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TROIS ÉTOILES Messages : 151 Classe : E.

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cassandre & xanadu

Des poèmes gravés sur le cœur et aucun mot qui ne traversait ses lèvres, Cassie abattue depuis des heures n'avait pas la moindre idée de ce qu'elle faisait là. Les pensées annihilées il ne restait qu'un désert amer de certitudes sans nom et de souvenirs sans visage, il n'y avait plus que la conviction profonde et absurde qu'elle devait être là pour une raison.

Des poèmes à l'encre noire dans le fond de ses pupilles trop larges. Cassie les yeux au travers des vitres étroites se demandait si les nuages étaient d'elle ou de Cassidy. Cassie le souffle court était restée là deux heures entières, errante dans un couloir sans vraiment savoir l'importance capitale qui la figeait là.

Puis Xanadu dans une marée nouvelle qui sortait de la classe. Cassie se réveillait tout à coup en plantant ses yeux sur son corps à lui ; son cœur s'avança, trébucha, se planta devant lui sans savoir quoi dire.

« Hé, hey, eh. »

En apnée, ses cils battaient plus vite que d'habitude, l'usure se dessina sur son visage déjà fatigué de se battre pour reconstituer les raisons qui faisaient qu'elle l'attendait, alors que même son prénom lui semblait être un puzzle.

« Xa... »

Un sourire au creux des joues, elle ne sait plus - elle lui tend une feuille de papier où des mots sont couchés ; des mots qui lui ont été adressés pendant une insomnie où les cauchemars s'étaient mêlés à des souvenirs, tout ça disloqué. Il y avait des brides d'eux dans un poème sur ce papier froissé où l'encre noire avait coulé.

« Désolée, je suis sûre que je dois te donner ça. »

Le cœur fit un raté, et l'angoisse la gagna ; chaque détail avait des allures de déjà-vu ; même le poème elle n'est pas sûre que ce soit sa main qui l'ait écrit, mais la voilà à lui tendre des niaiseries sans savoir même ce qu'il y est écrit.

Des horreurs, des tendresses peut-être ; des mots de Cassie en tous cas ; mais des mots perdus très loin dans une nuit dont elle ne se rappelle qu'à moitié - même pas.

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les espoirs volent au gré du vent Au creux de mes mains, érodé par le temps
et ton lendemain
disparaît dans le sang
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à se mêler trop souvent au flux vivant - le flos d'élèves incessant - ce sont des lierres rouges de sentiments qui viennent pousser dans les charniers du cœur de Xanadu - il les sent,
les fils rouges de l'attachement affectionnent les sols meubles du cœur, c'est du terreau sombre et riche. paraîtrait que c'est toujours plus fertile là où il y a eu des effusions de sang. mais on ne saura pas
on ne saura jamais
il ne veut pas savoir quelle couleur pourront prendre les roses, on n'attendra pas aussi longtemps.

le vert tendre des jeunes pousses lui suffit. elles sont curieuses à tendre vers les ciels gris de Xanadu, assoiffées de photosynthèse et persuadées qu'on trouvera de quoi grandir. les hivers ont tous une fin où qu'on soit alors
alors c'est peut-être pour ça que la revoilà. au détour des corridors et des couloirs, toujours elle revient - pourquoi
pourquoi est-ce qu'elle s'efforce à vouloir s'épanouir sur des strates de mort - Cassandre débordante de vie garde donc cette énergie
pour d'autres.

trois points de suspensions, suivent les esquisses que tu fais de lui. ta présence dissonante tout à coup.

vas-y laisse-tomber pour le blase t'façon je le trouve lourd aussi,"Xa" c'est très bien. tu veux quoi.

si c'est ta mémoire il ne l'a pas.

tu lui tends des écrits vous n'en avez rédigés aucun encore, à peine quelques uns d'un calme plat. alors donne,
donne donc les petits mots
la prose doit souffrir de lacune il en est certain lorsqu'il tend la main. le faux innocent coupable,
d'avoir saccagé des jardins.

Cassandre tu y trébuches, Xanadu les foule prudemment désormais. toutes les corolles arrachées et réduites en charpie sont sous tes pieds à l'abri des racines. cachées loin des regards hors des mémoires, rien que dans la sienne, c'est déjà trop. dissimuler d'avantage et ça serait flagrant. car au dessus des champs il y a des ombres qui planent - celle de ton frère, menaçante (il redoute les représailles) (s'il savait)
et puis
sa propre rancœur envers lui-même, trop faible pour oser s'attaquer une énième fois à cette plante de Cassandre trop persistante.

la dernière fois c'était
vraiment la dernière fois pour un moment
au dernier souffle du dernier été
à la naissance de votre automne - tu te souviens ?
à partir de là on n'avait rien gommé.

et Xanadu se fige face aux feuilles volantes, livide. la douceur sordide c'est à son tour de perdre l'équilibre sur les racines - que font-elles là sur le papier - il avait pourtant tout arraché ! si loin sous la surface c'est possible ? il les froisse entre ses doigts - bien sûr que non

c'est quoi - c'est toi qu'a écrit ça ? ... j'vois pas bien, de quoi ça parle.

ça parle
ça hurle des réminiscences de venin craché pour que tu lui foutes la paix, d'épaules saisies pour repousser, tenir à distance tes sourires, leur souhaiter de mourir, et puis, et puis
des supplications plus tendre d'y faire attention Cassandre fais attention à toi c'est précieux ce que tu offres à cœur ouvert trop de gens se servent et il se souvient avoir voulu y changer quelque chose parfois.
comment
comment ça a pu échouer sur le papier - dans tes pensées.

mortifère
les sourcils se froncent à peine malgré lui et Xanadu lève un regard hostile par accident -
comme devant quelque chose qu'on était pourtant sûr d'avoir tué pour de bon.

c'est chaud Cassandre, pourquoi tu m'files ça ? t'es pas bien ?

et l'inquiétude sonne comme un
t'es folle ou quoi ?

détraquée.

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cassandre & xanadu

Cassie avait le souffle court ; le poème muet bataillait au bord de ses lèvres. Quelques esquisses de sourire s'étaient peintes sur ses joues roses où quelques paillettes - résidus d'un maquillage de la veille - y luisaient de couleurs arc-en-ciel. Un rire en apnée s'étouffa dans sa gorge sans jamais vraiment se déclarer, comme absurde, insensé.

« Xa n'a de doux que dans le nom, pas vrai ? »

Ses mots glissaient sans s'attacher à aucune pensée tangible. Les circuits que suivait sa logique s'étaient évanouis ; disloqués car semés de trop de fossés ; d'incohérences. Un peu trop de pages blanches et de mots effacés, Cassie s'était faite auteure des mémoires d'une amnésique.

« Je... »

Ne sais pas ce que je dis, Xa - qu'est-ce que c'est que ça pour un nom, même ?

« Qui es-tu ? »

Cassie se fichait bien de la réponse : il pouvait dire Xa ou peu importe, ce n'était pas cette question qu'elle voulait poser; mais elle avait parlé avec la conviction qu'il avait entendu la supplication qui soufflait comme une maladie dans son asphyxie.

Elle pointa du doigt la feuille de papier.

« Ça, là. »

Elle avait relu ses mots, certaine de les avoir écrits, mais n'avait compris aucun des enjeux qui s'y étaient débattus. Et pourquoi Xa méritait ces mots-là ? Quels sentiments avaient hanté son sommeil ? Était-ce une déclaration d'amour ? Pourquoi aurait-elle fait ça ? Elle ne l'aimait pas ! pas plus qu'un autre en tous cas.

« Ce sont des souvenirs. »

Ou des cauchemars ?
On est qui ?
Je ne te connais pas si bien que mon ancienne moi.
Je ne te connais pas si bien que tout ce qui est écrit.

« Vrai ou pas ? »

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des spectres d'elle qui hantent depuis des lustres on n'avait pas voulu les entendre, leur ombre surplombant Xanadu qui ne sait plus se tenir droit à force de ployer sous les mémoires arrachées. on croit se délester mais ça ne fait que peser plus lourd encore -
lorsqu'on a les preuves sous les yeux l'énumération file le vertige,
des kilomètres de listes, on a fait couler tellement d'encre
à faire rouler des perles sur les joues porcelaine.

qui es-tu Xa, Xanadu, et Cassandre qui est-elle ? existe-t-elle, vraiment ? dans tes synapses rongées de mauvais sang il se persuade du contraire mais là
là devant lui il ne peut pas, incapable d'affirmer au petit morceau de chagrins raturés qu'on l'a privé de concret.
Cassandre en vrai, le vrai il est si laid, et toi si débordante tu ne devrais pas t'embarrasser des absences
mais Xanadu ne peut plus
ne veut plus te mentir

vrai.

surgit l'aveu il perce toute la brume dans laquelle on aurait voulu disparaître. déglutir pour ravaler la bile noire c'est inutile, il le voit, sent au plus profond de lui des dissonances immenses, désarçonné par Cassandre discordante, comment,
comment corriger - il le faut.

enfin pas tout à fait.

et Xanadu ferme fort les yeux une seconde comme pour faire disparaître les images qui remontent à la surface, craignant que tu puisses les lire directement sur ses iris, secoue la tête pour chasser, chasser loin les clichés ratés, polarisé par la crasse qu'il peut être.
déni

non c'est pas des souvenirs c'en est plus tu peux m'croire, en quelque sorte ça a jamais eu lieu, ça existe nulle part.

mais lorsqu'il rouvre les paupières c'est toujours là bien écrit noir sur blanc, ce qu'il est et refuse d'être, ce qui le pousse à disparaître systématiquement
et les doigts froissent le papier tout à coup.

c'était sensé exister nulle part, je comprends pas. j'vois pas ce que ça fout là.

ah ce serait simple, trop simple si l'on pouvait réduire à l'inexistence rien qu'en serrant les souvenirs dans les poings comme il le fait là tout de suite, comme il l'a fait avec toi Cassandre il recommence, encore une fois alors que ça ne fonctionnera pas
cette fois on ne se volatilisera pas si facilement et pourtant Xanadu s'acharne
déchire devant toi le papier blanc taché de victoires comme de défaites.

c'est juste des mauvais rêves alors oublie ça Cassandre, j't'assure que ça a aucune importance, même moi -
même moi j'm'en souviens plus.

je ne veux pas
m'en rappeler Cassandre, pitié
efface-moi.

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cassandre & xanadu

Il y avait des mensonges qui se déclinaient en proses sur les lèvres de Xanadu, et puis dans ses yeux qui mordaient le vide. Et Cassandre, dans tout l'amour qui l'habitait, avait choisi d'y croire, même si elle n'y croyait pas. Ce n'était pas vrai ? Très bien, elle voulait bien accepter la nouvelle réalité qu'il lui offrait. Car s'il estimait que c'était celle-là la meilleure version de l'histoire, elle voulait lui faire confiance. Si c'était celle-là dans laquelle ils pouvaient être heureux, elle voulait bien lui donner une chance.

« D'accord, je te crois, alors. »

A l'aveugle elle avançait, seulement guidée par la silhouette vague de "Xa" qui lui disait d'aller tout droit. Mais s'il avait du effacer une fois, c'est qu'il avait échoué quelque part, et s'il avait échoué un jour, qu'est-ce qui l'empêchait d'échouer demain ?

Cassandre n'avait pas peur. Elle avançait dans le noir.
Tant qu'à la fin elle pouvait le rejoindre.

« Mais mon cœur se souvient, parfois. »

Elle avait un peu honte, et ses yeux avaient dégringolé jusqu'au plus bas. Elle ne pouvait pas le regarder alors qu'elle disait ça. C'était comme avouer des sentiments à un inconnu dans la rue.

« Ça serre très fort quand je lis "Xa", et j'ignore pourquoi. Alors dis-moi, juste une fois... »

Quelques sanglots obstruaient sa gorge sans jamais se déclarer pourtant.

« Si tout ça n'existe plus, c'est parce que tu ne m'aimais pas ? »

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aussi facile que ça de réécrire
si on avait su on n'aurait peut-être pas réduit cruellement en cendre.
sans scrupule Xanadu, tu l'absous malgré tout des fautes commises, Cassandre
s'il avait su
que ce serait au prix de tes œillades égarées. c'est pire
pire encore que d'y voir de la colère ou du reproche
et c'est si petit ici
ça manque de train dans lequel sauter pour partir loin, on a trouvé que ça
Xanadu n'a trouvé que ça pour corriger les itinéraires empruntés avec toi. et on n'a tranché les liens qu'au creux des synapses - il a
oublié lui aussi
de s'occuper de ceux du cœur.

la preuve sous les yeux qu'on peut parfois avoir les gens dans la peau.

la flippe,
terreur intestine qui remue les entrailles c'était tapi et endormi jusqu'à ce que tu dises
je me souviens
de Xa qui tient la mémoire en charpie entre ses doigts, c'était inutile de déchirer les phrases couchées sur le papier elles n'ont toujours pas quitté ton esprit, pas tout à fait encore
des morceaux de code qui font tourner des logiciels fantômes en arrière-plan, Cassandre glitchée tressaille sous ses yeux.
forcé de revenir (sur ses mots)
de te revenir

ça a rien à voir Cassandre - j'ai jamais dis que j't'aimais pas.

et si on l'a dit un jour c'était sans le penser - rien que pour être Xanadu trop maladroit si bien qu'on est abrupt ou rien.
mais la contradiction reste en travers de la gorge
on craint alors d'étouffer à nouveau si l'on se risque à redevenir Xanadu - car il n'y a pas pire que lui en entier pour faire face au dévouement il voit ça comme des cages
qui menacent de se fermer lorsque ton cœur se serre.

c'est pas que je t'aimais pas, que j't'aime pas,
c'est juste
c'est beaucoup de t'aimer, rien que bien t'aimer des fois c'est lourd.

la mâchoire enserre les dents
retient à tout prix les mots, il les sent comme des fils tendus capables de tisser à nouveau des liens qu'on redoute de ne plus jamais pouvoir défaire
ça trébuche
il se doute que ça répond mal aux questions, te répondre Cassandre c'est toujours difficile,
te rassurer on se sent constamment incapable -
c'est frustrant
c'est

c'est pas important j'dis des conneries tu vois c'est pour ça que souvent j'te dis "laisse tomber", pas parce que j't'aime pas mais parce que j'sais pas parler convenablement.

on est si mal élevé Cassandre,
et systématiquement désemparé par toi qui déborde d'amour et d'émotions
tandis que Xanadu voyage toujours léger.

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Les dysfonctionnements de Cassandre n'étaient pas tous du ressort de Xanadu. En plus des souvenirs qu'il lui avait volés, il y avait tant de désirs distordus à l'intérieur d'elle-même qu'elle ne pouvait accepter la réalité comme on la lui offrait. Elle voulait toujours que toutes les réalités qui existent insistent sur le fait qu'on l'aime. Elle voulait que ça pleuve sans que ça pleure, elle voulait l'amour tout entier et tout ça qu'on lui donnerait.

Alors Cassandre ne voulut rien entendre. Elle était devenue un peu amère, et au bord de ses lèvres un sourire s'était esquissé, un peu triste, mais surtout empreint d'une colère qui menaçait près des gouffres de son cœur.

« Cette Cassandre-là »

Elle pointa du doigt le papier - le poème.

« Était sûrement une imbécile de croire que tu l'aimais. »

Elle serra les dents. Le coeur lui faisait mal, et un sanglot hoqueta au fond de sa gorge. Elle ne voulait pas se mettre en colère ; elle ne voulait pas des orages, ni même de la pluie. Cassandre voulait être heureuse. Alors elle avait fait briller le soleil de rayons intenses, et elle avait souri, à en plisser le coin de ses yeux malades.

« Mais c'est pas grave. Parce que Cassandre d'aujourd'hui ne t'aime pas non plus. »

Car il n'était pas entré dans son jeu ; il ne lui avait pas donné ce qu'elle voulait ; alors son ego avait choisi de le désacraliser, de le rendre démon alors qu'il n'avait été qu'honnête. Et la tête haute, le dos droit, Cassandre s'était retournée, les mouvements crispés, la gorge obstruée, pour éviter de pleurer devant lui.

Elle pleurera plus tard, quand elle ne saura plus ce que cela voulait dire.