Ca tourne au ralenti. Un instant, tout est devenu noir. Puis blanc. Puis noir. Le monde invisible en pointillé. Des images entrecoupés. Toutes embrumées. Comme si quelqu’un avait joué avec la lumière. Comme si les echoes de ce monde là étaient devenus plus sourd encore.
Il y avait le corps comme une coquille vide. Étroite.
Il y avait ton visage.
Je crois qu’il y avait des gens.
Je crois que ça a crié fort.
Ca a parlé vite.
Et puis d’un coup. Il n’y avait plus rien de tout ça.
Disparu.
Souvenir dérobé.
Juste la chambre vide.
Comme si l’orage était passé.
Et faut croire qu’il avait emporté la carcasse avec lui.
J’ai pas réussi a savoir où elle s'était échouée.
J’ai marché.
Peut être longtemps.
J’ai croisé des visages que je n’avais jamais vu.
Tout était si étrange Liu.
Tout si semblable. Tout si différent.
Le jour, la nuit.
L'alternance qui ne veut s'arrêter.
Et un son qui se répète en boucle au loin.
J’ai essayé de trouvé des ombres familières dans les décors grisés.
Pour pouvoir m’y raccrocher un temps.
J’me suis dis que peut être, vous, vous sauriez.
Que peut être, c’était juste une mauvaise blague.
Que j’allais devoir les engueuler. Leur dire que c’est pas drôle.
Que j’ai pas envie de jouer.
Que j’en ai pas la force.Dire que de toute façon, c’est toujours la même chose.
Les dessins sur le visage à l'indélébile, ça a toujours été une idée à la con.
Alors ça suffit maintenant, vous pouvez rendre le corps.
Signer la fin de la prise d’otage.J’ai pas envie de marcher.
Allez, c’est plus drôle.
Ca fait longtemps que ça l’est plus.
Ca fait longtemps qu’on ne rigole plus ensemble, non plus. Ca s’agite dans le cœur.
On croit.
On est plus sur.Est-ce que ça pulse comme il faut, à l’autre bout ?
Et pourquoi ça bip comme ça, dans les oreilles.
Liu.
Comme un souffle que l’on espère reprendre.
Liu attend, va pas si vite.
Attend, attend, elle s’est perdu.
Tu vas où comme ça ? Liu ralenti le pas.
Pourquoi tu cours ?
Pourquoi t’as l’air si mal ?
Qu’est ce qu’ils t'ont fait?
Est ce que c’est moi ? Liu j’t’en supplie, faut que tu t'arrêtes.
Liu, j’arrive pas à te suivre.
Pourquoi tu vas pas à la danse.
Pourquoi tu vas dans cette direction là.
Liu, j’te jure si je trouves la personne qui t’a mit dans cet état.
J’pourrais la tuer.T’enchaines les couloirs comme si tu voulais me semer.
Qui t’es venu voir, y’a quelqu’un qu’est blessé ?
Liu…J’aimerais juste que tu m’entendes.
J’aimerais juste que tu t'arrêtes.
S'il te plait.
Ouvre pas cette porte Liu.
L’ouvre pas.
J’t’en supplie.
J’t’en supplie, l’ouvre pas, Liu.
J’ai peur de ce qu’il y a, de l’autre côté. Mais t’appuies sur la poignée sans ralentir.
Et il y a du blanc partout.
Des fils et des machines.
Le bruit est plus net, tout d’un coup.
Ca se tache encore de noir.
Et puis y’a un corps dans le lit.
Et j’ai peur de savoir à qui il est quand tu te poses comme ça à son chevet.
Liu, c’est juste un cauchemar.
On va se réveiller toi et moi.
Faut juste que je reprenne ma place.
Et ça sera juste un mauvais rêve.
Une mauvaise chute en fin d’histoire.
Seulement ça veut pas Liu.
Et moi je comprend pas.
Pourquoi ça traverse comme tous les autres corps.
C’est le mien. Je le connais bien.
J’ai bien appris la procédure pour les retours.
Alors pourquoi je peux pas Liu.
Même mon corps, il veut plus de moi ?
Il a l’air si triste comme ça.
Il ressemble plus à grand chose.
Même sous les couvertures, ça prend pas beaucoup d’espace.
Pourquoi tu viens voir ça Liu.
C’est triste à en mourir. Pourquoi je regarde avec toi.
Pourquoi j’attend que les jours passent.
Pourquoi j’attend que tu reviennes, alors que moi j’y arrive pas.
Depuis quand le temps est il si long.
Et ce bruit qui n’en fini pas.
J’en peux plus.
Je vais devenir folle.
Ça bourdonne dans les oreilles et ça finit jamais.
En boucle la même note, jusqu'à finir de faire vriller.
J’en peux plus.
J’en peux plus.
De toute façon j’ai rien à faire ici
De toute façon j’ai plus rien à faire nulle part.
Alors fait taire cette putain de machine Liu.
J’veux juste que tout ça se termine, j’veux plus penser à rien.
J’veux plus voir ce spectacle en boucle.
Constater encore et encore que j’suis juste faible, minable, pitoyable.
PUTAIN DE MACHINE.
PUTAIN DE CORPS.
PUTAIN DE VIE.
Débranche débranche débranche.
Liu débranche.
FAIT LA TAIRE.
Et c’est ton corps que l’on travers. Dont on ne s'évade pas. Les gestes on ne voit pas si c’est les tiens ou bien les siens. C’est si confus. On comprend rien. On veut juste que ca se termine. Une fois pour toute. Alors on a lancé les bras. Alors on a attrapé la gorge. Alors on a serré fort jusqu'à ce que la mélodie de la boite change. Jusqu'à ce que ça s’affole. Et d’un coup ça a fait comme un rejet. Comme la nuit ou Eulalie à tout coupé. Nous a ramené.
C’est devenue noir.
C’est devenue blanc.
Ça a respiré fort dans les poumons.
Cherché tout l’air qui manquait.
C’est ton corps qu'à tangué sur le lit.
Le sien qu’elle a relever avec peine.
Le tien qu’on a enlacé, de toutes les forces disponibles.
Tombe pas. Tombe pas avec elle.
Liu. Liu.
Elle ne sait pas si elle est heureuse d'être en vie. Ou triste de ne pas être morte.
Elle sait seulement que ça dévale les joues à une vitesse qu’elle contrôle pas.
Que ça hurle la détresse que l’on peut enfin entendre.
Agrippé à toi. Elle arrive pas a te lâcher.
«
Liu…. Liu…. Liu…. »
Je suis désolée.