Existait en ce monde des puissances destructrices aussi incontrôlables qu'incohérentes.
Agon était de ceux là.
Non pas qu'il possède, à l'instar de ses camarades, quelconque pouvoir capable de mettre à mal physiquement un autre élève.
Il n'était pas capable de faire naître le feu au creux de sa main ou d'enliser dans la glace d'un simple mouvement.
Mais l'ouragan doré avait un esprit suffisamment dérangé et un comportement tellement incompréhensible, même au vu de sa propre psyché, pour faire de lui une véritable menace à quiconque aurait le malheur de se retrouver sur sa liste noire.
Que ce soit le harcèlement qu'il fait subir à Ginger concernant sa demande en mariage ou bien son intérêt maladif pour le quotidien des élèves de l'académie, Agon avait déjà prouvé plus d'une fois être un garçon plein de ressources et suffisamment obstiné pour aller là où ses fantasmes peuvent le porter.
Aujourd'hui, il avait jeté son dévolu sur Dmitry Kotov qui, même s'il n'avait rien d'un enfant de chœur lui-même, ne méritait probablement pas tous les sévices auxquels Agon souhaitait le soumettre.
Mais il savait faire preuve - ou peut-être pas - de retenu.
L'important dans une mise en scène, c'est la première impression.
S'il s'était extirpé sans mal de la télévision de Dmitry pour s'infiltrer dans sa chambre - bien conscient qu'il serait présent à ce moment là - c'est recouvert d'un sang factice, préparé à l'aide de sirop de maïs, de chocolat et de colorant alimentaire, qu'il se présentait face à lui.
Préparation effectuée dans le club de cuisine qu'il avait également infiltré il y a de cela quelques heures, il en avait également profité pour subtiliser plusieurs couteaux qu'il tenait dans ses mains - ou entre ses doigts - alors qu'il se déplaçait dans la chambre, le regard insistant sur Dmitry.
Il se positionnait devant la porte.
Un sourire carnassier figé, il jaugeait l'impression qu'il devait faire au jeune homme avant de planter brusquement un des couteaux dans le mur, agitant une autre de ses lames en direction de l'étudiant.
S'il n'avait dans un premier temps aucune intention meurtrière envers son interlocuteur - cette mise en scène ressemblait finalement plus à une blague de très mauvais goût qu'à une véritable menace - on ne savait jamais comment pouvait réagir Agon s'il se sentait en danger.
Le mieux était peut-être même d'accepter son petit jeu.
Un petit éclat de rire plus tard, il répondait finalement à la question de Dmitry.
«
FIGURE TOI, mon bon Johnny, que j'organise une petite purge aujourd'hui. Je sais pas trop pourquoi, mais tu t'es retrouvé sur ma petite liste, HAH. PAS D'BOL, COMME ON DIT. Enfin, tu peux peut-être m'aider à comprendre. »
L'homme jaune penchait sa tête sur le côté, l'air de réfléchir, avant de poser de nouveau son regard dérangé sur Dmitry.
Il savait bien pourquoi il était là, aujourd'hui.
Parce qu'il avait le malheur de discuter un peu trop souvent avec sa petite sœur.
Chose qui le contrariait un petit peu.
«
AUJOURD'HUI NOUS PROPOSONS UNE LARGE GAMME D'INSTRUMENTS. Tu peux choisir ton préféré. J'aime bien le couteau à pain, moi. »
Mais il avait toujours le temps de s'expliquer.
Après tout.
Il n'était pas un monstre.