Des mots des mots, qui s'enchaînent, encore et encore, bienveillants, enthousiastes, qui s'entrechoquent entre les ragots et les on-dit. Les événements du festival résonnent encore entre les murs malgré les journées qui s'accumulent, et les souvenirs de ceux qui ont tout vu, les parents, la panique, le rouge des flammes, reste comme un mauvais rêve, flou et désagréable dont on ne saurait se détacher. Et parmi tout cela, son ovation, l'apogée d'une vie scolaire, le rang major, l'étoile la plus brillante, la plus noble, le sommet, enfin.

Et Fiona se sent vide.

Vide le matin entre ses draps de satin, dans l'écho du silence. Elle a envie d'en combler le vide, de dire à Ginger de rappliquer encore une fois avec une bouteille bon marcher pour entendre son sarcasme désinvolte.

Et on lui donne des sourires, des compliments, des tapes dans le dos, bienveillantes ou intéressées, sincères ou calculatrices, et elle répond toujours, avec le même sourire, parle de son honneur (introuvé) et de son bonheur (introuvable).

Elle rit et elle rit et vraiment elle aimerait qu'ils se taisent.

Qu'ils arrêtent de parler de cette médaille qui ne fait que lui rappeler son impuissance et ses doutes. Elle avait été droite et fière, quand elle annonçait sa détermination, sa résolution de protéger les enfants de cette prison esseulée; et ses lèvres avaient gelées devant l'arrivée des visiteurs inopportuns. Incapable de faire son propre jugement, suivant Orion simplement, incapable de réellement protéger qui que ce soit, faisant simplement de son mieux, et son mieux ce n'était pas grand chose, une larme dans le déluge.

Et maintenant?

Et maintenant rien, on continue, à faire semblant, à espérer, à faire des efforts qui ne mènent plus à rien.
Est-ce qu'elle est un modèle au moins?
Est-ce qu'elle aide quelqu'un, à être là, au sommet des tréfonds de l'humanité?

Juste au cas où, il faut sauver les apparences.
Alors sauvons les apparences.

Et quand la fin de la journée sonne et que la masse d'élèves se dissout peu à peu, au gré de leurs distractions et projets, et qu'il ne reste plus qu'elle et celui qui connaît déjà sa mélancolie, elle se laisse glisser le long d'un mur jusqu'au sol, et pour la première fois depuis des jours, aligne ses mots et ses pensées.

▬ On se sent encore bien seul au sommet, tu sais.

Il n'y a ni rédemption ni gloire ici, rien que les morceaux brisés d'une enfance qui refuse de se recoller.