Les heures passées à errer dans les salles de club vides n’avaient visiblement pas suffises à le décider.

D’aussi loin qu’il se souvienne, Aedan n’avait jamais songé à intégrer un second club. Il était un piètre artiste si l’on excluait l’écriture, domaine dans lequel il ne se considérait pas excellent mais où il avait au moins le mérite de produire quelque-chose de potable. À l’instar de la cuisine, qui était le seul travail manuel qu’il était capable de mener à bien. Seulement évoquer le sport s’apparenterait à une hérésie. Puisque Aedan ne s’était jamais intéressé à ces activités en particulier, il avait accumulé les lacunes et savait pertinemment qu’intégrer un club de sport aujourd’hui serait une très mauvaise idée : À la fois parce qu’il ne serait rien d’autre qu’un boulet pour son équipe mais aussi parce qu’il savait pertinemment qu’il s’y sentirait à la traîne.

Il y avait beaucoup de bonne volonté en son for intérieur, mais trop de réalités qui ne pouvaient définitivement pas être ignorées. Mais dans un dernier espoir de peut-être trouver quelque-chose que ne le ferait pas se sentir comme un bon à rien, Aedan s’était orienté vers la salle du club de dessin. Les murs étaient recouverts de différentes œuvres, signées par ce qu’Aedan devina être les membres du club. Les mains fourrées dans les poches de son jean, il ne resta estomaqué par le talent de certains et plus de temps prévu à détailler une par une les portraits, les paysages et tout ce que le club avait à lui offrir.

Le dessin avait toujours été quelque-chose d’intéressant à ses yeux. Il essayait de donner vie à son imagination à travers les mots, mais le visuel était bien souvent plus marquant, plus précis et plus touchant que ne pouvaient être les mots – tout du moins, c’était ce qu’il avait entendu, puisque lui n’était pas vraiment d’accord avec cette idée. Mais l’avis d’un lecteur avéré était probablement biaisé dans un tel débat.

Et le silence rendait sa petite promenade encore plus paisible, faisant presque passer cette dernière pour une visite au musée. Aedan avait déjà entendu parler des musées dans les livres et dans les films, et même si l’endroit n’avait rien des vastes espaces immaculés qu’on lui avait décrit… Il s’y sentait étrangement bien.

@Mia L. Llewellyn -

Son cœur se mit à battre la chamade, mais pas pour les bonnes raisons. Il ne s’attendait déjà pas à croiser quelqu’un en ces lieux, et encore moins un membre qui ferait partie du club dont il observait la pièce avec envie. Pas nécessairement l’envie de rejoindre le club en question mais l’envie de partager un tel talent.

Aedan, si l’on mettait de côté son Alice, n’avait jamais eu de « truc » pour le différencier des autres. Cela pouvait sembler vite dit pour quelqu’un qui était littéralement né avec un pouvoir, un don surnaturel… Mais il ne fallait pas oublier que c’était dans ce contexte-là qu’il avait grandi. Côtoyer les Alices constituait son quotidien et la raison-même de sa présence ici.

Il prit quelques secondes à jauger la nouvelle arrivante, une main posée sur sa poitrine tentant de calmer – sans utiliser son Alice – les battements de son cœur qui faisaient se soulever cette dernière plus lourdement que d’ordinaire.

Et tandis que la confusion et la peur avaient pris d’assaut son cerveau, il reprit contenance pour lui répondre, la tête légèrement inclinée sur le côté.

« O- Oui, c’est vraiment… Impressionnant, l’imagination des gens parfois, » Lui-même en avait énormément, et pourtant il était toujours aussi estomaqué par ce que certains étaient capables d’en faire. Il espérait secrètement être un jour admiré de la même manière par d’autres. « Désolé pour ma, euh, réaction. Tu m’as fichu la trouille… » Admit-il en passant une main sur sa nuque nerveusement.

Ladite Mia posa ses affaires sur l’une des tables, et Aedan ne put s’empêcher d’observer attentivement chaque outil, avec un intérêt difficilement camouflé. Il n’était pas particulièrement familier avec chacun d’entre eux, car mettant de côté les basiques tels que l’aquarelle, la tablette graphique, la peinture à l’huile ou encore le symbolique crayon à papier… Il n’y connaissait pas grand-chose.

« Aedan, » Répondit-il avec d’une voix incertaine, manifestement timide. « J- Je ne voudrais pas te déranger, tu es sûrement venue ici pour, euh, dessiner – enfin, c’est logique mais, euh, ce que je veux dire c’est que je ne voudrais pas m’imposer… »

Pourtant, Mia avait éveillé sa curiosité. Bien-sûr qu’Aedan avait des questions à lui poser, peut-être même trop. Sentant le stress lentement envahir ses épaules, il se concentra une petite seconde pour détendre les muscles de son dos par le biais de son Alice.

« Faut-il avoir, euh, un certain niveau ? Pour s’inscrire ici ? » Finit-il alors par demander, visiblement plus relaxé qu’avant. « J’ai toujours eu qu’un seul club et, je me disais, peut-être qu’il faudrait que j’apprenne à faire quelque-chose d’autre de mes dix doigts… Mais je n’ai pas envie de ternir les murs, ils sont vraiment… » Le dernier mot ne vient jamais, Aedan se contenta de lancer de brefs coups d’œil vers Mia, un sourire maladroit aux lèvres.

@Mia L. Llewellyn -