Papa avait toujours été un homme de goût qui ne s’entourait que des plus belles choses.
Ses costumes étaient taillés sur mesure, ses poignets ne s’ornaient que de Rolex ou de Cartier, il ne conduisait rien d’autre que sa Bentley et même son alcoolisme avait un on-ne-sait-quoi de distingué ; mais le plus beau des accessoires qu’il s’était jamais procuré apparaissait pendu à son bras lors des mondanités.
Maman avait été élue deuxième plus belle femme de Bristol et offrait des sourires à en tomber à la renverse ; jolie ballerine à la retraite, devenue mannequin s’était empressée d’épouser le jeune trader le plus fructueux du coin quand celui-ci était venu cogner à sa porte.
Il avait trouvé la femme-objet parfaite et elle s’était assuré la vie de luxe dont elle avait toujours rêvé –pas beaucoup d’amour au rendez-vous mais chacun y trouvait son compte. Ajoutez à l’équation la plus jolie des petites filles, née au bout de deux ans de mariage, et le bonheur était à son comble
paraît-il.

Parce que Papa n’était pas un homme très fidèle, ni à ses principes, ni à sa femme –la fortune et la satisfaction de ses désirs immédiats étaient ses seules véritables amantes et il n’hésitait pas à tromper toutes les autres en leurs noms.
Et pour tromper Maman, il ne lui avait pas fallu beaucoup de temps ; un petit mois de trop suivant la naissance de leur fille où il n’était plus le centre de son attention et le voilà parti dans les bras d’une autre, et d’une autre et d’une autre encore. Maman était bien sûr au courant, mais le deal était le suivant : tant qu’il ne salissait pas son nom publiquement, elle voulait bien garder le secret et préférait la petite vengeance mesquine du quotidien au divorce scandaleux qui ne les arrangerait en rien.
Sauf qu’un jour, le scandale est arrivé sur le pas de la porte d’entrée.

« C’est ta fille, je n’en veux pas, c’est à toi de l’élever. »

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