make me a believer

La vie de Noah dans cette académie était bien moins luxueuse que ce qu'il avait connu lors de son enfance dans la résidence familiale.
S'il avait toujours le bonheur de bénéficier des services d'une femme de ménage, lui épargnant les corvées basiques, il se rappelait avec nostalgie de tous ses domestiques.
Mais il était ici en mission et son père tenait absolument à ce qu'il apprenne à se débrouiller sans l'influence familiale, quand bien même il lui était impossible de s'en détacher complètement.
Il restait malgré tout le fils du président de la république d'Italie.
L'empereur avait beau être satisfait de son niveau social et l'influence qu'il avait su obtenir sur les élèves de l'académie Alice au fil des ans, que ce soit à l'aide de son alice ou bien de sa sagacité, demeurait ce petit jeu auquel il s'était adonné : unifier les outsiders afin de faire chuter les major.
Et récupérer la place de l'un d'entre eux, si le sort se voulait favorable.
Noah considérait cet objectif plus comme un passe-temps, ce qu'il désirait absolument détruire était avant tout les autres clubs de sport.
Mais s'il parvenait à faire chuter des majors, le club de volley ne serait certainement pas un problème.

Au centre de ses machinations se trouvait une fille à l'apparence innocente mais aux capacités dévastatrices pour qui savait l'utiliser correctement.
Amplifier le pouvoir d'un alice ou bien totalement l'annuler.
S'il n'aurait pas troqué son hypnose contre les capacités de Eulalie, elle faisait une combinaison très intéressante pour lui.
Le monarque avait donc décidé d'en faire une arme dont il se réservait l'utilisation, l'élément central de sa gloire.
Pourquoi pas se l'accaparer même une fois avoir quitté cette académie ?
Après tout s'il y avait bien un bagage qu'il ne saurait refuser, c'était cette jeune fille suffisamment crédule pour lui offrir toute sa confiance.
Comme le hasard savait correctement faire les choses, c'est d'ailleurs elle qui réclamait d'être en sa présence ce soir.
Un problème d'isolation, compréhensible vu l'endroit dans lequel elle habitait en raison de son rang.
Le monarque s'amusait des sans-étoiles, considérant ce rang si insultant que les abonnés au grenier témoignaient finalement d'une force de caractère respectable pour s’accommoder de ce traitement.
Et le souverain accédait à sa requête, car il savait se montrer bon avec les sujets loyaux.

Eulalie respectait ses consignes, elle frappait à la porte deux fois et attendait sagement quelques secondes avant de rentrer.
Noah n'avait pas quitté son bureau et faisait tourner sa chaise pour regarder dans sa direction, sans pour autant se lever.

― Ne sois pas stupide, Eulalie. Commence par t'asseoir, tu vas me donner l'impression d'être un hôte exécrable.

Lorsqu'elle prit place dans l'un des fauteuils à disposition, le roi croisait les jambes, s'accoudait sur sa chaise et déposait sa joue contre son poing.
Il fixait la jeune femme, d'un air suffisamment supérieur pour témoigner de sa grandeur sans pour autant l'écraser.
Noah n'avait que douceur pour cette fille qui s'était soumise depuis bien longtemps à son emprise.
Peut-être l'avait-il suffisamment assujetti à son hypnose pour en faire ce qu'il avait toujours voulu pour elle ?
Après tout, il était en parti responsable de la perte de toutes ses étoiles.
En parti, car il n'avait fait que lui souffler quelques mots.
La suite avait fondé la légende d'Eulalie.
Dans un sens, peut-être était-elle même plus connue que lui.

Cette pensée le fit sourire.

― Des cauchemars ? Dis m'en plus. Je ne suis pas sûr d'être un parfait thérapeute, mais je pourrais peut-être t'aider à chasser les mauvaises pensées.

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Lors des explications de la jeune blonde, l'empereur maintenait son regard autoritaire, même si maquillé d'un doux sourire.
Le monarque riait intérieurement face à l'idée selon laquelle il n'utiliserait pas souvent son alice d'hypnose sur elle.
Ce n'était pas de la naïveté de sa part, simplement que son alice était suffisamment subtil pour lui permettre d'effacer ou non ses traces.
Eulalie était malheureusement bien trop douce et bienveillante pour lutter contre le serpent impérial.
Il en faisait sa marionnette, son trésor le plus précieux.
Cela devait rester ainsi.
C'est malgré tout avec sincérité qu'il souhaitait effacer ses pensées moroses.
Noah usait de la mobilité de sa chaise de bureau pour s'approcher d'elle, jusqu'à lui faire face.
Son visage se voulait apaisant, ses intentions manipulatrices.
Était à nouveau venu l'heure d'une séance de thérapie qu'il saurait tourner à son avantage.
Toute la force de son emprise et de sa malice se trouvait dans un fait très simple : il ne forçait pas l'hypnose sur elle, elle était demandeur.

― Ma pauvre Eulalie, les regrets peuvent parfois noyer les bonnes intentions. Ne t'en fais pas. Je suis là. dit-il alors qu'il approchait sa main de son oreille, après avoir dessiné une tendre caresse contre sa joue. Obéis.

Simultanément à la prononciation de ce mot, Noah claquait des doigts pour la plonger dans un état de transe hypnotique causée par son alice.
Sa tête retombait sur le côté mais il l'attrapait avec douceur, pour empêcher le moindre geste brusque.
Le monarque se penchait sur l'esclave de ses paroles, murmurait à son oreille un remède empoisonné.

― Tu as très envie que je t'aide à chasser tes démons, alors tu utilises ton alice d'amplification sur moi pour me rendre tout puissant. sans qu'il eut besoin de se répéter, il se sentait gorgé d'une force toute nouvelle.

L'hypnose plus intense encore.
Les paroles d'un d'empereur.

― La peur et le regret ne t'empêchent plus de dormir, tu es forte et bienveillante. Le doute n'as plus d'emprise sur toi. Tu sais que ton alice n'a pour autre vocation qu'aider les autres, cela est une conviction profonde. Les gens mauvais ne peuvent s'attirer tes faveurs, tu écoutes ton instinct. Ton instinct te dicte que l'unique moyen d'utiliser correctement ton alice est d'en faire profiter Noah. Il est la lumière au bout du tunnel, le seul à pouvoir t'offrir ce que tu désires. Tu crois en lui. Il est le seul à pouvoir t'aider. Tu veux lui faire plaisir. Et pour lui faire plaisir, tu vas aller mieux.

Une fois ses consignes données, Noah attendait quelques instants afin qu'elles se gravent dans son inconscient.
Elles étaient précisent, ressembleraient à des idées, des convictions.
Et elles chasseraient la peur, pour un certain temps.
Jusqu'à ce qu'elle vienne à nouveau demander l'aide de son seigneur.
Il claquait de nouveau des doigts, pour briser l'état de transe hypnotique et la laisser reprendre connaissance.

― Tout va bien, Eulalie.

Tout va bien.

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Noah écoutait les paroles de la demoiselle et pourtant, il avait l'impression d'avoir déjà entendu ça des centaines de fois.
Il se savait astucieux, habile pour trouver les mots de son hypnose.
Bien sûr qu'elle irait mieux, au moins le temps qu'il décidera être bénéfique à ses affaires.
Pour l'instant il lui souriait, simplement, comme s'il était rassuré.
L'empereur avait besoin de sa douceur, de son apparente bienveillance pour en faire l'acier duquel il forgera les armes de son royaume.
Eulalie savait se révéler utile et nul doute que suite à cette séance elle saurait se montrer reconnaissante.
De toute façon il ne lui avait pas vraiment laissé le choix, n'est-ce pas ?
Elle demandait toutefois à rester en la présence du monarque, comme si cette hypnose pouvait générer une forme de dépendance envers lui.

Ce n'était pas désagréable mais il n'avait nullement prévu de passer plus de temps que raison avec elle, particulièrement à une heure aussi avancée de la nuit.
Il devait diriger l'entraînement de basket de demain et convoquer Ariel afin de discuter stratégie et plan d'attaque.
Noah plongeait son regard dans le sien, l'air sévère, pour finalement adoucir son visage et déposer une main sur le haut de sa tête.

― Bien sûr, veilles simplement à ne pas faire de bruit.

Contre toute attente et malgré son emploi du temps chargé, il accédait à sa requête.
Eulalie était bien trop importante pour risquer de la frustrer ou éveiller le moindre malaise en sa présence.
Elle devait lui faire complètement confiance et pour cela, des sacrifices étaient nécessaires.
Noah profiterait bien suffisamment de sa dévotion plus tard.
Au moins elle demandait et ne réclamait pas, c'était le signe qu'elle savait à qui elle s'adressait.

Le souverain s'écartait, s'avançait dans sa chambre, l'air de réfléchir.
S'il devait rester en sa présence plus longtemps, autant la mettre à contribution, n'est-ce pas ?

― Eulalie, dis moi, quelle est la position des habitants du grenier envers l'académie et les NOVA ? Quels sont les acteurs importants de votre communauté ?

Désireux d'en savoir plus sur ce qu'il comptait s'accaparer.

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Eulalie lui offrait toutes les informations qu'il avait demandé, sans même poser la moindre question.
Aucune prélude, la valse des prénoms s’entamait et si le monarque faisait l'effort d'en retenir la plupart, il se devait d'avouer que certains noms lui étaient déjà familiers.
Asmodée lui faisait esquisser un sourire, ce garçon avait une rage si pure et sincère du système de l'académie qu'il en était facilement manipulable.
Sasha non plus, ne lui était pas complètement inconnu.
Notamment car il avait tendance à se trouver là où Noah laissait traîner ses yeux ― notamment autour de Eulalie ou de Ace ― mais aussi car son alice avait la fâcheuse tendance de réagir à sa présence.
Quelque chose de plutôt embêtant, lorsqu'on essayait d'interpréter un rôle.
Peut-être la pire chose qu'il pouvait arriver à un politicien mal intentionné.

Lorsqu'elle évoquait les événements de janvier, Noah affichait une grimace de déplaisir.
Ce n'était pas seulement un événement qui avait profondément bouleversé l'équilibre interne à l'école, c'était aussi la première tentative d'évasion qu'Eulalie avait effectuée hors de son contrôle.
En ce jour, il avait bien cru la perdre pour de bon.
Raison pour laquelle il s'était lui aussi habilement faufilé hors de l'enceinte de l'académie, à sa recherche, son alice facilitant ses interactions avec les militaires à ce moment là.
Si c'était là sa première trahison, il s’assurait depuis que cela ne se reproduise plus.
De toute façon l'école s'était débarrassée du passage, il n'avait donc plus rien à craindre à ce sujet.

Mais la demoiselle ne s'arrêtait pas là, l'assaillait désormais des questions qu'il aurait préféré éviter.
Non pas car il avait honte d'avoir refusé l'invitation des NOVA ― cette décision lui semblait parfaitement logique ― mais tout simplement car il connaissait suffisamment Eulalie pour savoir que son sens de la justice risquerait de l'éloigner de lui.

― Ils m'ont proposés, évidemment. Me concernant, ce n'est pas une histoire de rébellion. Je ne prête simplement pas allégeance. Et j'admire ceux qui s'opposent à un système.

Car ils deviennent instrument de la discorde sur laquelle il comptait bâtir son empire, à l'académie.
Un simple jeu.
Le véritable champ de bataille, pour lui, ça serait à l'extérieur.
L'empereur s'approchait de Eulalie, le plus froid qu'à l'accoutumé.
Levait la jambe pour s'appuyer entre ses jambes sur le fauteuil dans lequel elle était assise.
Se penchait dans sa direction, juste devant son visage, le regard accusateur.

― D'ailleurs, parlons en, des événements de janvier. Je t'avais cherché à ce moment là, tu sais ? Quand tu t'es échappée, sans moi.

Une acidité qui n'était, cette fois-ci, pas simulé.

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Eulalie tentait de justifier son acte et à vrai dire, elle n'avait pas complètement tort.
Elle avait bien raison de saisir une chance aussi inouïe que celle d'un passage secret, pourquoi devrait-elle se priver de quoi que ce soit pour un homme qui n'avait pour seule considération sa domination sur les autres membres de son espèce ?
Mais lui laisser croire que son geste avait une quelconque cohérence serait accepter de perdre son contrôle sur elle, chose qu'il ne pouvait cautionner.
Les excuses de la demoiselle étaient sincères mais laissaient le monarque de marbre.
Imperturbable, il lui faisait l'honneur d'écouter sans l'interrompre, conscient que rien de ce qu'elle ne pourrait dire n'aurait la moindre influence.
Noah ne lui demandait pas des explications.
Il lui demandait la servitude.

En guise de réponse, il attrapait sa mâchoire dans le creux de sa main, relevait sa tête pour mieux la dominer d'un regard froid et souverain.
On ne lisait dans son regard que des attentes, une mise en garde si elle venait à le décevoir une nouvelle fois.
Fuir cette école, ça revenait à le fuir lui.
Et il se ferait un malin plaisir à écraser chacune de ses tentatives pour continuer à la garder, proche de lui.
Ne saurait lui octroyer quelconque affection sincère, car il ne ressentait simplement pas ces sentiments.
N'importait pour le monarque que son règne et la place qu'elle avait à jouer dans son plan.
Les états d'âme de Eulalie n'avaient pas d'influence, pas leur place.

― Pas d'autre choix, hein.

La poigne ne se resserrait pas, il était parfaitement en contrôle.
Pas suffisamment pour lui faire mal, mais elle ne pouvait vraisemblablement pas échapper à son regard.
Il la surplombait, l'air sévère.
Finalement, son visage s'adoucit à l'aide d'un sourire faussement attendrit.
Relâchait quelque peu sa prise sur sa mâchoire pour déplacer son pouce sur ses lèvres.
Ne quittait pas son regard dominant car voilà ce qu'il attendait d'elle : sa soumission.
A la couronne de Noah.
Parce qu'elle voulait lui faire plaisir, n'est-ce pas ?

― Ça n'est pas grave, n'en parlons plus. Je suis sûr que ça ne risque pas de se reproduire, n'est-ce pas Eulalie ? Tu ne veux pas me faire de peine.

Avait-elle seulement le choix ?

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Pour sa plus grande satisfaction, elle pliait.
Face à son regard, ses mots, ses ordres dissimulés derrière des sourires.
Noah s'écartait d'elle, reprenait sa place à son bureau, le message était bien passé.
Eulalie continuerait de jouer dans la paume de sa main aussi longtemps qu'il le désirerait et c'est ce à quoi il la destinait, ce à quoi il la conditionnait.
Une vie de servitude, suffisamment tendre pour qu'elle ne s'en rende même pas compte.
L'objectif n'était pas de l'humilier, loin de là, mais la faire sienne de la seule manière qu'il connaissait.
Son regard voyageait sur les feuilles entassées sur son bureau, principalement ses cours de politique qu'il essayait d'appliquer à ce qu'il mettrait en oeuvre une fois à la tête de son pays.
Bien entendu, elle aurait une place dans son empire, si elle était capable de tenir la cadence qu'il lui impose.
Quelque chose lui dit qu'elle s'y tiendrait.

Une nouvelle demande de sa part, celle de pouvoir passer le restant de la vie dans le fauteuil.
L'empereur déposait son attention sur elle, intrigué.
Au moins, elle n'avait pas de problème d’ego pour lui demander ce genre de chose.
Noah se fendait d'un rire amusé, agitait vaguement sa main de manière circulaire pour accompagner sa parole.

― Si c'est ce que tu veux, pourquoi pas ?

Il était même plutôt séduit à l'idée qu'un de ses sujets accepte de dormir dans ces conditions, même si cela devait malgré tout être bien plus confortable que ce que l'on retrouve au grenier.
Inspectait Eulalie du regard, cherchait en elle toujours plus de satisfaction à la voir obéissante.
Noah avait des projets pour elle, des projets qu'il tenait secret.
Mais il saurait exploiter son alice à son avantage, peu importe la situation.
Pour cela, sa présence était nécessaire.
Se tournait de nouveau à son bureau, attrapait une feuille entre ses doigts pour la faire basculer de bas en haut lors d'un état de réflexion.

Le festival se rapprochait et avec lui des opportunités.
Il saurait en tirer avantage.

― J'ai  hâte de t'observer, au festival. Je suis sûr que cet événement nous réserve de nombreuses surprises.

Après tout, cette académie regorge de secrets.

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