opération oiseaux cheloues : amorcée.
la forêt était probablement l'endroit qui accueillait le plus souvent rune -un vrai rune, alerte, éveillé, attentif, heureux d'être ici. il s'était habitué aux couleurs bleues, si bien et si vite que parfois, il se demandait pourquoi les feuilles en-dehors étaient vertes, et il sait que c'est à cause de la photosynthèse, de la chlorophylle (ou l'inverse peut-être, qu'importe, il se contente de les laisser exister) mais imagine : des arbres multicolores.
là n'était pas la question, aujourd'hui, tristement. non ; pour les prochaines heures, il faudra faire d'autres exploits -notamment garder magnolia bien au calme pendant des plombes. c'est que madame savait ce qu'elle voulait, mais son explosibilité notoire rendait les choses plus délicates quand on parlait de petits mammifères volants effrayés au moindre bruit.
mais rune avait tout prévu.
alors le voilà qui la traîne, dans cette forêt qu'il connaissait comme sa poche, jusqu'à l'endroit choisi -une petite bande enherbée, deux mètres carrés sans tronc pour les gêner. il la laisse parler si elle en a envie, lui n'a pas de mots accrochés à sa langue : il sort une bâche de son sac, la dispose sur le sol, y ajoute deux sacs de couchage et une couverture toute poilue. aller, allonge-toi. qu'il lui dit, sans forme quelconque, lâchant les jumelles et autres livres sur le devant de la bâche. et enlève tes chaussures. il se glisse dans son duvet, couleur de bois -ah, même les couleurs militaires faisaient tâches ici. espérons que ça fonctionne malgré tout. et maintenant, on attend. on attend. longtemps, probablement. et surtout, en silence. sans un mot, il lui tend un thermos, au cas où. à elle de voir si elle tente l'aventure de boire sans savoir ce qu'il se trouve dedans.