Pas besoin d'écrire de grandes histoires pour créer des grands fous, c'est un peu la définition de sa vie, l'épitaphe sur sa tombe qui résumera tout. Point ici de drames, d'abandon, de trahisons, de disgrâces, de larmes ou de sel. Parce qu'il n'y a pas besoin de tragédie pour devenir folie. Des fois, c'est juste comme ça et il n'y a pas à chercher plus loin. On a souvent voulu lui trouver des excuses à Sunshine, une raison à cette onde de choc, à cette destruction joyeuse. Des excuses, des raisons, il n'y en pas. Sunshine vous dira fièrement qu'il est tout ce qu'il y a de plus banal et normal, et pour cause :

Né sur un sol dont il n'a jamais gardé le moindre souvenir. Il se sait coréen, il se sait enfant de deux personnes qui ont les mêmes yeux que lui, les mêmes traits que lui. Seulement, s'il est là aujourd'hui, c'est que ces deux personnes ont dû foirer quelque chose en cours de route. Mort prématurée ? Abandon délibéré ? Il n'en sait rien, ne veut pas savoir, pas parce que ça le touche, juste parce qu'il s'en fout. Sunshine a deux parents, un papa, une maman, le bail classique si on omet que maman a été du même sexe que papa avant. On s'en fiche un peu, ça n'a pas trop d'importance, le passé. Sunshine ne parle pas coréen, ne sait rien des coutumes et de l'histoire propre à son sang. D'ailleurs, qu'est-ce que ça veut dire propre à son sang ? C'est un peu des conneries tout ça, non ? Sunshine a un papa, une maman, il est irlandais, comme tous les gens de sa famille et on peut bien s'en foutre du reste. Quand à ceux qui lui on dit un jour qu'il ressemblait pas à papa, Sun répond toujours "Heureusement ! T'as vu ses cheveux ? Les boucles très peu pour moi."

Papa et Maman, c'est pas des alices, ça non. Par conte, ils sont milles fois plus cool que toutes vos familles d’apprentis sorciers. Déjà, Papa, c'est un artiste, un ébéniste qui fait vos meubles Ikéas pas Ikéas parce que made Irlande. A partir d'un arbre il te pond un lit, une table, des chaises, mieux qu'un crafteur animal crossing. Puis, Papa, c'est un grand danseur aussi. Il bouge son boule comme une fan de Nicki Minaj en transe, askip c'est comme ça qu'il a séduit Maman. Maman, d'ailleurs, sa vie c'est un roman. Avant elle s'appelait Laurell, elle a jamais aimé son prénom, ni tout ce qui allait avec. Alors à 18 ans, elle a pris ses cliques et ses claques et est partie à l'aventure changer de corps, de vie, de nom, de tout en fait. Un gros doigt à son passé, un gros hug à son avenir. Ça a pas été facile, c'est une héroïne, Maman. Rencontré Papa dans un pub et paf ça a fait des Chocapics.

N'a jamais entendu les discours typiques sur la "normalité" en fait, Maman et Papa avaient coutume de dire que la normalité n'existait pas. Il y avait une infinité d'étoile et le monde était une galaxie. Ça a posé quelques soucis, parce que petit il comprenait pas vraiment les cases des autres. Puis en grandissant, il a finit par se dire que les autres étaient justes cons et que fallait bien être un grand limité pour caser les gens dans des petites boites bien pensées.

Une vie normale, il fait des randonnées, grimpe aux arbres, bouge son petit boule à couche sur les vieux vinyles de Papa, il ramène des escargots baveux à Maman qu'il planque en douce sous le lit pour en faire un élevage clandestin. Puis à huit ans, paf ! Puni à cause de l'élevage d’escargot, récidiviste il est, Maman avait prévenue que la prochaine fois ça finirait mal, comme d'habitude il n'a pas écouté. Pire dérouillé de sa vie quand en ouvrant son tiroir à sous-vêtement elle a surprit Elizabeth et Albert faire la course sur ses culottes en dentelles. Au coin, dans la chambre, porte fermée, avec obligation de réfléchir sur le pourquoi de c'était mal de laisser traîner des escargots dans les tiroirs à sous-vêtements de sa Maman. Il faisait beau dehors, l'envie de sortir, de taper dans un ballon, de monter à l'arbre et d'aller faire le guignol à se prendre pour Tarzan. Il veut sortir, il touche le mur et pouf, il sort. Papa étendait le linge dehors, il a hurlé quand le boloss à traversé le mur. Deux jours plus tard, y a des gens à la man in black qui sont venu. Deux jours plus tard, il partait à l'académie.

Ah, les premiers jours ça a pas été beau. Infernal, insupportable, à fuir en traversant les murs et les plafonds à refuser qu'on le touche ou l'approche. Petit chat moqueur qui prank les robots et fait criser les surveillants. Puis, avec le temps, au bout de quelques semaines, ça relativise, ça finit par voir l'académie comme une école pour super héro avec des gens un peu coincés de l'arrière train mais tout de même, ça s'amuse ici alors pourquoi pas. Il fait son trou, ses armes, de bonnes capacités mais l'attention d'une moule sous coque. Il rêvasse veut que la recréation dure toujours, on dit que ça va lui passer, manque de bol ça lui passe jamais. On a bien essayé de le mettre en contact avec le Psy scolaire, mais il se sent bien, vous savez, vraiment bien, après tout qu'est-ce qu'il y a de mal à s'amuser ?

Aujourd'hui 17 ans, presque 18, la majorité ça lui aspire pas grands choses, si ce n'est un léger sentiment inconfortable qu'il refuse de comprendre. A 17 ans, plus personne rigole, l'école de super héro c'est devenu l'école des coincés. Il aime pas tellement ça, ça lui laisse un sentiment un peu mitigé, bizarre, un peu celui qu'on a la veille d'une gastro. Tu sens que ça sent pas forcément bon, que ça travaille. Mais bon, on laisse le soleil briller, peut-être qu'à force de s'époumoner à rire, les autres riront aussi.