On se balade.
On se déplace.
On a le pied lourd.
On n'est point pressé.

Alors que tout va vite.
Alors que personne prend le temps.
Course incessante.
Course contre la montre.
On se perd nous-même.
On se perd dans notre vie qui n'est pas si compliquée.
Mais qui le devient assez vite.

Cette vie.
Ce courant sauvage.
Tu y fais face.
Alors qu'on court.
Qu'on chamboule.
Toi, tu marches.
Un pas à la fois.
Lenteur présente.
Tu ne vois pas le besoin d'accélérer le pas.
Tu es calme.
Tu es serein.
On te remarque par ta façon chancelante de te déplacer.

Parce que tu sembles toujours ailleurs.
Le regard perché.
Au ciel comme à la terre.
Tu observe toujours.
Souvent réprimandé.
Toujours dans la lune, qu'ils disaient.
Ils ne pouvaient comprendre que dans chaque chose.
Dans chaque murmure et frétillement.
Tu pouvais voir de la beauté.
Unique en son genre.
Précieuse de son existence.
Tu as l’œil qui capte tout ce qui t’entoure.

Et c'est pour cette raison que tu veux devenir photographe.
Minutieux.
Soucieux du détail.
Perfectionniste.
Si ton résultat de ne satisfait pas.
Tu recommences.
Encore et encore.
Tu veux que tout soit à sa place.
Tu ne veux que rien bouge.
Tout est bien ainsi, non?
Pourquoi changer ce qui fonctionne?
Non.
Les changements, ce n'est point accepté.

Tu y perds patience.
Tu en deviens amer.
Acide.
On a du mal à te faire changer d'avis lorsque tu es assis sur tes principes.
Tes croyances.
Tu es pourtant très ouvert d'esprit.
Mais tu n'acceptes pas que l'on dérange.
Surtout lorsqu'il s'agit de quelque chose ou quelqu'un auquel tu t'accroches.

Problème depuis l'enfance.
Marrant aux premières fois.
Moins lors des nombreuses autres.
Tu rencontreras quelques psychologues au cours de ton enfance.
Car tu es obsédé.
Maladroitement.
Lorsque quelque chose t'entre en tête.
Lorsque ton focus se plante sur quelque chose ou quelqu'un.
Cette chose, personne devient le centre de ton univers.
Et tu n'arrive point à t'en défaire.

Moment amusant parfois.
Moment embarrassant d'autres fois.
Le calvaire finit au moins toujours par passer.
Et ton classique sourire revient.
Il ne disparaît jamais longtemps.
On t'appelait l'enfer solaire lorsque tu étais enfant.
Soit par ton sourire rayonnant ou le fait que tu étais complètement blond gamin.
Qui sait.
Toi même ne t'en souvient plus.
Mais cela ne devait pas être très important.
Puisque la page fut tournée.
Liberté imposée.
Tu fais maintenant partie des bêtes libres.

Mais pour combien de temps encore?
Tu ne le sais point, mais tu as hâte de savoir.
Ce que l'on avait en réserve pour toi.

Mais tu n'y penses pas.
Maintenant, tu pouvais ouvrir la bouche.
Et dire.
Parole infinie.
Rire jusqu'aux oreilles.
Si avant on était butés par ta façon d'être.
Maintenant qu'ils n'étaient plus là.
Tu ne t'arrêtais pas.
Simple de parole.
Facile à vivre.
Le rire, sourire accroché à tes lèvres.
On dit souvent que tu déranges en classe, car tu profites.
Trop de la vie.
Trop de ce que les autres offrent.
Tu es l'épaule pour les larmes.
Et les bras pour les danses.

Mais qui sait quand tu trébucheras.
Sur quelqu'un qui te remettra les idées en tête.
Tout ce que tu pouvais espérer.
C'est que ce moment n'arrive jamais.

Encore un peu.
Et tu serais enfin serein avec toi-même.

Tu ne décideras jamais.
Qu'on t'avait dit.
On ne te laissera pas choisir.
Avaient-ils continué.
Chanson redondante.
Mélodie continuelle.
Tourne disque sautant.
On avait remplit ta tête de paroles.
De conditions et de contraintes.

Car ils ne savaient que faire cela.

Né d'un amour qui s'était voulu doux et guimauve.
L'homme tombant amoureux de la fille populaire de l'école.
Le destin avait bien fait les choses en les mettant ensemble.
Toujours sur le même chemin.
La même destinée.
Route en continue.
Toujours le même paysage.
Les mêmes gens, les mêmes arrêts.
Ils étaient de ces gens qui s'accrochent à leur routine.
Comme si leur vie en dépendait.
Et lorsqu'un petit être vint se joindre à eux.
Ajoutant une bouche, ajoutant une perturbation.

Cela ne leur plut point.

Toujours droit.
La tête haute étant une obligation.
Perfection demandée.
Si les enfants faisaient des plaisanteries.
Le petit qui se résuma de leur amour.
N'appris pas à être différent de ses parents.
Toujours.
Toujours.
Il était, devait et allait être parfait.
Il n'y avait point de place dans leur vie pour les détours.
Et les moments où leur stabilité était perturbée.
Fut lorsque la famille venait.

Grande.
Nombreux visages.
Nombreuses couleurs.
Il n'y avait que lorsque ces moments de réunion de sang.
Que le gamin pouvait enfin respirer.
Libérant sa fougue.
Sa rage, ses rires qu'il gardait bien profond.
Il chérissait chaque seconde lorsque ses cousins se retrouvaient avec lui.
Et personne n'arriverait à lui enlever cela.
Du moins, c'est ce qu'il avait cru.

Parce que l'on vint cogner un matin.
Alors qu'une tranche de pain venait de se mettre à sa bouche.
Le gamin avait tourné la tête au bruit et son père lui ordonna d'aller ouvrir.
Sans question, sans attendre.
Il s'était dirigé vers la porte qu'il ouvrit.
Et ce fut à ce moment qu'il la vit.

Cette grande dame.
Ses grands yeux étaient porteurs de chaleur.
Son mince sourire et sa blouse blanche.
Tu t'étais demandé si elle était docteur l'instant de quelques secondes.

Mais ce qui arriva par la suite te parut comme une libération plutôt qu'un châtiment.

Sans murmure.
Sans avertissement.
Un contact entre peau.
Et voilà que le dés étaient jetés.

Tu étais l'un d'eux.
Tu faisais partie de ces êtres spéciaux.
Et ta vie changea complètement la journée d'après.
Alors que tu dis au revoir à tes parents.
Sans attendre.
Sans peine.

Ils semblaient savoir ce qui se déroulait.
Alors que ton regard confus ne les fit même pas pleurer.
Ils te disent qu'ils t'attendraient.

Mais que diraient-ils.
S'ils savaient.
Que tu ne reviendrais jamais.

Libre.
Tu ouvres tes ailes.
Et tu disparais dans le ciel.

Adieu.