Quelques mois après son arrivée dans l’académie pendant un entraînement… la panthère décida de se défouler un peu plus que d’ordinaire ; un élève en particulier allait en faire les frais et cela bien malgré lui.

Parce que faire dans la demi-mesure n’était pas vraiment son genre, Bagheera était particulièrement vocal et motivé ce jour-là. Fin des cours oblige, le fauve était définitivement lâché. Courant à toute allure, n’écoutant aucune consigne ; il s’amusait, purement et simplement. Excité comme une puce, il sautillait à chaque panier marqué et célébrait comme s’il venait de décrocher un titre.

Exaspérant ? Pas vraiment. Surprenant ? Plutôt deux fois qu’une ! Surtout pour ses camarades de classe et les plus grands qui avaient l’habitude de voir un personnage d’une nonchalance à faire pâlir de jalousie un paresseux. À cet instant précis, la panthère donnerait mal à la tête à un Doliprane. Mais ce qui était le plus embêtant, c’était à quel point il dominait physiquement les autres, même ceux qui étaient supposément plus grands et plus forts que lui.

La panthère usait de son alice, clairement. Ses premiers cours de maîtrise l’avaient incité à essayer de l’utiliser consciemment le plus souvent possible pendant ses séances de sport quotidiennes. Baghee étant un bourreau de travail dès que cela concernait sa condition physique n’eut pas besoin de se faire prier pour y mettre du cœur à l’ouvrage.

Il arrivait à l’utiliser consciemment sur des séquences très courtes… mais cela suffisait à son bonheur tellement son retard à rattraper était abyssal par rapport à certains. Le problème n’était pas le fait qu’il était trop agité, mais plutôt qu’il y allait un peu trop fort pour une simple séance. Et ce qui devait arriver… arriva.

Sur une contre-attaque, suite à une balle perdue par l'un de ses coéquipiers, la panthère se dit alors qu’il était temps de « marquer le coup ». Il se permit une fantaisie qui aurait pu être plutôt cool… s’il avait eu un peu de jugeote. Poursuivant l’attaquant qui pensait certainement aller marquer au calme, sans pression… il ne se rendit pas compte qu’un fauve affamé de ballon s’approchait de lui à toute berzingue.

L’individu fit un petit saut de cabri pour aller marquer tranquillement et… manque de bol, le fauve passait par là. Usant de son alice, il fit un bond phénoménal pour envoyer la balle à l’autre bout du gymnase… enfin en tout cas c’est ce qu’il croyait. Il avait un tantinet mal calculé la trajectoire de son saut et par conséquent… de la direction de son contre.

Ah ça oui, l’attaquant n’avait pas marqué. Mais la balle fusa à une vitesse affolante dans une direction que la panthère n’avait pas prévue. Et quelles étaient les chances pour qu’une tête sauvage surgisse pour se la manger en pleine poire ? Eh bien…

— Attention ! Trop tard…

Le bruit de l’impact donna presque des sueurs froides au jeune homme. Oh j’ai fait une connerie moi… une pauvre tête blonde se prit la balle de plein fouet et chuta avec fracas. Conscient de sa bêtise, la panthère se rua sur l’élève en question…

— Eh le blondinet, ça va ?! Putain j’suis désolé ! Eh, ça va ? Allo ?! Il se souvint alors du prénom de son camarade de classe : Chrome ! Ça va ?!

Mais bien évidemment qu’il allait bien ! Il était de notoriété publique qu’une balle de basket était un objet particulièrement mou après tout ! Putain dis quelque chose le blondinet, je vais me faire assassiner par le coach ! Cet altruisme…  

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Il était encore en vie visiblement. Fébrile certes, mais vivant. Dans l’immédiat, cela suffit au bonheur de la panthère qui pensait sérieusement avoir plongé un de ses camardes de classe dans le coma. Quelques secondes plus tard, qui parurent une éternité pour le fauve, Chrome se redressa tout en s’adressant à Baghee dans le même temps.

Celui-ci, un peu honteux, fut tout de même rassuré de voir que le blondinet était plus ou moins intact. Il l’aida toutefois à se relever et le guida vers un banc, afin qu’il puisse y poser son postérieur et reprendre ses esprits, lentement, mais sûrement. Point positif, le garçon avait malgré tout le sens de l’humour.

Bagheera lui, se gratta l’arrière du crâne toujours embarrassé. Il fit signe à son coach de le remplacer pour les minutes qui suivirent, afin de rester avec Chrome. Il se sentait un peu coupable… un peu trop sans doute. Après tout, il bougeait encore le gars. Le métier qui rentrait comme ils avaient l’habitude de dire dans l’ancien quartier de la panthère.

Celle-ci eut aussi un petit trait d’humour, dédramatisant la situation ainsi :

— Promis la prochaine fois ça sera parce que tu l’auras mérité ! … de l’humour à la Baghee quoi. Il reprit alors : t’as la tête dure en tout cas ! J’en connais d’autres, ça aurait été l’infirmerie direct, éventuellement le coma !

Positionnant ses saphirs sur le visage du blondinet, le garçon remarqua alors un détail sur son visage. Curieux, mais pas intrusif, il ne demanda rien. Chacun sa merde comme il avait l’habitude de dire. De plus, ce n’était pas une question à poser à un camarde qu’il connaissait à peine. Il s’était déjà enquis de son état ; pour la panthère c’était déjà beaucoup.

N’oublions pas que celle-ci n’était pas non plus réputée pour son altruisme débordant. Bien au contraire. À la fois solitaire et égoïste, il n’avait pas spécialement la sympathie des gens. Mais il avait le mérite de reconnaître ses torts et les assumer. La lâcheté ne faisait pas partie du vocabulaire du fauve.

Bagheera posa alors son popotin sur le banc, trouvant une place à côté de Chrome. Il profita de ce bref moment d’accalmie pour souffler un peu. Même s’il ne le disait pas, avoir usé de son alice avec une intensité pareille l’avait essoufflé. Il en profita pour vérifier l’état de son camarade :

— Ça va aller t’es sûr hein ? Je veux pas faire mon connard, mais une balle de basket en pleine gueule c’est pas la même qu’une balle en mousse. Surtout quand c’est moi qui l’envoie valser… je peux être un danger public quand je m’y mets, je ne maîtrise pas spécialement mon alice en plus. Bref, c’est pas comme-ci t’en avais quelque chose à faire après tout.

Il se souvint alors qu’il ne parlait pas spécialement avec Chrome. Il connaissait son nom, ils étaient camarades de classe. Mais cela n’allait pas spécialement au-delà. D’ailleurs, une question taraudait l’esprit du gamin :

— J’ai pas le souvenir que tu sois un grand sportif tiens. Qu’est-ce que tu fous là ?

Ça avait le mérite d’être direct. Mais pour une fois, Baghee faisait l’effort d’être curieux. Maladroit certes, mais curieux quand même.

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Baghee n’était pas spécialement doué pour lire les gens. La plupart du temps il n’en avait même rien à faire. Mais même lui ne pouvait nier l’évidence : son camarade classe était en train de morfler. La douleur se lisait sur son visage, son comportement, clairement il avait prit cher le pauvre.

La panthère était d’ailleurs étonnée, Chrome n’avait pas l’air de lui en vouloir. Bagheera avait beau le scruter sous toutes les coutures, il ne voyait pas une once d’agressivité sur le visage du blondinet. Il était tout bonnement incapable de dire si celui-ci n’allait pas sauter pour l’étranger dans la seconde, ou juste passer l’éponge et faire comme-ci cela ne s’était jamais produit.

« Je visitais juste… » Même un imbécile pouvait dire qu’il y avait anguille sous roche là. Bagheera se souvenait parfaitement que le blondinet faisait du sport parce qu’il n’avait pas le choix pendant les cours et c’était tout. Mais il ne répliqua pas pour autant. La panthère resta silencieuse et préféra écouter les questions qui suivirent.

La panthère répondit avec ses propres questions pour commencer :

— Tu fuis ? Carrément ? Ma mère a l’habitude de dire que fuir ses problèmes plutôt que de les affronter ne mène nulle part. Ton alice est si relou que ça ?

Baghee n’avait passé que quelques mois à l’académie. Il n’avait pas retenu les alices de tout le monde et n’y avait pas non plus accordé un intérêt démesuré. Ayant déjà du mal avec le sien, il n’avait pas le temps de se focaliser sur celui des autres. Néanmoins, il était curieux alors il avait tout de même posé la question.

Il en avait presque oublié celles du blondinet. Lui qui était si nonchalant d’habitude… son regard s’anima d’un coup. Il ne rêvait pas, pas vrai ? Chrome venait tout juste de lui poser une question à la fois sur son alice et sur le basket ? Il avait donc l’autorisation d’en parler ! Un grand sourire se dessina alors sur ses lèvres. La panthère se léchait les babines d’avance.

— Les deux ! Mais bon… en parler c’est bien gentil, tu ne préférerais pas que je te montre plutôt ? Tu vas voir… ça vaut le détour.

Bagheera était arrogant. Au basket, il parlait et chambrait beaucoup. En revanche, il y avait une constante chez lui : il tenait toujours ses promesses. Et il venait tout juste d’en faire une. Il trépignait d’impatience, il voulait que Chrome lui dise un simple oui… histoire de lâcher le fauve.

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La panthère, un sourire carnassier aux lèvres, se redressa d’un bond, prête à l’action. Il avait attendu le feu vert de Chrome, il l’avait. La bête était donc lâchée. Il fit d’abord quelques pas en direction des délimitations du terrain pour demander de rentrer. On acquiesça évidemment à sa requête, mais sans omettre de lui dire qu’il fallait attendre le prochain arrêt de jeu. Bagheera, vexé, gonfla ses joues et soupira de désarroi. Il dut cependant se rendre à l’évidence ; patienter n’était pas une option.

Fort heureusement, l’attente ne fut pas longue. La panthère vérifia donc que ses chaussures étaient bien lacées, avant de tourner rapidement la tête vers Chrome pour lui dire d’un ton amusé :

— Eh le blondinet. Un conseil ! Ne cligne pas des yeux.

Pourquoi disait-il cela ? Chrome n’allait pas tarder à comprendre. Tapant dans la main du joueur qu’il remplaçait pour la prochaine séquence de jeu, Bagheera, un air conquérant affiché sur le visage, avait conscience qu’il devait assurer le spectacle. Il n’était point décontenancé par cela au contraire… il ne tenait pas en place. Manque de bol, ses quatre coéquipiers et lui devaient défendre sur la prochaine séquence.

Pour la panthère, cela n’avait aucune importance, pour ses partenaires un peu plus. Les efforts fournis en défense n’étaient pas les mêmes qu’en attaque, agaçant grandement le fauve lorsqu’un adversaire coupa dans la raquette et se retrouva bien trop seul pour marquer facilement. Il n’hésita pas à donner de la voix, se fichant pas mal de la différence d’âge entre lui et les autres à et instant :

— C’est quoi cette défense, sérieux ?! Même ma grand-mère aurait pu contester un minimum le panier ! Putain… faut tout faire ici.

Personne n’osa le confronter. Pour la simple et bonne raison qu’il n’était pas en tort. Le basket était un sport qui se jouait des deux côtés du terrain. Un joueur digne de ce nom devait défendre un minimum. Ses coéquipiers, visiblement piqués au vif, changèrent un peu d’attitude, ne voulant pas que le plus jeune fut celui qui donna la leçon. Bagheera avait beau être jeune, déjà il montrait les prémices d’un semblant de leadership.

La suite ne fit que confirmer cela. Il attendit la remise en jeu pour recevoir le ballon dans ses mains, et se mit à dribler jusqu’au-delà de la ligne médiane. Il jeta un rapide coup d’œil à Chrome qui l’observait toujours et pointa le sol de son index gauche, indiquant à l’un de ses partenaires de lui faire un écran afin de se dégager de son défenseur direct. En attendant, il se mit progressivement en rythme, accélérant peu à peu la vitesse de ses dribles, tout en faisant passer le ballon entre ses jambes.

Jusqu’à présent j’ai attaqué sur ma main forte… on va changer un peu la donne. La dernière fois j’ai essayé de pénétrer, ils m’attendaient tous au tournant, va falloir élargir un peu le terrain.

À la seconde où son coéquipier posa son écran, la panthère fit son mouvement. Une feinte du regard pour suggérer qu’il allait partir sur sa gauche, un crossover pour partir sur sa droite et il créa facilement le décalage, s’échappant de son adversaire. Et bien évidemment, un autre décida de lui couper immédiatement l’accès à l’intérieur ; mauvaise idée.

Le fauve fit passer le ballon dans son dos d’un drible dévastateur, puis enchaîna avec un step-back pour se créer l’espace suffisant. Il s’éleva alors pour tirer à trois points…

— Bang !

La balle transperça la ficelle du panier, le gamin avait réussi son coup. Rapidité d’exécution, aucune hésitation dans la prise de décision, les dribles incisifs pour créer le décalage suffisant, tout cela à une vitesse ahurissante… le fauve était agaçant, mais il connaissait son sujet plus que quiconque.

— Baghee tu sors !
— Hein ? Mais coach ?! J’ai fais quoi ?
— Tu sors je t’ai dit ! Laisse-les autres jouer un peu, y’en a pas que pour toi.

La panthère, vexée, se dirigea vers le banc où Chrome était assis en marmonnant des injures dont nul ne sut la teneur. Il donna un petit coup avec la semelle de son pied sur le banc puis s’excusa de cette saute d’humeur auprès du blondinet. Il s’affala ensuite dessus, soupira bruyamment, puis s’adressa à Chrome :

— J’suis sorti du terrain y’a même pas cinq minutes la putain de sa race ça me saoule. Oui… le gamin venait de la rue au cas où certains l’auraient oublié. Il reprit alors : alors, t’as trouvé ça comment ? Rapide la bête hein ? Et là encore, j’crois que j’ai utilisé mon alice juste pour le crossover ! Ça se passe tellement vite au basket que tu si tu réagis trop tard, c’est terminé. En NBA c’est encore plus flagrant ! Si le coach me fait rentrer tout à l’heure, je vais te montrer pourquoi j’ai choisi de tirer derrière la ligne à trois points plutôt que de rentrer à l’intérieur. Il donna alors un petit coup d’épaule au blondinet avant de reprendre : eh t’as vu, t’as pas eu le ballon dans la tronche cette fois, c’est une petite victoire !

Toujours le mot pour rire, il adressa un nouveau sourire amusé au blondinet. Il était fou de voir comme il en fallait peu pour le rendre heureux celui-ci…

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