divine cacophonie ✐ anaël

Invité

divine cacophonie

feat anaël

Vilain diablotin, démoniaque enfant. Sourire aux lèvres, malice dans le regard, excitation à peine voilée. Il s’est réveillé tôt Amadán. Trop tôt, sans doute. Mais ça en vaut la peine. Ça en vaudra la peine. Maintenant, bientôt, dans quelques instants. Le monde va partir en couille, une fois de plus. Et ça sera de sa faute.

Qu’il se sent machiavélique, alors que le soleil n’est pas encore levé et que la chaleur quitte doucement son corps – c’est qu’il fait vachement froid dans cette chambre pourrie ; bientôt on le remerciera pour tout ce qu’il a fait pour l’académie, il n’y a pas d’autre dénouement possible. Il saute sur le plancher moisi, balance son pyjama. Il danse d’un pied sur l’autre, il se les caille. Sa tenue est vite attrapée et enfilée – pas dans les règles, tant pis. Il est prêt. Il est ready.

Cheveux chiffonnés rapidement remis en place, cornemuse attrapée. Il y fixe son amplificateur de qualité. Avec ça, les morts sauteront se réveilleront et danseront la polka en rythme avec lui. Puis, dans un silence relatif, il quitte cette chambre trop petite. Sa destination est toute trouvée, et c’est sans toquer qu’il entre, des étoiles dans les yeux.

Anaël.

S’il pouvait ériger une statue à son effigie, il le ferait mais passerait pour un fou. Enfin quelqu’un qui le comprend… c’est rafraîchissant.

Comme la météo à l’extérieur.

Il semble encore endormi. Lui ne doit faire trop de bruit pour être découvert. Son instrument de malheur est posé dans un coin, et il approche sur la pointe de ses deux petits pieds. À bonne distance, il se laisse tomber près de lui et lui attrape l’épaule.

– Mec, réveille-toi, c’est l’heure.

L’heure de faire chialer la foule. L’heure d’être tué une bonne fois pour toute par l’ensemble du personnel de l’académie, élèves y compris.

Tant pis. Ce sera une belle fin.

Pour deux petites terreurs. Parties trop tôt.

– J’ai du papier, des crayons. Ma cornemuse sautille d’impatience. On va tout défoncer. Écrivons cette chanson putain.

awful

le père noël dit que t'es pas sage
on s'en fout toi tu lui réponds « k »

on ne sait pas pourquoi, la veille au soir, entre deux quintes de toux, on s’est souvenu de la chanson du vieux. on s’est couché, le fixe aux planches du grenier. et dans la tête, anaël l’entend, dans les paroles on redevient enfant.

now my grandfather was a sailor
he blew in off the water
my father was a farmer
and i, his only daughter
took up with a no good millworking man

personne pour qui la chanter, mais ce n’est pas grave. il s’est imaginé son vieux dans la chambre, sur la chaise abimée – la fois où anaël l’a projetée contre une fenêtre – il s’est imaginé que son vieux riait bien de sa gueule parce qu’avec la voix qu’il possède, anaël pourrait bien savoir chanter juste ; suffit d’un peu de pratique. et que la toux s’achève.

s’endormir sans le voir venir. une journée entière à combler le manque ; hier. il faudra remercier asmodée et anton, anton aussi, de s’être levé si tôt pour l’accompagner. n’est-ce pas.

il a oublié les couvertures, anaël sur son lit, habillé, les boucles dans le visage et la fatigue comme une ombre. ça dort bien. vraiment.

et puis ça ouvre les yeux, grand. le lit mouvant sous le geste brusque d’amadan, le corps retourné par l’amitié. anaël, d’un coup, se réveille. dévisage l’autre, observe sa chambre. une main dans le visage pour se secouer tandis qu’amadan tranche l’atmosphère de sa voix.

du papier, des crayons.

anaël fixe la cornemuse.

qu’est-ce que j’fous dans ta relation avec micheline ?

sourire. fait craquer son cou, s’étire
retire le t-shirt de la veille.
tousse.

encore un peu. puis rajoute

don’t know which one (ne se souvient plus d’en avoir discuté) mais wait, ça peut starte comme ça :

let’s go kiddo
grab tha’ santa claus
mute his hoho
n’ nuke his house.

sait pas ce qu’il raconte, bon matin, anaël.
mais il rit un peu, parce que c’est bon que tu sois là amadan.
les délires lui changeront les idées. oublier la chanson de son vieux. il tousse en se levant.

~

oliver sykes

Invité

divine cacophonie.

Et ses yeux brillent d’impatience. À quoi ça sert d’être aimé, apprécié ? De toute manière, tout ça n’est que mensonges. Après l’école, quand ils seront tous sortis de ce trou à rat, chacun retrouvera sa famille, construira une vie, une vraie. Oubliera les personnes qui ont été autour pendant tant d’années.

Enfin c’est ce que croit Amadán, celui qui n’a jamais vraiment connu la couleur de l’amitié, et qui fait comme s’il ne s’en plaignait pas.

C’est pas aujourd’hui que ses foutus problèmes vont connaître un dénouement heureux. Il est prêt à faire sauter la baraque.

Déjà, un bon point : Anaël ne le fout pas hors du lit avec un pied aux fesses. Il pourrait, petite brute indélicate qu’il fait, grossier individu qui réveille sans respect ceux qui dorment et sont heureux de le faire. Mais y’a quelque chose qui le motive plus que la tarte qu’il pourrait se prendre : faire chier, faire hurler.

Motivés, les deux garnements, motivés à casser les pieds.

Peut-être que c’est ça un peu qui le fait vivre, Amadán. Ce qui lui donne l’impression d’exister dans cet océan merdier dont il ne sera jamais familier.

Advienne que pourra. Le temps est venu de penser.

– Micheline, c’est de la merde comme nom, je te l’ai déjà dit.

Et il fait la moue, tire un peu la langue comme un gosse pas content. Mais un sourire ne le quitte pas. Ne le quittera que lorsqu’ils devront eux-mêmes creuser leur tombe sous les regards amusés de leurs camarades enfermés dans cet enfer scolaire.

– C’pas mal en vrai ton début mais… ça manque de « putain » et de « enfoiré ». J’peux pas chanter une belle mélodie si elle est pas vulgaire as fuck.

Il se pose, crayon en main, le bout gommé entre les lèvres. Il réfléchit, après avoir écrit les quelques idées déjà prononcées par Anaël son champion du monde des bêtises. Il réfléchit, pour le bien de l’humanité. Son cerveau carbure à plein régime.

– « Nique ta mère, j’serai ta sorcière,
ici pour t’casser c’que t’as pas
et pour tabasser ce bon vieux Santa
les cadeaux c’est dépassé
moi j’ai envie de tout faire péter
ta tête en premier. T’en penses quoi, c’est peut-être un peu hard ?

Et il rigole tout seul à ses phrases d’une vulgarité sans précédent. C’est bon de cracher son venin sur les gens. Les choquer par des mots, les choquer par des actes. Vilain petit canard qui a pas fini d’être haï.

Awful

» La cacophonie du silence. (Kièl)
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