j'assiste à mon propre enterrement (noah)

Malgré le soleil du ciel le coeur sombre lentement, elle a l'impression désagréable de suffoquer, Alexis. Le pied qui shoote dans une canette vide, elle ère sans but là où son corps veut bien la mener. Elle a du mal à comprendre pourquoi en ce moment tout est beaucoup trop compliqué, son esprit est complètement embrouillé et elle ne sait plus quoi penser de tout ce qui peut bien se passer. Alors au lieu de penser et de faire semblant d'afficher aux yeux chaleureux des sourires factices elle marche, elle marche le plus loin possible mais ne fuit pas si vite non plus. Alexis ne se sent pas la force de faire quoique ce soit, aujourd'hui, alors finalement elle voit l'arrêt de bus pour Central Town au loin et elle se dit qu'elle va juste s'asseoir sur le banc et attendre que le temps passe.

Sur le coup ça lui semble être une bonne idée, et puis comme elle n'en a pas d'autre elle se contente d'avancer tranquillement jusqu'au mobilier. Un soupir sur le chemin, qui s'arrête net lorsqu'elle s'aperçoit qu'elle ne sera pas toute seule, visiblement. À cet arrêt de bus c'est ta silhouette bien assise qu'elle remarque, et à peine un sourire qui étire ses lèvres quand elle s'approche encore.

« Noah.. Salut. »

C'est pas très enjoué mais ça reste poli et c'est bien étrange cette sensation qui s'empare d'elle dès qu'elle t'aperçois. Elle ne saurait pas l'expliquer, de toute façon elle ne prend pas le temps de s'y intéresser.

« Tu m'fais une place ? »

Histoire de laisser reposer ses jambes, à défaut de reposer son âme.

@noah di scipio ❖ avril

J'ASSISTE À MON PROPRE ENTERREMENT

La journée avait plutôt mal commencée.
Ce matin même, Noah avait reçu un colis de son père ― sa position sociale se révélant bien pratique afin d'en recevoir en cours d'année ― ainsi qu'une lettre.
Dans le colis, rien de très important : des vêtements, encore et toujours des cravates.
La raison pour laquelle l'empereur se sentait d'humeur morose aujourd'hui, c'était le contenu de la lettre.
Le Don, son père, s'impatientait d'apprendre les résultats de Noah concernant son enquête sur les O'Cesair.
Enquête qui s'était jusqu'alors révélée bien moins fructueuse que ce qu'il aurait bien voulu laisser entendre.
Certes il était parvenu à atteindre une partie de la psychologie de Laëstiel, notamment éveiller un agacement plutôt profond, mais il n'en savait encore que trop peu pour aborder le sujet avec lui.
D'une certaine manière, Noah redoutait de devoir répondre à cette lettre, car on ne faisait pas attendre Giovanni Di Scipio.

Assis à l'arrêt de bus, il déposait de nouveau son regard sur la lettre, l'air ailleurs.
C'est à ce moment là qu'intervint une étudiante de l'académie, déjà connue par l'empereur.
Alexis Pressman était ce qu'il considérait comme l'un des sujets de son royaume.
Une sans-étoile à la force de caractère aussi développée que sa force brute, une personne qu'il avait déjà assujetti à son hypnose afin d'asseoir son influence sur elle.
Pourtant elle n'affichait aujourd'hui aucune joie de vivre et ce manque d'énergie n'était pas pour rassurer le monarque.
Que pouvait-il bien faire d'un soldat qui n'avait même pas la force de lever son arme ?
En bon dirigeant, il était donc de son devoir de panser ses plaies.
Et peut-être que cela serait l'occasion de s’introduire à nouveau dans son esprit.
Noah lui répondait d'un sourire éclatant, froissant la lettre pour la remettre dans la poche intérieure de sa veste.

― Alexis Pressman. Quel plaisir de vous voir aujourd'hui. Je vous en prie, installez vous.

Le souverain s'écartait un instant, pour lui laisser l'espace suffisant afin de s'installer à ses côtés.
Un regard insistant, il détaillait son visage d'un air curieux.

― Vous m'avez l'air préoccupée. Seriez-vous encline à me faire part de ce qui vous tracasse ?

Une grimace à ses lèvres. Légère et un poil embarrassée, peut-être aussi un peu désespérée car elle se change en un début d'esquisse amusée. Ou dépitée, à voir.

« Encore avec ça ? J'suis pas si vieille, à peine plus que toi, songe-t-elle en prenant place sur le banc, tu c'est bien aussi. »

Elle préfère, c'est moins gênant.
Malgré ça, tu sais, elle est presque sûre que tu continueras à n'en faire qu'à ta tête. Alors elle finira par laisser passer encore une fois, elle l'oubliera même pendant un moment puis elle te le redemandera lors d'une prochaine rencontre, d'arrêter. Elle insiste pas trop parce que t'es gentil, c'est assez bizarre pour elle -totalement nouveau elle s'y habituera sans doute jamais. D'habitude les gens sont un poil plus direct et ça lui convient totalement puisqu'elle est pareille tandis qu'avec toi elle sait jamais comment réagir. Parfois elle a presque envie de t'appeler monseigneur et de te faire la révérence avec un sourire ironique, mais plutôt crever que de s'abaisser ainsi devant quelqu'un.

« En vrai j'en sais rien. »

D'ailleurs elle sait pas non plus pourquoi avec toi elle parvient toujours à tout déballer presque sans jamais s'énerver. Trop bizarre.. Mais pas si désagréable cette impression d'avoir une épaule sur laquelle se reposer.

« C'est trop le bordel j'sais plus trop où j'en suis mais-
Eh. Noah. »

Le regard qui vient chercher le tien tranquillement, Alexis arrête les confessions comme ça lui arrive parfois. Des sursauts soudains, des questions qu'elle se pose et des sujets qu'elle saute pour esquiver l'indescriptible sentiment qui la prend lors de ces instants.

« T'es comme ça parce que tu t'fais du soucis ou juste par politesse ? »

Est-ce bien réel ou n'est-ce qu'un rêve ?

@noah di scipio ❖ avril

J'ASSISTE À MON PROPRE ENTERREMENT

Elle aussi, s'embêtait du protocole.
De son avis à ce sujet, Noah n'en avait cure.
Il appliquerait à la lettre l'éducation qu'il avait suivi jusque là et qui l'avait emmené aussi loin.
S'entraîner à être un politicien était important.
Pas besoin d'être clean ou agréable, ils suffisaient de leur faire croire que c'était le cas.
Une campagne qu'il avait déjà engagé auprès de Alexis et qu'il avait, jusqu'ici, rondement mené.
Elle avait pour lui une forme de confiance presque tendre, si elle n'eut pas été en partie le résultat de son alice.
Mais son soldat était important, comme chacun de ses pions.
Alors, lorsqu'elle se questionnait sur la sincérité de ses paroles, Noah levait les épaules d'un air décontracté avant de dire simplement.

― La politesse m'impose de vous saluer, pas de m'intéresser à votre état d'esprit.

Et c'était en parti vrai, car il s'intéressait réellement à ce qui pouvait aplatir ainsi Alexis Pressman.
Elle n'était pas connue pour être une femme particulièrement sensible, encore moins du genre à s'écraser face à l'adversité.
Peut-être devrait-il la refaçonner, elle aussi ?
Comme il l'avait fait avec Eulalie, pour la rendre plus vivante.

Son regard plongeait dans le sien, fouillait le moindre petit détail, s'infiltrait déjà dans son esprit.
Un sourire d'apparence sympathique, déjà la machination se mettait en place.

― Je m'interroge, qu'est-ce qui pourrait faire défaillir une guerrière aussi vaillante que vous ? Serais-ce une peine de cœur, à tout hasard ?

Avait-elle seulement un compagnon, d'ailleurs ?
Feindre l'ignorance et la stupidité lui apportait peut-être un meilleur capital sympathie, raison pour laquelle il se laissait aller à des hypothèses.
Et s'il se révélait perspicace, il se ferait alors passer pour quelqu'un qui s'intéresse réellement.
Le monarque croisant ses jambes et croisait les bras, le regard toujours plongé dans le sien.
Ses lèvres s'écartaient pour l’envoûter, maître chanteur.

― Croyez le ou non, je suis presque sûr de pouvoir vous venir en aide. Si c'est cela que vous recherchez, cela dit.

Il contrefait.

Tu hausses les épaules et elle les sourcils, la réponse lui paraît si évidente à présent que tu l'évoques que ça la rend perplexe. Alors il y a un coin de lèvre qui se rehausse, un léger rire qui s'échappe un peu moqueur assez habituel au final. C'est l'impression de pouvoir souffler sans soupirer qui gonfle son coeur de joie. Dans sa tête le fouillis tourne encore mais l'humeur semble s'éclaircir plus que les nuages au-dessus de vos têtes, c'est déjà ça.

« Si tu l'dis. »
C'est que ça doit être vrai.

C'est la confiance qu'elle t'offre sans être bien certaine d'avoir la tienne en retour, ce sont des choses si importantes auxquelles elle oublie de penser dès lors que ça te concerne parce que tout est vraiment si simple face à toi qu'égoïstement elle souhaite que jamais ça ne s'arrête. Alors, tu sais, elle force un peu mais finalement elle croit bien en toi sans se poser la moindre question. Peut-être qu'elle doute un peu parfois, de savoir pourquoi un mec comme toi et une fille comme elle se parlent sans effusion de sang mais très vite la réponse s'invite en chuchotant dans son esprit. Un murmure très délicat comme une caresse sur la joue sans s'apercevoir qu'il ne s'agit de rien d'autre qu'un collier autour du cou.

Elle manque un rire au mot guerrière, s'apprête à répondre quelque chose dont elle ne se souvient déjà plus tandis que ses sourcils se froncent brusquement. Plus de surprise que de mécontentement, faut dire qu'elle ne s'y attendait pas à celle là. Alors le rire étouffé plus tôt s'évade finalement un peu plus fort que prévu, son regard vient s'accrocher au tien et son index se lève pour pointer sa propre personne du doigt.

« Tu m'imagines vraiment avoir une peine de coeur ? »

C'est complètement idiot.

« Les gens sont chiants, et puis qui voudrait de moi déjà. La plupart flippent quand j'suis à 2 mètres c'est chaud tu vois. »

Puis faudrait que je veuille d'eux aussi, tant qu'à faire. Un rire à nouveau au souvenir des visages mentionnés avant qu'elle ne se détourne pour s'étirer longuement. Tendre les jambes en avant et lever les bras dans un léger couinement pour ensuite s'appuyer lâchement contre la vitre de l'abris bus. La tête contre le plexi, elle lance un regard pour le plafond avant de le tourner dans ta direction.

Tu es presque sûr de pouvoir l'aider ?
C'est bien gentil ça, Noah.

« J'ai pas b'soin d'aide. Tu l'as dis toi-même, j'suis une guerrière. »

Un instant le sourire s'étire un peu plus grand.
Puis s'efface plus doucement quand les yeux retournent au loin.

« C'est juste qu'y a des jours où ça s'embrouille c'est normal j'suis pas un robot. Mais rien d'inquiétant, ça ira mieux demain. »

Quand elle aura recommencé à nier.

« Qu'est-ce que tu fais ici sinon ? »

À un arrêt de bus, question con.

@noah di scipio ❖ avril

J'ASSISTE À MON PROPRE ENTERREMENT

C'est vrai qu'imaginer quelqu'un comme Alexis se laisser abattre par une peine de cœur semblait stupide, à la réflexion.
Mais Noah savait comme les sentiments amoureux étaient capables d'écraser toute forme de combativité chez quelqu'un, il s'en était déjà servi auparavant.
Alexis était une femme d'attitude, de prestance, elle repoussait tout le monde simplement de son regard et son air implacable.
Existait en ceci un certain charme.
L'Empereur haussait les épaules lorsqu'elle affirmait n'avoir besoin d'aucune aide, il n'était pas du genre à insister sur ces détails.
Si elle avait besoin de quelque chose, elle viendrait à lui d'elle-même, c'est comme ça que fonctionne sa relation avec ses sujets.
Accepte les doléances mais pas l'insubordination.

Venait le moment où la conversation se tournait vers lui et sa présence sous cet arrêt de bus.
Aussi stupide que cela puisse paraître, il ne savait lui-même pas vraiment ce qu'il faisait ici.
Peut-être était-il simplement en quête d'un endroit où se retrouver un peu seul, loin du tumulte et des manipulations de l'académie.
Étrangement, il lui arrivait à lui aussi de ne pas vouloir fréquenter d'autres humains.
Parfois, la couronne était pesante.

Portait la main à sa joue, grattait sa joue avec son index dans un air interrogateur.

― C'est vrai, qu'est-ce que je peux bien faire ici ? dit-il en laissant s'échapper un petit rire.

Noah croisait les bras, reprit de sa stature droite et fier.
S'exprimait avec élégance.

― Voyez-vous, chère amie, je cherchais à m'isoler un instant afin de réfléchir. Je me rends compte à quel point un arrêt de bus peut sembler être un endroit stupide pour s'adonner à ce genre d'exercice mais j'ai bien peur de voir plus souvent du monde dans ma chambre qu'à l'extérieur. Alors, me voici.

Son regard se dépose sur la demoiselle, lui offre un sourire en coin.
Quand bien même elle n'était qu'un sujet de sa cour, elle représentait pour l'empereur une forme de protection et en cela, il appréciait sa compagnie.
Suffisamment pour essayer de trouver un sujet de conversation simple, sans être en quête de manipulation.

― Parfois, je m'étonne de voir à quel point vous et vos camarades trouvez une certaine fierté à vivre dans le grenier. Pourriez-vous m'en dire plus à ce sujet ?

» empire ; Noah.
» time to dominate you ; Noah.
» dehors c'est la guerre ; Noah.
» (end) ❝ make me a believer — Noah
» ❝ les grands jeux des vainqueurs. (noah)