Reconnaître ses torts

ft. Ace S. Ackerley

☾☾ Il fait froid à l’hôpital, l’odeur n’est pas attrayante et les salles sont toutes les mêmes. C’est un lieu que tu n’apprécies pas, dans lequel tu n’as jamais envie de rester longtemps Nerissa car il a certainement vu trop de gens souffrir ou tout perdre. Oui, même dans une académie, ça ne t’étonnerait pas que certains ai eu plus qu’une simple blessure au bras. Et pourtant, t’y revoilà encore, à écouter les médecins faire leur diagnostic et les infirmières s’agiter dans les couloirs, à être assise sur un lit après une mission désastreuse. Est-ce totalement ta faute ? Non, il a aussi sa part de responsabilité. Oui, Ace n’est pas non plus tout blanc dans ce qu’il s’est passé, s’il n’était pas aussi chiant à donner des ordres comme s’il était le chef… Tu serres les dents, ton expression se durcit. Bon sang qu’il peut être énervant quand il s’y met celui-là ! Vous n’auriez pas fini ici et presque arrachés de la mission s’il n’était pas aussi…

Inspiration, expiration. T’énerver après que le mal soit fait ne changera rien, hormis te mettre encore plus en danger. En effet, tu sentais la colère bouillonner dans tes veines et ça n’était jamais bon signe. Tu inspires, tu expires plus longuement cette fois.

Ace était ton opposé niveau Alice, le sien pouvait très facilement te mettre des bâtons dans les roue et il n’a pas manqué de le faire ces dernières heures. Non, n’y repense pas Nerissa. Cela serait encore jeter de l’huile sur le feu. Attiser ta colère, remuer encore les faits n’arrangeront rien. Tu pousses un long soupir avant de te laisser tomber sur le lit. Puis tu te redresses quand le médecin te dit que tu peux partir en précisant où était ton « camarade » et sans attendre, tu sors de la pièce. Tu aimerais fuir cet endroit trop… Tu t’arrêtes quand tu passes devant une autre porte, sachant qu’il se trouve derrière. Ta pensée est vide l’espace d’une seconde, l’idée de lui exprimer clairement ta façon de penser hurle d’ouvrir la porte mais tu hésites.

Tu ne veux pas non plus causer plus de soucis et tu en as assez fait pour aujourd’hui, tu ne crois pas ? Alors tu saisis la poignée et d’un geste ferme, tu l’ouvres et tu pénètres dans la pièce en refermant derrière toi. Il est là, seul, et tu le fixes en silence pendant un trop long moment. Aller Nerissa, il faut savoir reconnaître ses torts, pas vrai ?

« … J’aurais… »
Pas dû ouvrir cette porte.
« … Pas dû faire tout ça. »
Mais t’as autant merdé que moi.
« Mais t’es allé trop loin. »
Et j’ai envie de te hurler que t’es qu’un con.

Mais tu tais tes pensées. Tu dévies ces dernières pour dire des propos plus polie mais le problème avec Ace, c’est que tu ne sais jamais comment il va réagir à l’avance. C’est l’une des rares personne en qui tu ne peux pas avoir confiance car lui, contrairement aux autres, il ne se révolte pas contre votre situation. Non, il est dans le camps opposé, voulant plaire au bourreau au lieu de lui en vouloir de ce qu’il vous fait subir.

Et ça, c’est effrayant.

Reconnaître ses torts

ft. Ace S. Ackerley

☾☾ Un serrement se fait sentir au niveau de ta poitrine. Même si tu étais en colère contre lui il y a quelques secondes, le voir ainsi n’est clairement pas un soulagement. Au vu de la nature de ton Alice, tu as beaucoup moins d’examen à passer que lui. Car ta vie n’est pas en danger à chaque fois que tu l’utilises… Enfin, quand il n’est pas là pour t’arrêter. Tu restes debout, devant son lit, à le regarder avec une expression déjà un peu plus calme que quand tu es entrée. Son état a eu pour effet de te refroidir, hurler sur un mec planté dans son lit, ce n’est pas ton genre Nerissa. Même si tu te doutes bien qu’il ne doit pas apprécier des masse sa position de faiblesse vu la façon dont il aime avoir le contrôle.

Ses paroles sont étranges, il parle de reconnaissance et de soumission, tu comprends de qui il parle avant qu’il ne crache du sang. Tu grimaces, tu oses faire quelques pas pour te mettre à côté de lui (tout en gardant une certaine distance) avant de soupirer. Approcher était une mauvaise idée, mais il n’allait pas pouvoir te faire grand-chose dans cet état. Surtout que tu as crue comprendre avant qu’il ne se mette à injurier ton Alice qu’il y avait un début d’explication ? …

« Tu te trompes. »

Tu as peur Nerissa, de te rebeller contre eux. D’agir à leur encontre. Mais cela ne voulait pas dire que tu avais besoin de leur reconnaissance. Que tu te soumettais à cause de ça. Non, si tu restes sage, c’est pour la simple raison que tu ne veux pas faire souffrir tes proches. Tu as déjà assez fait de ce côté-là.

« Je ne cherche pas leur attention. »
Pas la leur en tout cas.
« … Et tu peux parler. C’est le tien qui est pire que le mien. »

Tu parles de son pouvoir comme si c’était une plaie, plissant les yeux pour amplifier ton expression sérieuse. Oui, la glace, il n’y avait pas pire comme contre. Même Robin et l’eau pouvait moins te fatiguer que le sien. Quelque part, quelqu’un qui pouvait te contrôler n’était pas une mauvaise chose, car si jamais les choses dérapaient, il pouvait limiter les dégâts. Mais le souci avec Ace, c’est que son Alice détruisait ses chances d’avoir une longue vie après être sortit d’ici.

« … Tu penses avoir besoin de leur reconnaissance pour exister ? »

Tu réfléchis à ce qu’il a dit, tu essaies de reconstituer le puzzle qu’il était car s’il expliquait ses motivations, ça permettrait ensuite peut-être à le raisonner. Qu’il ne devrait pas leur être reconnaissant d’être dans un lit d’hôpital. Oui, tu en es partie responsable, mais s’il n’y avait pas eu cette mission au préalable, il ne serait rien arrivé.

Non, rien du tout.

Reconnaître ses torts

ft. Ace S. Ackerley

☾☾ Sa remarque sur ton Alice t’atteints plus que tu le ne montres. Tu ne sais pas s’il a volontairement voulu te toucher en disant ça mais ton cœur se resserre un peu plus en te remémorant ce qui est arrivé ce jour-là. Restant muette, tu ne dis rien de plus sur ce sujet parce que oui, ne pas pouvoir toucher des gens sans leur faire de mal, c’était horrible. Détournant les yeux, tu te concentres sur ce qu’il dit après pour ne pas y penser, pour ne pas te faire hanter par ces souvenirs trop lourds à porter.

Sa situation n’était pas à envier, c’était l’enfant de trop. Celui qui ne manquerait à personne. Cependant, il n’a pas répondu à ta question, il donne une explication sur ce qu’il a vécu et qui fait qu’il est ainsi mais c’est un peu vague. Tu fronces les sourcils quand il parle d’être major, d’avoir une meilleure vie possible et tu peux presque comprendre cette idée. Le souci, c’est qu’elle te paraît trop égoïste. Vivre une belle vie alors que les autres souffrent… Non, tu ne pourrais pas te complaire dans le luxe alors que certains se battent pour cette injustice.

Tu fais un non de la tête à sa dernière question.

« Je n’ai aucune fierté dans ce que je fais. Je dois mentir sur ces missions, sur ces blessures que j’ai sinon je risque de plus grandes séquelles. On risque nos vies, alors qu’on est que des adolescents… Alors non. Je ne cherche pas leur fierté, leur reconnaissance ou leur attention. Parce qu’on est que des pions qu’ils utilisent jusqu’à épuisement. »

On n’envoie pas des personnes à laquelle on tient risquer leurs vies ainsi. On ne les menaces pas non plus. Ni eux, leurs proches.

« … Ces adultes ne sont-ils pas tous des monstres à nous faire subir ça ? À nous imposer cette tyrannie, cette menace permanente de nous faire souffrir si l’on fait une chose de travers ? »

Tu ne pensais pas arriver à converser avec lui de cette façon, mais son avis sur le sujet devenait important parce que sa vision des choses n’était pas la même. Est-ce qu’il pensait que c’était normal ? Ou bien parce qu’il a été ainsi rejeté, son empathie a aussi diminuée ?

« Regarde toi Ace… Ton Alice est dangereux déjà pour toi-même. Est-ce qu’une personne qui tiendrait à toi t’obligerait à l’utiliser sans penser aux conséquences ? »

Ou bien est-ce qu’il se fichait de lui-même au point ne pas se soucier de sa santé mais plus de son besoin d’attention ?

Reconnaître ses torts

ft. Ace S. Ackerley

☾☾ Non. Le pion conscient d’en être un peut tirer la situation à son avantage d’une manière ou d’une autre. Il peut aussi simplement continuer à être le pion et accepter ce qui lui arrive. Ici, à l’académie, on découvre très vite qu’on n’a pas le choix. Que la graine de rébellion est très vite arrachée, que ces idées sont punies et que l’obéissance est ce qui permet de vivre correctement. Ceux qui jouent le pion et qui se bandent les yeux sont récompensées selon le niveau de comédie qu’ils ont, major pour les meilleurs et les plus égoïste. Sans étoiles pour ceux qui veulent arracher ce voile à la figure. Et enfin, il y a des gens comme toi, qui ne savent pas quoi faire. Qui ne veulent plus jouer le pion, mais qui ont peur de lever les yeux. Sa remarque te laisse pensive, tu ne sais pas quoi répondre. Tu restes silencieuse.

Si tu as décidée de subir ta vie, c’est qu’elle ne vaut pas la peine d’être vécue.
« Alors dis-moi, qu’est-ce que vivre dans un endroit où la liberté n’est qu’une illusion ? Obéir et fermer les yeux sur ce qui arrive, c’est pas un peu hypocrite comme existence ? »

Oui. Tu subis ta vie Nerissa. Tu aurais aimée ne jamais avoir cet Alice. Ou d’avoir brûlé ton ami à cette époque. Tu aurais aimée que tout se passe autrement que de devoir vivre entre quatre murs sans voir tes parents, ou bien à subir ces missions. Tu relèves ton regard, tu le plantes dans celui de ton interlocuteur. Lui, il a besoin de reconnaissance. Il dépend des autres d’une certaine façon pour se sentir vivant, au point de vouloir la fierté de ces personnes qui vous envoie à votre mort. En quoi est-ce vivre ça aussi ? …

Ses prochains mots te laissent pantoise Nerissa. Venant de lui, tu ne t’attendais pas à ce genre de discours. Lui, qui est toujours aux pieds du professeur, qui cherche sans cesse à vouloir prouver qu’il est là. Qu’il te sorte ainsi que vous pouviez changer ça de l’intérieur… Tu ne sais pas si tu dois le croire.

« … Qui est-ce que tu essais de convaincre en disant ça, Ace ? »

Son regard est trop éteint pour qu’il puisse croire un seul mot de ce qu’il vient de dire. Ce genre de discours se prononce quand l’espoir est là, qu’il anime les yeux, qu’un sourire vaillant se dessine. Parce qu’on veut y croire, encore et encore, que ça va arriver. Que demain, vous vous lèverez et que ce cauchemar sera fini. Que vous pourrez vivre normalement, sans subir de coup ou sans avoir constamment peur de ce qu’il se passe.

« C’est étonnant que tu dises ça, ce n’est pas toi qui cherche leur reconnaissance ? Vouloir tout changer de l’intérieur, cela ne gâcherait pas tes chances d’obtenir leur faveur ? »

Tu le questionnes, tu ne sais plus vraiment dans quel camp le mettre. Tu te méfies encore Nerissa, même si ta vigilance commence à baisser. Tu te rappelles alors d’une chose qui pourtant, a son importance. Il a dit être sans famille, mais il a bien une sœur dans l’académie non ? Il a été rejeté, mais est-ce que c’est son cas à elle ? … Trop de réflexion, ça ne te regarde pas tout ça. Cependant, avoir des réponses à tout ça pourrait expliquer son comportement non ? Non… Pas encore. Plus tard peut-être.

« Non, nous ne sommes pas des monstres. Avoir un Alice… Ne fais pas de nous des monstres. »

Non, les monstres, ce sont eux. Ils vous traitent ainsi pour que vous deveniez des monstres. Mais il suffisait de se dire que vous en étiez pas pour ne pas en être un... Pas vrai ?

Reconnaître ses torts

ft. Ace S. Ackerley

☾☾ Son argumentation te raviverait presque une flamme que tu pensais perdue, cette étincelle d’espoir avec laquelle tu te bats pour la garder allumée. Cette rage que tu contrôles en ayant l’impression que c’est peine perdue, ce désespoir que tu repousses tant bien que mal parfois dans ces moments de doute où cette interrogation te ronge la moelle. Cette question simple qui pourtant, possède cette audace de te faire douter face à cette injustice subite ou visible tous les jours. Est-ce qu’on a une chance contre eux ? La réponse semble évidente quand tu regardes Ace, elle s’impose dans ton esprit mais pas dans la manière dont on peut penser. Non, elle est présente, elle entretient ce flambeau qui menace trop souvent de s’éteindre.

N’abandonne pas.

Tu ouvres ta bouche mais tu la refermes ensuite quand il fait signe qu’il en a assez de parler de ça. L’expression adoucie, tu le regardes simplement avec un sourire beaucoup plus chaleureux. Il t’a fait prendre conscience d’une chose Nerissa. Laisser tomber est une solution de facilité. Celle qui ne résoudra rien, ou bien temporairement. Lui aussi se battait avec une autre idée en tête mais toujours avec le même objectif.

« … Je t’ai mal jugé Ace. »

Un murmure, une caresse à l’oreille tant ta voix semble calme, tu rigoles doucement ensuite comme si au final, c’était évident. Peut-être qu’il ment au final, qu’il essai de tous vous faire plier face à l’ordre de cette école mais… Sa manière de voir les choses semble correcte. Être plus puissant pour avoir une voix, pour avoir enfin la chance de hurler et d’être écouté. Oui, c’est presque… Censé. Tu soupires en passant une main dans tes cheveux, tu n’avais pas remarquée à quel point ta situation avait été désespérée face à l’hésitation, à ces questionnements qui te trottent la tête en permanence. Devenir plus forte pour leur tenir tête… Oui. Tu pourrais protéger tes proches et peut-être même pouvoir agir…

« Tu devrais te ménager…»
Sinon tu mourras avant d’avoir eu la chance de te faire entendre.
« … Pour ton propre bien. »

Tu continues de lui sourire avant de lui attraper un mouchoir posé sur le meuble le plus proche et de lui donner. Son Alice le détruit peu à peu, mais il n’a pas l’air d’avoir peur de l’utiliser pour autant, contrairement à toi qui le fuit au risque de blesser quelqu’un. Tu devrais peut-être prendre exemple sur lui, ou au moins réfléchir un peu plus à ses paroles.

Juste histoire que tu arrêtes définitivement d’hésiter sur quoi faire.

Reconnaître ses torts

ft. Ace S. Ackerley

☾☾ Tu ne t’attendais pas à ce qu’il te demande de rester Nerissa, encore moins avec cette petite formule de politesse à la fin. Il est du genre à donner des ordres, pas à implorer les gens avec ce genre de phrase. Sa main glacée te retient et tes prunelles fixent les siennes pendant quelques secondes avant que tu ne répondes.

« D’accord. »

Sa remarque juste avant t’avais fait sourire d’ailleurs, oui tu n’es pas du genre mère poule, bien au contraire tu ne veux pas t’attacher justement au risque de blesser tes proches. Ce n’était pas de la pitié, mais de la bienveillance.

« Tu es mon camarade de classe Ace. Ce n’est pas de la pitié. Et je ne suis pas une mère poule. »

Tu fronces les sourcils, tu devrais peut-être partir avant de t’attacher à son cas et de t’inquiéter de savoir s’il risque encore de finir dans le même état à chaque prochaine mission qu’il recevra. Est-ce que ses amis… Non, est-ce qu’il a des amis qui eux aussi, ont la même ligne de pensée que toi ? Qui ont envie de le protéger pour ne pas qu’il se brise encore plus à chaque fois ?

« Je dis ça pour toi et ça partait d’une bonne intention… Après oui, tu es grand, tu fais ce que tu veux. »

Tu hausses les épaules, l’air faussement désintéressé. Tu ne peux pas ne pas réagir, ne pas éprouver de l’inquiétude à voir ainsi une personne que tu connais. Tu es peut-être trop gentille, cela te causera ta perte un jour. Cela fait maintenant si longtemps que tu es là… Tu as été l’une des premières de ta génération à être arrivée dans cette classe dangereuse et imaginer qu’ils puissent disparaître à cause de vos missions, de leur Alice ou encore à cause des professeurs eux-mêmes… Non. Tu ne peux pas laisser passer ça.

« La prochaine fois, on fera attention. »

Parce qu’il y en aura une, forcément. Ce n’était pas la première fois que vous alliez en mission ensemble et ça ne sera pas la dernière. Vous aviez encore quelques années à vivre ici, à souffrir et à encaisser ce système immonde. Et cet espoir que tout change devenait plus concrets à chaque personne qui souhaitait la même chose.