freddie, c'était le début de la fin pour sa mère. elle qui n'avait jamais rien eu, à vivre dans un appartement miteux dans un coin peu fréquentable de dublin tout en enchaînant les petits boulots pour se faire vivre. c'est en bossant dans un bar qu'elle a fait sa connaissance.
il buvait beaucoup, parlait peu et souriait encore moins, mais, un jour, il lui a accordé son attention. une fois. deux fois. trois fois. c'est devenu fréquent et elle s'était rempli la tête d'idées, d'un futur avec l'homme dont elle était éperdument tombée amoureuse. tellement enfoncée dans ses illusions, elle s'est persuadée qu'il allait vivre avec elle. puis, en découvrant qu'elle était enceinte, qu'ils allaient élever leur enfant ensemble.
ah.
ah ah ah.
il était veuf ; s'il cherchait du réconfort auprès d'elle, c'était juste pour surmonter la mort de sa femme, avec qui il avait déjà eu un gosse. soudainement, son petit monde tout rose venait d'exploser en mille morceaux, et elle ne voulait plus de la vie qui grandissait en elle. elle voulait qu'il disparaisse, mais coup de bol pour futur freddie, c'était trop tard pour l'avortement.
ses parents l'ont convaincue de garder le bébé. dans un élan d'égoïsme merveilleux, ils se sont dit que, peut-être, ça allait la remettre sur le droit chemin et lui faire réaliser que son train de vie de merde n'était pas bon pour elle. spoiler alert, ça non plus, ça n'a pas fonctionné. ça l'a traînée un peu plus bas dans sa déchéance, et lui avec.
freddie n'a jamais demandé à exister, encore moins dans un taudis avec une génitrice qui le regardait grandir avec un peu plus de dégoût chaque jour. l'ombre d'une femme qui ne pouvait s'empêcher de marmonner qu'il ressemblait à son père, et quand elle avait trop bu, de lui hurler dessus.
puis, quand il est devenu assez vieux, les cris se sont transformés en coups. c'est à ce moment-là que son alice s'est manifesté pour la première fois ; là où sa peau aurait dû se couvrir d'hématomes, on trouvait des traces de mains ayant la même texture que le bois de la table de la cuisine à laquelle il s'était désespérément accrochée.
il n'a rien dit, tremblant comme une feuille en face du miroir quand il avait voulu constater l'étendue des dégâts, alors qu'elle, trop ivre pour se rendre compte de quoi que ce soit, retournait à sa bouteille pour se noyer dans son contenu.
freddie, gamin forcé de grandir trop vite, à survivre plutôt que vivre, a pris ses maigres possessions et s'est enfuit sans un regard en arrière.
il a trouvé refuge auprès des sans-abris qu'il avait appris à connaître au fil des ans — à fuir l'ire de sa mère, il avait trouvé en eux plus de compassion qu'il n'en avait vu ailleurs, malgré ce que les aléas de la vie.
malheureusement, la paix n'a pas duré bien longtemps.
un gamin de dix ans qui crapahute dans les rues en compagnie de clochards en haillons sonne vite l'alarme dans l'esprit du bon samaritain du coin. encore plus quand celui-ci décide d'appeler les flics et que toute cette histoire dégénère un peu plus encore.
lors de l'examen médical, pour s'assurer qu'il allait bien ; ses maigres protestations tombant dans l'oreille d'un sourd, freddie a paniqué et son pouvoir l'a trahi, sous le regard ahuri du médecin qui n'avait définitivement pas signé pour ça.
après un petit coup de fil à l'académie, un mec en costard s'est pointé lendemain. quelques heures plus tard, des points d'interrogations dans les yeux et la peur aux tripes, il était fourgué sur la banquette arrière d'une voiture en direction de l'école.