(end) ❝ you're the king and i'm the queen of disaster

you're the king and i'm the queen of disaster

eulalie&noah

❝ the bad boy that i always dreamed of ❞

L'académie savait y faire en terme de punitions. Qu'y avait-il de mieux que le silence pour enfermer les regrets à jamais ? La méditation n'était pas ton fort Eulalie. Et pourtant tu t'y étais habituée, soumise à la même rengaine depuis des années.
Volets fermés, cernes creusés, sans lumière, sans heure et sans nouvelles.
Personne n'avait besoin de te torturer pour te châtier de tes crimes, ta seule ennemie n'était autre que toi-même.

Pas de musique, pas de sonneries, pas d'amis. Seulement une petite voix te murmurant dans un coin de ta tête : "c'est ta faute." Et elle était moqueuse, parce qu'elle en avait marre de te voir dans un sale état. N'avais-tu donc pas appris, au fil des ans ?
Les doigts griffaient les tempes et les larmes creusaient des sillons arc en ciel sur tes joues blêmes. Tu ne souffrais ni du manque de divertissement, ni du manque de nourriture. C'était le fait d'être coupée du monde entier qui te maltraitait. Tu voulais savoir comment allait Elior, Gabrielle, Robin, Agnès... Noah. Il était présent, tu t'en souviens vaguement, avant de perdre connaissance et d'être transférée à l'hôpital. On t'avait empêché de voir Elyas, oh pauvre Elyas. Que lui avais-tu fait ? Qu'avait-il fait ?

Qu'étiez-vous devenu, juste l'ombre de vous-même... esclaves de votre destin lié. Maudits depuis les premiers sourires et jusqu'aux derniers.

Les jours passaient sûrement, rythmés par les heures repas et par les cris que tu arrivais à percevoir légèrement dans le couloir du grenier. Sans soleil, le sommeil était décalé et le corps affaibli par le manque de vitamines. On te l'avait annoncé le dimanche soir pour le lundi matin : une semaine d'isolement, pour un comportement irresponsable mettant en danger la vie d'autrui. On te l'avait rappelé comme un sermon : il fallait que tu te calmes, que tu contrôles tes alices avant de provoquer une énième catastrophe. Tu te l'étais imprimé dans la tête comme un serment : c'en était fini d'aider les autres.

***

Recroquevillée dans un coin de la pièce, les genoux ramenés contre la poitrine, tu fixais la porte, envahie de pensées négatives. Tu n'avais aucune idée du jour qu'il était. Peut-être vendredi, ou samedi. Quelle heure était-il ? Impossible de deviner. Tu aurais dis 18h, il était en réalité 23. Des bruits de pas dans le hall ne t'étaient pas destinés, tu en étais certaine. Tu avais déjà mangé. L'avais-tu ? L'assiette trônait sur le vieux bureau en bois, encore pleine. Est-ce que ça datait d'hier ? Tu ouvras faiblement les paupières, aveuglée par la lumière provenant du couloir. La porte s'était ouverte.

Une grande silhouette entra, avant de la refermer.
Tes bras s'agitèrent lentement, en rythme avec tes lèvres qui emprisonnaient toujours la moindre syllabe.
Noah.
Une seule, de syllabe.
Un millier, de regrets.

i'm the king
and
you're the queen of disaster

noah & eulalie

" I am absolute, lower your head. "

Une voix chantait, dans les escaliers qui menaient au grenier.
Silhouette à la droiture imposante, l'empereur se dirigeait vers les plus hautes strates de l'académie.
Au-delà de l'étage des major, les faux rois.
Noah avait d'ailleurs dépossédé cet étage de l'un de ses habitants, à l'aide de l'un de ses pions.
En ce jour, il avait prouvé que même ceux qui se pensaient inatteignables à l'aide de l'étoile des majors pouvaient saigner.
Les droits accordés par l'académie n'avaient finalement que peu de pouvoir, d'incidence.
Le désastre du festival sportif en était la preuve.
Car sans son étoile encerclé, il n'avait finalement plus rien d'un exemple.
Plus rien d'un être puissant.
Rien de plus qu'un primate, démuni devant la toute puissance d'un pouvoir qu'il ne savait finalement pas contrôler.
Ou alors cela faisait-il parti de la mise en scène du monarque ?
Peu importe, s'il se déplaçait aujourd'hui, c'était pour féliciter les bonnes actions de l'un de ses objets.
De son arme favorite, celle capable de tout changer.
Ou peut-être était-ce simplement pour asseoir un peu plus son autorité sur elle ?

A l'aide de son alice, il avait su subtiliser la clé de l'un des surveillants afin de pénétrer dans sa chambre, au grenier.
Il ne savait que trop bien comment fonctionnait l'isolement, connaissait suffisamment d'habitants du grenier.
Savait donc que dans cette situation, il serait facile d'infiltrer l'esprit d'Eulalie avec plus d'efficacité.
Et puis, il ne fallait pas qu'elle pense qu'il eut l'espace d'un instant l'idée de l'abandonner à sa triste solitude.
C'était bien lui, le seul encore présent pour elle, n'est-ce pas ?
La porte s'ouvrait, la clé retournait dans sa poche.
Pénétrait la chambre accompagné de toute sa grandeur, son regard impérial.
Ses lèvres s'écartaient et s'entrouvraient dans un sourire satisfait, alors qu'il avançait son index pour l'inciter à se taire.
C'était à lui de parler.
Il s'approchait d'elle, s'abaissait à peine, l'emprisonner dans son ombre.
Les yeux brillaient, dominaient.
La voix était suave, les paroles faites de sucre.

« — Te voilà dans une position bien indigne de ta personne, Eulalie. Mais n'aie aucune crainte. Je suis là. »

Déposait sa main sur le haut de sa tête, caressait ses cheveux comme le ferait un roi avec son servant.
Pour la féliciter.
Elle avait fait exactement ce qu'il avait demandé.
Sa tête s'inclinait sur le côté, la douceur éclairait son visage.
Mais son regard trahissait ses intentions.
Il venait pour demander, toujours plus.

« — Est-ce que tu sais pourquoi tu es ici, ma douce ? »

Approchait son visage du sien, le souffle chaud.

« — Tu veux que l'empereur te l'explique ? »

you're the king and i'm the queen of disaster

eulalie&noah

❝ the bad boy that i always dreamed of ❞

Le regard était las, vide de toute émotion positive. S'il souriait aussi aisément, toi tu en étais incapable. Les idées néfastes avaient germé dans ton esprit pour l'idéaliser un peu plus, te sentir indigne de son amitié et de sa présence. Noah ne tirerait rien de toi - ni de tes alices - car tu ne lui apporterais que désordre et condamnation. Instabilité et damnation. S'il était ton ange tombé du ciel pour te guider en dehors du trépas, l'humanité n'avait jamais été aussi impure depuis que tu marchais dans ses pas.

Ses doigts vinrent effleurer le haut de ta tête. Tu en profitas pendant quelques secondes, en manque de contact et de douceur après tant d'heures à te morfondre dans la solitude et le silence. Comme toujours, Noah savait prouver qu'il était bien le seul à prendre des risques pour te pardonner. Ce que tu n'oserais réclamer chez personne d'autre, car tu n'estimais pas le mériter.

Ta voix était instable, étrangement rauque car il y avait bien longtemps que tu ne t'étais pas adressé à quelqu'un d'autre que toi-même.

— « Noah.. Qu'est-ce que.. Qu'est-ce que j'ai fais.. »

Tu avais tellement pleuré que tu en étais désormais incapable. Le corps n'était plus qu'une coquille vide, un trou noir qui avait aspiré toutes tes émotions pour n'en recracher qu'avidement le désespoir.
Tes yeux tentèrent de suivre les siens, impressionnés par tant de prestance. Tu secouas la tête pour réfuter, détourant le regard et t'enfonçant un peu plus contre le mur pour disparaitre.

— « Non... Arrête. Je ne veux plus rien entendre. Je suis tellement désolée Noah. Ils doivent tous me détester maintenant. »

Tu déglutis de plus bel, cachant ton visage derrière tes mains. S'il se considérait empereur, tu ne voulais pas être digne de devenir son sujet. Tu te savais malade Eulalie, désoeuvrée dans une croisade, quête de contrôle. Tu voulais te rendre à l'évidence, accepter le fait que tu ne pourrais jamais maitriser de tels pouvoirs. Ils étaient destinés à faire le mal autour d'eux, et tu ne pouvais imaginer après avoir blessé Elyas, détruire Noah.

— « Tu ne dois pas être là. Tu dois partir ! S'ils te trouvent ici ça sera toi qui subira. »

i'm the king
and
you're the queen of disaster

noah & eulalie

" I am absolute, lower your head. "

Son regard appuyé sur Eulalie, comme s'il fixait un animal blessé en pleine agonie.
Et il n'avait rien contre un animal à la patte cassée.
Mais elle devait se laisser faire, laisser Noah la guérir de ses blessures, son influence n'en serait que grandie.
Toutefois, la jeune femme semblait se complaire dans les regrets et la culpabilité.
Une culpabilité qu'il avait lui même accentué à l'aide de l'hypnose, il ne pouvait donc pas faire semblant d'en être surpris.
Ressentait malgré tout un profond dégoût pour une attitude qu'il n'arrivait pour l'instant pas à contrôler.
Elle semblait même le rejeter, dans sa panique.
Lui intimait l'ordre de partir, pour sa sécurité.
Comme si on pouvait dicter sa conduite à Noah.
Dissimulait son visage derrière ses mains, comme si elle pouvait faire disparaître son chagrin devant les yeux de l'empereur.
Pire encore, comme si elle pouvait le chasser de cette manière.

Le visage du roi se crispait, vexé dans toute sa splendeur de ne pas avoir été accueillis comme le Messie.
Accroupis, pour se mettre un peu plus à sa hauteur, il s'emparait de ses mains pour libérer son visage de sa prison et lui imposer son regard.
N'autoriserait aucune fuite, il ne s'était pas déplacé jusqu'à elle pour qu'elle essaye vainement de se débarrasser de lui.
Le regard toujours plus appuyé.
La voix sombre.

« — Eulalie, est-ce que tu penses vraiment que qui que ce soit puisse me faire subir quelque chose, dans cette école ? Tu penses que je suis comme tous les autres ? »

Relâchait ses bras, appuyait sa main contre son torse pour se désigner et paraître plus charmeur.
Le sourire était faux.
Mais le timbre de sa voix était plus doux.

« — Tu es une personne très importante pour moi, tu sais. Et ça me fait beaucoup de peine de te voir dans cet état. Tu ne veux pas me faire de peine, n'est-ce pas ? Alors tu vas m'écouter. »

Avançait sa main en direction de son visage pour déposer son index sur les lèvres de Eulalie.
Elle avait pour ordre de se taire devant sa majesté.
Descendait ses doigts pour attraper son menton, orienter son visage dans différentes directions pour en saisir toutes les nuances.

« — La raison pour laquelle tu es ici, Eulalie, c'est parce que lorsque j'ai essayé de t'aider à sauver Elyas pendant le festival sportif... Une partie de ton esprit m'a rejeté, ne me faisait pas confiance. »

Qu'elle se flagelle si elle le souhaite mais, uniquement pour servir le roi.
Et chaque situation devait se dérouler en sa faveur.

« — Si seulement tu m'avais écouté, Eulalie. »

you're the king and i'm the queen of disaster

eulalie&noah

❝ the bad boy that i always dreamed of ❞

Est-ce que tu pensais réellement qu'il était comme les autres ?
Non, il était différent, il avait raison. Vous étiez à ce moment là dans deux mondes opposés, lui dans la lumière et le succès et toi dans l'ombre de tes excès. C'était ça ton problème Eulalie, tu en faisais toujours trop. Toujours assez pour le contrarier.

— « Non... »

Il se saisit de tes bras pour les écarter de ton visage. Tes yeux avaient cherché les siens dans l'obscurité et tu t'étais mordu la joue pour ne pas avoir l'audace de répondre à nouveau. Le sourire de Noah était si doux, pourtant tu savais en cet instant que tu n'avais pas intérêt à t'imposer. Il était maitre chanteur et ta voix désaccordée.

Mais ton coeur s'emballa rapidement. Noah n'exprimait que rarement ses sentiments et sa considération à ton égard. Si tu t'étais convaincu pendant des années qu'il te rassurait la plupart du temps pour ne pas te blesser, tu étais trop faible psychologiquement pour ne pas t'accrocher au moindre espoir qu'il te balancerait ce soir. D'ailleurs, quelle heure était-il réellement ? Cette question ne resta pas longtemps en suspens dans ton esprit, car avec lui à tes côtés, le temps s'était bel et bien arrêté.

Il posa son doigt sur tes lèvres, t'incitant au silence. Tu déglutis, ayant un peu le tournis. Le manque de force te pliait à une vulnérabilité physique désagréable. Tu serais son pantin, s'il pouvait tenir les fils. Invisibles dans l'air, tu ne t'en rendrai même pas compte.

Tes yeux s'écarquillèrent de surprise, luisant dans la pénombre de la pièce. Noah avait essayé de t'aider à sauver Elyas. La culpabilité revint au galop. Tu ne pus retenir ton silence plus longtemps.

— « Tu as... quoi... ? »

La voix était encore faible Eulalie, encore tourmentée par les désirs de Noah. Tu ne l'aurais pas cru aussi bon qu'il l'était, et cela te plongeait davantage dans les remords cruels et acides de ton esprit déjà irrationnel.
La lucidité totalement aveuglée par ses bonnes paroles, tu l'avais entouré avec lenteur de tes deux bras.

— « Noah, merci. Merci d'avoir essayé d'aider Elyas. Je ne pourrais jamais te remercier. »

Tu t'abandonnas aux sanglots, le front collé à son épaule. L'empereur pouvait bien te rejeter, tu le méritais.
Comment est-ce que ton esprit avait pu te trahir ? Comment avais-tu pu faillir à la seule mission qui t'incombait ? Ton coeur ne mentait jamais et ton Alice aurait du l'écouter aveuglement.

— « Tu te souviens la dernière fois, quand je t'ai parlé de mon rêve ? Des flammes hautes, destructrices. Elles ravagent l'académie toutes les nuits depuis cinq ans. »

Ton souffle s'évapora contre sa peau, une larme s'écrasant sur le parquet poussiéreux du grenier.

— « Cela fait quatre nuit que je ne rêve que de cendres. Pardon Noah, je ne recommencerai plus. »

i'm the king
and
you're the queen of disaster

noah & eulalie

" I am absolute, lower your head. "

L'empereur se laissait entouré de ses bras, lui accordait ce privilège.
Un privilège pour lequel elle devrait le rembourser, tôt ou tard.
Alors qu'elle sanglotait contre son épaule, Noah déposait sa main à l'arrière de sa tête pour lui caresser les cheveux, d'une manière apaisante.
Qu'elle laisse parler ses émotions, qu'elle fasse de lui le héros de sa petite fable.
Son infinie douceur était fausse mais s'en souciait-elle vraiment ?
Finalement, n'était-elle pas aussi hypocrite que lui, à accepter la première main tendue pour éloigner la culpabilité ?
Le piège se refermait sur elle et le lion avait déjà commencé à dévorer sa proie.
Alors que l'une de ses larmes frappait le sol du grenier, elle prononçait exactement les mots qu'il 'attendait d'elle.
« Pardon Noah, je ne recommencerai plus »
A cette phrase, son visage se déformait d'un large sourire, jusqu'aux oreilles.
Béni les dieux pour son alice qui faisait de lui le berger divin du troupeau.

L'empereur se relevait, pour interrompre ses sanglots.
Attrapait son menton, relevait sa tête pour elle le fixe, lui offre ses larmes.
De son genou, il appuyait avec douceur sur son épaule, pour l'empêcher de se relever et de fuir son regard à nouveau à l'aide de ses mains.
Toisait de toute sa hauteur, caressait sa joue.
Par affection pour sa propriété.

« — Ne t'inquiètes pas, Eulalie. Nous pouvons bâtir quelque chose, à partir de ces cendres. Mais pour ça, tu dois me faire confiance. Je peux contrôler les flammes, faire en sorte qu'elles ne fassent de mal à personne. Mais pour cela, tu dois me faire confiance. »

Abaissait son menton pour lui faire entrouvrir la bouche, l'inciter à répondre.
Cette fois-ci, il l'autorisait à promettre.
Pas de ses mots qui n'avaient pas de goût, pas de pensée fugace.
Qu'elle obéisse à tout jamais et pour le restant de ses jours.
Elle aurait une place de choix à ses côtés mais, serait condamnée à vivre toute sa vie au bout d'une laisse.

« — Eulalie, mon amour. Est-ce que tu vas m'obéir, à partir de maintenant ? Faire ce que je demande ? »

Appuyait son regard, l'écrasait sous la pression.
L'empereur le laissait aucune échappatoir, elle devait prendre une décision et ne jamais revenir dessus.
Une fois que l'idée aurait germée dans son esprit, elle serait à tout jamais prisonnière de son alice.
Sceller cette promesse était d'une importance capitale.

« — Je veux te l'entendre dire. »

you're the king and i'm the queen of disaster

eulalie&noah

❝ the bad boy that i always dreamed of ❞

Tu avais confié tes cauchemars funestes à Noah et il avait réussi en quelques secondes à les métamorphoser en rêves. Peut-être étaient-ils utopiques, mais ils étaient suffisamment idylliques pour que tu veuilles y croire. Pour que tu puisses t'y accrocher désespérément.
Tu t'abandonnas à ses bras pour y dissimuler ta vulnérabilité, pour te confondre et te cacher derrière son instinct protecteur. Tu avais peur de la solitude Eulalie, et si tout tes amis venaient à te tourner le dos dès ta sortie, il fallait que tu en gardes un près de toi.

Noah se drapait de la cape du chevalier servant, te targuant de princesse au moment ou tu te sentais le plus déchue d'un quelconque trône. C'était avec innocence que tu le laissais s'appeler empereur car il avait la légitimité d'être le souverain du monde qu'il souhaitait.
Tu n'avais pas confiance en toi, tu n'avais pas assez d'estime pour t'élever au titre de reine. Dans son ombre, tu demeurerais heureuse.

Quand il se releva, un genou contre l'épaule pour te maintenir au sol, il t'apparaissait plus grand qu'à l'accoutumer. Le jeu des ombres sur le mur le rendait encore plus impérieux, impressionnant et intimidant. Mais c'était sans aucune peur que tu le dévisageais comme un roi. Sans aucune peur que tu l'aimais d'une adoration aveugle, sa parole comme seule loi.

— « Je te fais confiance, je ne veux plus d'accident. Si tu peux m'aider à contrôler mes alices, je te suivrai Noah. »

Tu avais étiré un sourire timide, preuve de ta bonne foi et de ta sincérité.
Mais le rictus amoureux s'étiola en une expression surprise et confuse.
Il te réclamait l'obéissance. Sa prestance t'écrasait sous une pression lourde que toi-même tu percevais comme anormale. On n'obéissait pas à ses amis, on leur est dévoué par loyauté et par affection, par amour parfois.

Tes joues se teintèrent d'un carmin de honte et d'admiration, gênée par cette position plus que dévalorisante.
Et pourtant... Ton coeur battait si fort dans ta poitrine que seule la défaite pouvait le calmer.
Il avait employé un terme que tu rêvais parfois les nuits chaudes d'en être affublée.
Mon amour.

Tu ne te dérobais pas à son châtiment, la bouche déjà offerte à toutes les sacrements.
Il était à cet instant plus qu'un monarque, il était à l'image d'un Dieu que tu voulais servir dans les heures les plus sombres, le seul que tu étais capable d'aimer peut-être pour de vrai et pas pour toi-même.

C'était dur à dire à haute voix car tu avais peur d'être ridicule.

— « Mais... » Tu avais envie de lui demander, si tu serais plus que ça si tu acceptais ? Mais le courage se faufila sous les lattes du parquet pour se terrer et observer la scène, vu d'en bas. « D'accord. Je ferai ce que tu me demandes. »

Et au fond de toi, tu avais prié pour que cela ne soit que de la charité.
Pour lui, pour toi, pour tout ceux qu'ensemble vous pourriez aider.

— « Est-ce que ça te rendra heureux ? Est-ce que moi je serais capable de te rendre heureux ? »

Et le courage avait finalement surgi ! Inespéré.

i'm the king
and
you're the queen of disaster

noah & eulalie

" I am absolute, lower your head. "

Son sourire plus large encore, on aurait presque pu imaginer une lueur rouge écarlate dans ses yeux, satisfait des déclarations.
Le jour de son couronnement avait lieu, auprès d'elle, elle lui offrait enfin ce qu'il désirait sans même avoir besoin de l'hypnotiser.
Certes il avait eu besoin d'insister pour lui arracher son serment mais peu importe, ce qui était fait deviendrait ensuite l'histoire.
Personne ne s'attarde sur les détails, après une conquête.
Comme pour la féliciter, l'empereur balayait quelques mèches de ses cheveux blonds pour éclaircir son visage, faire comme s'il s'en occupait vraiment.
Elle lui jurait fidélité et son devoir en tant que roi était d'apporter à sa servante un peu de bonheur.
Manipulation ou simple cadeau pour lui éviter de souffrir de la situation ?
Je l'ai déjà dit, personne ne s'attarde sur les détails.

Elle demandait si elle serait capable de le rendre heureux ?
Non.
Personne n'est capable de rendre heureux.
Enfermé dans sa parodie de royaume et contraint par les chaînes du pouvoir, l'empereur était finalement l'esclave de sa propre lueur et Eulalie ne saurait lui offrir cette part d'ombre nécessaire.
Le pouvait-elle ?
L'espace d'un instant, il songeait.
Si quelqu'un était capable de lui apporter le goût de la défaite, pourquoi pas elle ?
Peut-être en avait-il cruellement besoin.
Mais au fond de lui, il savait que la réponse resterait la même.
Non.

« — Est-ce que tu penses qu'il existe quelque chose que tu sois incapable d'accomplir, si tu en a vraiment la volonté ? »

Il avait prononcé ces mots avec une pointe de tendresse, presque comme s'il lui souhaitait d'y parvenir.
Mais ce n'est pas ce qu'il attendait d'elle, pour l'instant.
L’obéissance aveugle serait suffisante.
Noah retirait son genou de son épaule, comme pour la libérer d'un poids.
Tu vois comme tout est plus simple quand tu écoutes ce que je dis ?
Relâchait son menton, il dirigeait son regard vers le ciel visible depuis la "chambre" de la demoiselle.
Comme si son véritable adversaire était bien plus haut que le plus haut sommet de cette école.

« — Ce que je veux, Eulalie, c'est que mon peuple soit heureux. Et il ne pourra l'être que sous ma bannière. Tu comprends ce que je veux dire ? Tout ça, c'est pour vous. »

Pensait-il un traître mot de ce qu'il annonçait ?

you're the king and i'm the queen of disaster

eulalie&noah

❝ the bad boy that i always dreamed of ❞

Tu t'étais fourvoyé naïvement. Face à sa victoire, tu avais essuyé tes propres défaites.
La première, celle d'avoir cru avoir une chance de briller plus fort que les autres à ses yeux.
La deuxième, celle d'avoir cru être un challenge suffisant pour qu'il te place au même niveau que lui, qu'il t'estime pour ton intelligence et ta présence d'esprit.
D'un coup d'oeil, tu avais jeté un regard triste et éteint vers les livres étalés en vrac sur ton pupitre de bois. Tu étais stupide Eulalie, pas brillante et pas très belle. Rien d'intéressant dans le coeur hormis le trésor que tu cachais en son sein : tes alices, l'écharpe de miss accrochée à ton cou comme une corde raide.

Tu te souvenais d'une prédiction qu'une camarade t'avait fait au détour d'un couloir.
C'était ton choix : tes pouvoirs apporteraient bonheur et prospérité ou malheur et désolation. Cela ne tenait qu'à un choix, et celui que tu avais voulu prendre - comme un risque - ce soir là c'était de rester auprès de Noah. Fuir Samuel et te tenir loin d'Elyas. Les catastrophes ne pouvaient plus se permettre de co-exister avec ton petit bout de paradis.

Ses paroles avaient raisonnées en toi l'espace de quelques secondes, et l'adrénaline avait poussé sur tes jambes pour te relever. Les muscles étaient meurtri par l'absence de nutriments et la poitrine se bombait à chaque respiration sifflante.
Il t'avait donné l'élan.

— « J'ai l'impression que ma vie est parsemée d'échecs. » Tu n'avais pas dit ça à voix haute pour qu'il te plaigne, au contraire. « Mais j'ai toujours préféré les vivre comme des challenges. »

Tes parents te le disaient souvent : Dieu aide les hommes à sa manière mais la meilleur manière qu'il leur offrit fut le libre arbitre.
Tu étais libre Eulalie. Libre et pas encore dépourvue d'espoir. Ils pouvaient t'enfermer, te maltraiter, tu serais maitresse de tes décisions, aussi mauvaises étaient-elles.

— « Je pense que rien n'est impossible quand on y croit vraiment. »

Tu avais recouvré la foi ces dernières semaines, après l'avoir ignorée pendant des années.
Les flammes d'Elyas n'était qu'une autre preuve vivante de la malédiction qui s'abattait sur lui, sur toi, sur vous et tout ce que ça représentait.

C'est quand il énonça la voix du peuple comme sa propre voie que tu compris une bonne fois pour toutes que pour faire parti de son monde, tu devrais te contenter de la cour.
C'était déjà pas mal, pour une campagnarde.

— « Je comprends, tu as beaucoup de responsabilités... »

Tu fis quelques pas dans la pièce, faisant grincer le parquet. Les grillons chantaient, dans les feuillages non loin du toit, à la lueurs des étoiles visibles depuis votre château.

— « Parfois quand je te regarde, je me dis que ça ne doit pas être facile d'être toi, d'avoir autant d'attente dans les autres parce qu'on a autant d'attente en toi. Mais tu es gentil et ambitieux. J'espère que tu seras élu président si tu te présentes. »

Tu lui avais offert ton plus beau sourire, le plus sincère.
Et tu avais penché la tête sur le côté, caressant le bracelet rose à ton poignet - que Dmitry t'avait offert - comme pour te rassurer.

— « Je ne sais pas ce que je veux faire plus tard mais je prendrais exemple. »

i'm the king
and
you're the queen of disaster

noah & eulalie

" I am absolute, lower your head. "

Eulalie faisait preuve de sincérité dans sa bienveillance, contrairement au monarque.
Un véritable bijou, emprunt d'une innocence que Noah saurait utiliser à des fins personnelles.
Ce n'était pas vraiment un manque de respect de sa part, lorsqu'il considérait quelqu'un comme rien de plus qu'un pion sur l'échiquier.
C'était simplement la manière dont il avait apprit à vivre, la seule façon qu'il avait de témoigner de l'intérêt pour qui que ce soit.
Elle était même plutôt belle et élégante, s'il devait se limiter à son apparence physique.
Mais il devait avant tout savoir de quoi elle était capable, afin de lui apporter ce dont il a envie.
Comme tout le monde, si elle voulait une place à ses côtés, elle allait devoir le mériter.
Gagner sa place sur le trône.

Noah haussait les épaules, lorsqu'elle évoquait la difficulté des attentes qu'il portait sur ses épaules.
N'y avait pas vraiment réfléchit avant, après tout, ça n'avait jamais été autrement.
A sa naissance, il était déjà destiné à régner sur les autres.
Son peuple, son pays.
Le commun des mortels.
Pourtant, son mépris de la fausse élite le faisait lentement chuter sur un chemin qui provoquerait vraisemblablement sa perte.
Un jour il allait commettre une erreur, il en était conscient même s'il refusait d'accepter cette fatalité.
C'est peut-être même pour ça, qu'il s'entourait autant ?
Pour être sûr que lors de sa chute, elle ne soit pas fatale.
Eulalie souhaitait prendre exemple ?
Fort bien, elle aurait de quoi observer.

« — Nous n'en sommes pas encore à mon élection. J'ai encore des choses à faire ici et si j'en suis incapable dans une simple académie, je risque d'échouer dehors aussi. Ici, ce n'est rien de plus qu'un camps d'entrainement. Rien de plus... »

Le regard se perd dans le vide, l'espace d'un instant.
N'était-ce vraiment rien de plus ?
Pouvait-on véritablement résumé la complexité de cet établissement à une gigantesque cour de récréation ?
Giovanni ne l'avait certainement pas envoyé ici pour s'amuser avec des gommettes et faire des collages, il devait certainement y avoir un projet à plus long terme.
Du moins, il essayait de s'en persuader, se convaincre qu'il valait plus que ceux qui rampent dans les couloirs puants de cette parodie d'école, à la quête des privilèges qu'apportent les étoiles.
Mordait l'ongle de son pouce, visiblement agacé par l'idée même d'être lui aussi un pion sur l'échiquier de quelqu'un d'autre.
Blessure à l’ego.
Mais c'est pour ça que Eulalie existait, elle avait pour vocation de remettre les compteurs à zéro.
Certainement pourrait-il y parvenir, en sa compagnie.

« — Bien, je te laisse réfléchir à tout ça. Il ne faudrait pas que ma venue ici s'ébruite, tu comprends. Ce fut un plaisir de converser avec toi, Eulalie. Et de voir que tu sais toujours autant comment te comporter, en ma présence. »

Lui adressait de nouveau un sourire, peut-être un peu plus sincère cette fois-ci.
Après tout — et comme à son habitude — elle s'était montrée particulièrement douce avec lui, même encourageante.
Dans un silence exemplaire, Noah quittait la pièce.