Il observait cet immondice à poil remuer fièrement sa queue, la gueule bavante et le regard mouillé.

Arthur le regardait tourner en rond les yeux vides, puis s'agiter d'un coup, dans un soubresaut soudain lorsque quelque chose attirait son attention ; Il se dispersait dans une candeur fatigante comme si le monde recelait de trésors.

N'importe qui aurait été heureux d'avoir un tel chien. Il était grand, racé, ses parents avaient gagné des concours. Son père avait payé une fortune pour un tel pedigree.

Mais Arthur détestait son chien. Il le détestait si fort que dès qu'il le voyait il sentait ses joues rougir et ses tempes enfler. Une jalousie profonde le prenait en amenant dans sa bouche, un goût d’écœurement. Arthur ne comprenait pas pourquoi cette maudite bête était le récipient de toute l'affection de son père. Un homme habituellement froid et négligeant qui montrait un tout autre visage avec Buster.

Il se sentait moins que rien à voir sa place dérobé par un simple animal qui bouffait joyeusement ses excréments ! quelle plaie !

Et déjà, l'abus et la négligence de son père laissait leurs marques profondes dans sa psyché. Quelque chose de brûlant le labourait ; des velléités intenses qui n'avaient rien de saines le tiraillait ; Arthur n'avait que sept ans mais sa carence en amour le faisait grandir tordu. Il n'avait jamais eu le coeur bon et voila qu'il pourrissait déjà. Sous son masque d'enfant parfait il développait un tempérament d'enfant terrible pour compenser l'absence d'un père qui ne l'aimait pas.

Tout l'amour, toute l'admiration qu'il ne trouvait pas chez lui, il la forcerait chez les autres. Quittes à leur arracher. Et peut-être qu'un jour son père verrait.

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Il y eut cette soirée de Juillet. Arthur était jeune il ne s'en souvient pas ; il n'y a que des bribes mais ce qui reste lui fend le coeur en deux. Sa mère pleurait, protestait à s'en arracher les cheveux. Son père lui s'en foutait. Il l'amena à un voiture comme s'il traitait d'un affaire professionnelle ; il serra la main d'un homme et posa la main sur son épaule.

Et lorsqu'Arthur avait tourné la tête pour les voir une dernière fois à travers la vitre arrière, son père s'était déjà retourné.