La rage au ventre, une grossièreté qui plane juste au coin des lèvres. Le professeur en avait eu marre de ses bavardages incessants et de sa vulgarité, et il était puni. Mais sérieusement… qu’est-ce qu’il pouvait bien en avoir à foutre, Amadán ? Ils pouvaient bien s’agiter tant qu’ils le voulaient, il ne se dépêcherait sûrement pas. D’ailleurs, c’était bien simple, il n’irait pas, et paf !

Les punitions, les retenues, Amadán les esquivait avec souplesse et élégance… et quelques doigts d’honneur. Mais pas cette fois.

Il n’a pas été fort malin, à se cacher dans son dortoir. Le professeur est directement venu l’en dénicher. Et il a eu beau crier, s’énerver et médire, c’est avec un bonnet de travers et une écharpe qui traîne qu’il fut tiré par l’oreille en-dehors du grenier. Et forcé, avec d’autres fautifs, à déblayer la neige juste en face des dortoirs.

Définitivement stupide sa cachette. Il n’y avait plus qu’à le cueillir.

Pelle à la main, râleries infinies qu’il déverse alors qu’on ne l’écoute pas, il en fait le moins possible et trolle les autres élèves – mais surtout le surveillant. Oh, tu as enlevé un peu de poudreuse ? Tiens, voilà la mienne ! Et fier de son méfait, il s’allonge et fait un ange. Ben oui, on n’en a pas marre de le traiter de démon ?

Il a du mal à se relever et il patine. Sous ses pieds, un peu de glace qui l’empêche d’être efficacement debout. Il ronchonne, gigote, tremble et est aidé. L’enseignant fulmine. L’étudiant forme une boule, qu’il lui lance au visage. Court au loin. Est de nouveau ramené par le bout de son oreille gelée.

Aïe, ça fait mal.

Ça discute autour de lui. Bientôt, le temps divin des retrouvailles pointera le bout de son nez. Bientôt, des cadeaux seront glissés sous le sapin. En recevra-t-il un ? Bien sûr que non. Ce sera au moins l’occasion de manger un peu mieux que de la merde.

Sa famille lui manque, vraiment. Les fêtes sont à éviter avec soin, lorsqu’on est sentimental.

Et alors qu’il rumine dans la mauvaise humeur, quelqu’un s’est approché. Quel est cet imprudent ? Tiens, puni ! La neige vole dans les airs, atterrit sur la tête de l’inconnu. Amadán se tourne avec un sourire victorieux, reconnaît le visage, et blêmit.

Ce n’est pas un connard à qui il vient d’envoyer le contenu cruel de sa pelle. Mais un élève qui ne lui a jamais rien fait, et qui, au fond, ne lui déplaît pas.

– Je suis heu… désolé. Je savais pas que c’était toi.