'importe quel moment. Et pourtant, tu enchaînes sur un ton hypra mielleux :
« Mais dis moi Pepo, d'après toi, comment est-ce que ça aurait terminé La ferme des animaux si les cochons avaient eh… fait confiance à leurs camarades ? »
croque enfin sa carotte et il est PÉTILLANT pepo parce que bernice a inséré dans la même phrase le pronom tu (et à qui d’autre s’adresse-t-elle actuellement, dans le réfectoire ? bingo ! à pepo) et l’adjectif cool. pepo pétille de savoir que lire orwell c’est cool. il pourra le dire aux camarades de classe, ça sera un beau sujet de conversation.
bonjour, vous saviez que lire orwell c’est cool ! lisez orwell, comme ça on aura un truc cool en commun ! ce sera TROP cool !
pepo croque sa carotte, n’avale pas.
pardon bernice, tu l’as encore égaré quelque part en chemin. pardon bernice, on va encore te demander un peu de patience, pardon bernice si la question chemine avec difficulté vers ses oreilles, pardon pardon mais
mais bernice, on n’exécute pas une bonne intention. exécuter veut dire tuer. mais ça ne se tue pas une bonne intention. ce n’est pas une personne ou un animal. ou alors, tu veux dire que ce qui compte c'est qu’il faut bien tuer la personne qui a une bonne intention, berni
pepo bouche bée. on ne lui a jamais dit quoi faire en présence de meurtrier. oublie la question, oublie celle qu’il allait poser sur les formes de communisme, pepo blême.
Sujet: Re: propaganda w/ bernice Jeu 20 Fév - 3:04
p r o p a g a n d a
Pardon Pepo, Bernice n'est pas un dictionnaire sur pattes Les mots et leurs différentes significations, c'est pas vraiment son truc Même pas du tout En fait, tu lui apprends presque quelque chose Tu la fais douter
Merde est-ce que exécuter est vraiment seulement utilisé pour parler d'une personne ?! Certaine de son erreur Mais incrédule Ne l'accepte pas
Mais doit se défendre devant une accusation grave Attaque à son intégrité Sa personne Son image Et au bout de la ligne Les grands projets qu'elle défend
« Quoi, mais NON ?! »
Le mot sort fort. Assez pour faire tourner quelques têtes. Bernice qui sort de ses gongs ? Aha ça risque d'être drôle. En plus devant le pauvre Pepo. Mais reprise sur soi. On respire Bernice, on respire. Les mains tendues, ta tête entre tes paumes.
Un malentendu. Un pauvre malentendu. Rien qui ne peut se régler sans un sourire. Crispé. Un rire. Faux.
« Pepo, non, je veux pas tuer quiconque. On s'est mal compris. »
Parle entre ses dents. Mord dans sa joue pour ne pas éclater.
« J'ai du utiliser le mauvais mot… Je voulais dire… Que.. bien… »
Fuck, l'idée s'est envolée, elle ne sait même plus de quoi elle parle, Bernice. Et c'est comme trop tout à coup. Elle lâche un grognement de frustration. Et elle tombe. Sa tête. Entre ses bras croisés sur la table.
Est-ce qu'on faire delete sur toute cette interaction ?