Si elle aurait été seule, elle se serait vautrer sur le premier fauteuil venu avec la grâce d’un cachalot prenant le soleil. Si elle aurait été seule, elle aurait soupiré sa vie entière en grommelant un semblant d’insulte destinée aux grands-mères. Seulement elle ne l’était pas. L’un de quelques désavantages de la vie en communauté, l’un de quelques points négatifs qu’elle trouvait à redire sur la vie à l’académie. Cette sociabilité forcée était un poids duquel il était quasi impossible de se défaire et quand vos camarades ont la faculté d’avoir une ouïe qui traverse les murs, la chambre n’était plus tellement une option. On ne savourait que rarement la joie de la solitude et des temps morts et, avec le froid ambiant et les tenues de cheerleader trop légères, Peach en aurait eue bien besoin pour se plaindre tout son soul. Souffrir pour être belle, c’était bien là la pire des conneries. Pourtant, c’était celle qu’elle commettait constamment.

Peut-être parce qu’on avait peur du jugement, d’être moins désirable, moins appréciable si on dérogeait aux standards.  Les gens se faisait parfois des images de ce que l’on était qui devenait une prison. Ils s’en faisaient encore plus quand un passé d’ordre public vous collait aux pieds. Des fois, Peach se dit qu’elle aurait bien aimé ne jamais être Gwen, ne jamais être une Martin, comme sa mère. Parfois, elle se dit qu’elle aurait bien aimé être Peach, juste Peach, juste une Marshall, comme son père.

Elle passe la porte de la salle commune et gagne le premier siège disponible, se poser un peu, quelques minutes pour se réchauffer les pieds et arrêter de regretter, comme à chaque fois, d’être la représentante d’une discipline qui a eu le bon goût de penser que se balader en mini-jupe par -4 était une bonne idée.  Elle calle sur ses oreilles sont casque, enclenche sa playlist « glee’s song » et sort de son sac le lien maléfique d’Anne Rice. Elle aime les histoires fantastiques, Peach, ça lui vient peut-être de l’univers qu’on a bâti autour d’elle à coup de magie et de sorcellerie, mais elle aime les histoires de sorcières, les ambiances mystiques de la Nouvelle-Orléans. Parfois, elle s’imagine dans les belles robes des années folles, dans les soirées chics des grandes maisons à colonnades ou dans la fièvre du carnaval. Un sourire qui prend place sur ses lèvres quand elle se replonge dans l’ambiance si particulière du monde Rowan, Stella, Marie-Beth et Carl. Marie-Beth, tien, c’est un prénom qu’elle aurait aimé porté, ça. Peach, c’est un nom quelque peu immature, qui ne fait pas honneur à tout. Elle aurait préféré son second prénom, Dorothy, si l’image de sa terrible grand-mère n’y était pas rattachée. Dorothy, c’était un prénom qu’elle aimait bien.

Tu éclates sa bulle de loin, elle ne met jamais sa musique trop forte, la lecture c’est une discipline qui lui demande une certaine concentration et le son des voix à trop fort volume l’embrouille plus qu’autre chose. Si la musique lui permettait de se couper du brouhaha du monde, elle était dosée avec précision pour respecter la délicate alchimie entre le livre et la lectrice. Elle entend tes pas, sent ta présence avant de voir tes chaussures du coin de l’œil. Si elle voit ta présence comme une intrusion, c’est ton expression qui l’a fait s’adoucir. T’as l’air aussi gênée qu’elle, bizarrement c’est quelque chose qui la touche.

« Heu, je ne suis pas très douée avec les chiffres mais à deux on va bien finir par s’en sortir. »

Fait glisser son casque de son crâne à sa nuque avant de marquer sa page.

« C’est où ton problème ? »