cela ne fait pas si longtemps qu'eulalie et leonard ont brisé la glace (est-ce innocent de croire que c'est déjà le cas ? sûrement), ou du moins jouent à devenir amis. la question résonnant est celle de s'ils sont déjà sur la bonne voie d'une nouvelle relation saine.

leonard est déjà persuadé que non. il a l'amertume d'un garçon de seize ans face à une fille du même âge qui refuse de s'ouvrir plus que de nécessaire et de tout lui concéder dès les premiers contacts ; que ça le frustre ! que ça le frustre qu'elle se drape de silence sur sa propre vie et qu'au-delà d'être drôlement gentille, elle demeure pour l'instant parfaitement impertinente.
il fait un peu d'efforts pour se rapprocher d'elle et s'assied à ses côtés en cours dès qu'il en a l'occasion. ses yeux parcourent toujours la copie de sa nouvelle voisine donc, et il souligne de son doigt sans mépris les erreurs qu'elle peut faire dans sa prise de notes. initialement, il est question de cela dans leur relation : un peu d'aide pour mieux appréhender les cours puisque leonard enregistre tout sans difficulté aucune.
il lui a glissé dans l'oreille pendant l'heure de mathématiques si elle voulait bien l'accompagner sortir un peu après le cours, tout en restant vague sur les raisons de sa demande. une fois ledit moment d'apprentissage terminé, il se lève et attend qu'elle range ses affaires pour qu'ils commencent à sortir du bâtiment ensemble. il la mène au coin fleurie du lycée, et commence à parler, le ton presque grave et surtout un rien accusateur. je voulais qu'on reparle de ce que je te disais par sms. j'ai vraiment l'impression que tu te la joues fille mystérieuse et ça a tendance à m'agacer. tu le fais exprès ? c'est vraiment un truc de meufs ça. il veut tout savoir, tout posséder - il veut éliminer les secrets pour se sentir à son aise dans la relation.

leonard n'apprécie pas ce qui lui semble être un mensonge. leonard n'apprécie pas ne pas avoir conscience de toutes les cartes du jeu, à défaut de toutes les avoir. il doute de la sincérité d'eulalie, ses yeux se plissent pour tenter de percer la carapace - est-elle méfiante ? peut-il faire autre chose que la secouer pour qu'elle se livre à lui ? il ne sait pas vraiment encore, mais le voilà frustré par sa réponse.

il n'y a que les idiots pour prétendre n'être qu'eux-mêmes puisqu'on se colle au fur et à mesure des étiquettes. d'abord sur le front, puis sur les bras, puis sous le tee-shirt et après sur le coeur. ça finit par atteindre les amours interdites et c'est difficile de tout décoller quand on le veut. elle se défend avec la bonté de son propre coeur, avec toute la bonne volonté qu'on peut avoir quand on a (toujours) seize ans - je ne veux pas ! alors si je ne veux pas, ça n'existe pas. alors si je ne veux pas, ça ne peut pas prendre prendre place dans mon univers. au côté d'eulalie, leonard a la réconfortante sensation de se sentir intelligent sans réellement penser à mal.

pourquoi ? non mais je dis pas que c'est conscient. ça serait présomptueux de sa part, il continue de regarder eulalie et sa jouvence tout en marchant, mains dans les poches. je dis juste que tu caches des choses et que ça me soule, car je suis pas comme les autres. qu'est-ce qui s'est passé pour que tu te refermes comme une huître comme ça ? les gens disent que t'es débile ? le fait qu'il le propose montre bien qu'il l'a lui-même pensé mais leonard ne croit pas en la valeur de l'individu par l'intelligence ; non il est sincèrement persuadé que la valeur se fait dans la chasteté de l'âme et la volonté de bien faire dans le rôle attribué.
mais il n'arrive pas à voir quel est celui d'eulalie dans cette société.

mais je ne veux pas de ça entre nous. il ne veut pas de gêne liée à leurs différences et rêve secrètement de complémentarité. il apprécie toutefois ce qui ressemble à un compliment (le charisme est bien nécessaire quand on se prétend prince !) et se targue de faire cet effet à eulalie, bien qu'il le dénigre oralement. oui il ne sait pas trop ce qu'il veut et dit tout et son contraire bien facilement.

elle est jolie, eulalie. c'est tout ce qu'il se dit quand elle glisse ses cheveux délicatement, comme une poupée, derrière son oreille. il méprise doucement sa sensation d'être inintéressante car c'est son combat interne à leonard, de ne pas l'être. plus tard il devra se frayer une place dans la haute société pour, à défaut de briller d'élégance, de briller de quelque chose - alors il s'efforce de devenir intéressant et d'avoir tout le temps un tas de choses à raconter.
il s'arrête soudainement et va s'asseoir sur un banc, le montrant du bout de la main à eulalie pour qu'elle s'assoit aussi. il se met légèrement en biais vers elle pour pouvoir la regarder et affiche une mine un rien sévère, travaillée par ce qu'elle peut bien lui dire.
peut-être leonard n'est pas animé par les plus nobles sentiments, mais il a l'honneur d'être parfaitement sincère envers elle. il s'efforce de bien lui expliquer distinctement ce qu'il attend d'elle pour poursuivre cette relation. mais comment ça ? comment je peux t'intimider alors qu'on a le même âge ? ça a pas de sens ! moi je veux juste en apprendre plus sur toi et que tu arrêtes de te la jouer mijaurée, parce que c'est clairement l'impression que tu donnes à tout le monde. ça m'énerve de voir que tu es que l'ombre de toi-même, évidemment que tu es intéressante ! qu'est-ce qui te fait croire le contraire ?

entendre son prénom dans les lèvres d'autrui a toujours eu quelque chose d'infiniment satisfaisant et il ne pouvait pas se départir du fait qu'il découvrait en leonard de nouvelles sonorités, dans les lèvres d'eulalie. il le dirait lui-même, c'est drôlement intéressant de retenir comment les gens prononcent les choses et en quoi leurs inflexions et tonalités sont uniques. le leonard d'eulalie ne sera jamais celui de maximilien, et inversement. quand elle rit d'une éventualité de mariage, il s'ouvre et se détend aussi.

il retire ses airs nauséabonds pour s'armer d'un sourire franc qui vient du coeur et prendrait bien la main d'eulalie pour lui faire part de toute sa sincérité - toutefois il n'ose pas encore et ne se veut pas trop entreprenant quand elle fait déjà beaucoup d'efforts pour s'exprimer à coeur ouvert. tu sais mon alice c'est quelque chose d'en plus, j'ai beaucoup à apprendre des autres. lui-même le reconnaît que dans son savoir immense, il y a des failles créées par son ego reluisant. sans lui je serai sûrement sans étoile aussi déjà que chaque jour je risque une de mes étoiles. il rit un peu aussi pour rester détendu et la mettre en confiance. ce n'est pas réellement calculé, mais volontaire tout de même. te cache pas derrière mon nom et tout pour être timide en tout cas, sinon ça va m'énerver. il vaut même pas grand chose parce que je suis pas un des héritiers du trône. il n'a pas honte et préfère même ce fait qu'avoir les responsabilités sur le dos. tu parles déjà de mariage..? tu sais ce que c'est à la vie et à la mort ce genre de choses-là ? tu m'aimes tant que ça ? tu devrais plutôt viser mon frère si tu veux te la couler douce toute ta vie. il la taquine pour tâter le terrain et trouver les limites de leur affection, savoir jusqu'où il peut aller.

de part sa simplicité, eulalie touche une corde sensible ; est-ce que leonard manque de confiance en lui-même ? est-ce qu'il sait vraiment qui il est vraiment, dans son intimité la plus simple ?
il ne sais sûrement pas. il se construit, bousillé par une académie trop fermé et par un avenir incertain. il lâche un petit rire, leonard ne veut pas se formuler sur la théorie élaborée par sa voisine. ses yeux attrapent la verdure un peu plus loin pour ne pas avoir à la fixer sans réellement savoir quoi dire. tu as sûrement raison. parce qu'il ne veut pas se blesser en partant dans ce débat : sans son pouvoir il ne serait sûrement rien. pas reconnu, fils de personne mis à part celui de sa mère.
tout serait différent.
mais tout ça, ça résonne trop : alors il ferme sa bouche pour faire taire les échos. son regard revient vers elle quand elle parle d'amour, c'est barbant mais les filles aiment bien ça alors il peut concevoir. il sourit un peu.
c'est mignon mais c'est vrai. est-ce qu'il se mariera avec quelqu'un qui l'aime ? leonard aspire à vivre en paix et le peu qu'il puisse imaginer il espère pouvoir se marier sans amour. sans contraintes. sûrement est-ce ce qui va s'arriver avec une personne intéressée part tout autre chose - il ne le prononce pas une fois de plus, il ne veut pas froisser eulalie dans ses illusions romantiques. en vrai je te souhaite pas max il est euh... barbant. mais à défaut de te proposer en mariage on pourra danser ensemble au festival non ? il se penche un peu sans lâcher son regard.

il n'y a aucune évidence dans les sentiments humains - l'amour n'est pas une exception, sans aucun doute. avec une douceur presque indifférente il observe eulalie se mouvoir dans une gêne mesurée, il aime la délicatesse des coquelicots en floraison sur ses pommettes. il aime le fait qu'elle soit un rien mesurée dans ses gestes face à lui et qu'elle ne fait pas mine d'être de ces grandes dames qui l'insupportent tant ; il aime la fraîcheur des bourgeons tout juste éclos.

je savais pas que tu étais de ce bord.  quand elle évoque gabrielle, la boutade est facile et impertinente. il attend les réactions avec une impatience juvénile et immature. il veut voir sur ton visage danser les émotions, sans volonté de nuire. il n'a rien contre l'idée des liaisons saphiques mais ne peut s'empêcher, comme un adolescent de seize ans encore un peu ingrat, de s'en servir pour taquiner sa demoiselle.
il écoute attentivement ses craintes et se redresse sans se lever. c'est pas vraiment de ta faute, et nous on a de la chance grâce à notre prof. c'est vrai que les tech peuvent trouver une harmonie facile mais le volontariat omniprésent de la nouvelle professeur principale n'est sans aucun doute une des futures clefs de leur réussite au sein du festival. t'aurais qu'à te réconforter en te disant qu'on fera notre dernière danse ensemble. parce que ça n'a aucune valeur aux yeux de leonard, mais qu'il ne veut pas être assimilé face à un public gigantesque à l'échec de la solitude.

c'est vrai que des alices comme le tien ont plus d'intérêt sur des stands autre que ceux de ta classe. parce qu'avec eulalie, les étincelles devenaient feux d'artifice, les secrets des vérités générales et les amours de la déraison.

eulalie est la personnification de l'extrême. il y a quelque chose de terrifiant avec cela. leonard n'a rien à craindre avec son alice inoffensif puisqu'elle ne peut visiblement que le bonifier et qu'elle ne semble jamais avoir d'intentions malignes.
dangereuse mais gentille.

c'est bien pour cela qu'il lui cédera volontiers son bras, parce qu'elle est jolie et ne risque pas vraiment de faire trop d'histoires : elle ne se mue pas en vampire envahissant dès qu'on lui promet quelque chose.
du moins c'est ce qu'il déduit de ce qu'il a vu d'elle jusqu'ici - s'il se trompe il n'aura qu'à la jeter. il lâche un petit rire à la fois tendre et nerveux quand elle s'exclame face à la proposition. son éclat est touchant même pour quelqu'un d'habitude insensible aux émois des jeunes filles. bah oui. il reste assis, comme nonchalant. sauf si c'est trop de pression et qu'on t'a déjà demandé, je comprendrais hein si tu veux pas. parce qu'au-delà d'être méchant par moment, il est aussi conciliant pour refermer son étreinte autour d'elle. il guette sa réaction et s'enquiert déjà d'une réponse positive parce qu'il est certain de lui et présomptueux sur ce sujet : eulalie ne peut pas lui céder.

oui tu peux toujours venir faire un tour pour venir me voir. préciser que c'est pour lui ça lui permet de raffermir une emprise déjà omniprésente à ses yeux. il y a un constat exclusif à l'unicité de la raison, et cela lui plaît étrangement. dans les livres, les filles ont toujours un plaisir secret à la possessivité des garçons alors il pense que c'est la même chose dans la vie réelle - c'est de là qu'il tire toute sa belle science.
il se demande si cette gabrielle est un danger à ses plans et si elle risque de l'éloigner d'eulalie. il se persuade que non pour ne pas entraver sa motivation vis à vis de son nouvel intérêt.
c'est à son tour de se lever avec son sourire toujours confiant - voilà il a joué son beau tour, d'abord accusations puis tendresse - et maintenant la voilà, il espère, à moitié convaincue. il ne reste plus qu'à espérer qu'il ne se prenne pas un vent au dernier moment. et si c'est le cas, il saura que ce n'était pas la bonne.

je t'ai dit, tu prends ton temps ! ça me dérange pas vraiment, je te redemanderai le jour-même alors, sois prête. il regarde plus loin et revient sur eulalie par la suite. je pense que je t'ai dit ce que j'avais à te dire, je vais devoir y aller sinon je vais arriver en retard à mon club. il lui sourit encore et ne lui laisse pas de répit avant de commencer à s'éloigner. avant de partir il lui dit. on se parle par sms !