our private little world ‡ daphné

Invité

Donner un sens à ma vie, ça aurait été comme jouer la 5e symphonie de Beethoven avec les ongles sur un tableau

Instrumentale suspendu aux oreilles, le regard droit et fier, de ses yeux vairons dont la lueur sonne comme arbitraire, il se perd avec habilité dans l'étendue de sa toile. La détaille, la scrute, pour finalement se décider à prendre un crayon de papier, pour dessiner les contours d'une silhouette sublime qu'il a apprit par coeur. Ses prunelles se pose sur un profil, esquisse les traits, ferme les yeux pour avoir une vision d'ensemble dans sa mémoire. Se rappeler la finesse de ce visage, pour mieux le reporter sur sa toile. Tu es sa muse Daphné, alors il souhaite, à travers cette toile, te rendre hommage. Tu as réussi à susciter chez lui, un nouvel entrain pour la peinture ; tu as réveillé son âme d'artiste - son sentiment profond de liberté.

La tête penchée, son piano dans les oreilles, le jeune homme commence par avoir une meilleur vision d'ensemble, alors il analyse tes faits et gestes ; toi aussi tu es passionnée, tu es prise dans ton travail, tu en oublie le monde et son espace. Sur ce point là, vous vous ressembliez bel et bien. Un sourire vient se dépeindre sur son faciès, les yeux tombant sur ses pieds qu'il rapproche de son tabouret. Cette ambiance, dans cette salle, arrive à l'apaiser. Ici, il n'y a aucun sentiment de peur ; au contraire, ce n'est que volupté. Secouant la tête, Morgan retourne son attention à son futur tableau, les nombreux pinceaux posée sur sa table, le jeune homme commence à travailler ses couleurs, à se perdre dans divers mélanges.

A ses yeux Daphné, tu es cet oiseau capable de t'envoler n'importe où, tu es la liberté incarnée et dieu sait à quel point il aimerait te ressembler. Seulement, Morgan n'a pas d'ailes, il est cloué au sol ; et même en rêve, il ne peut s'imaginer s'envoler. Trop terre à terre pour y songer. Se grattant le nez avec le revers de l'index, l'adolescent reprend des couleurs, reporte sur attention sur sa toile, il n'était pas l'heure de faire de la philosophie dans les tréfonds de sa tête, ô que non. Il était temps de faire glisser le pinceaux, de dessiner tes traits sur ce futur cadeau ; ton tableau. Commençant par dessiner un fond au style "watercolor", Morgan dépose plusieurs teintes de bleus, ici et là ; c'est ton ciel Daphné, à ses yeux, tu vas de paire avec lui.

Les nuages ne sont que traces blanches qu'il finit aux doigts, subjugué par son travail, il en oublie le reste. il en oublie la musique frénétique qui lui perce les tympans, il en oublie les inquiétudes ; elles ne sont plus que firmament. Infime détail dans sa création. Visage tracé d'abord au feutre, puis au pinceau très fin et noir, Morgan fini quelques détails pour enfin attaquer la partie la plus compliqué, ta personne. Mitigé par ce qu'il a fait jusque là comme l'éternel insatisfait qu'il est, l'adolescent s'écarte un peu, jauge sa création de son esprit critique. Ce n'est sans doute pas sa meilleur oeuvre, mais on peut déceler malgré tout dans les couleurs et dans ta présence sur cette toile, son entrain. Il y a quelque chose qui détonne de ses autres oeuvres, il en est conscient. Mais cela ne le rend pas plus serein.

Trop concentré pour demander son avis à quelqu'un ((et bien trop timide aussi)), Morgan se contente de se lever, d'aller se laver les mains au robinet pour éclaircir ses idées. Changeant de musique pour finalement la couper une fois arrivé à tes côtés, il se poste à côté de toi et de ton travail. « Moi qui pensait que je serai ton sujet du jour, je suis déçu. » Une main sous le menton, le ton un peu rieur, il reprend aussitôt. « Non... Pas déçu, mais triste ? » Une main sur ton épaule, la sonorité de son rire lui paraît étrange, il n'a plus l'habitude de l'entendre. « Qu'est-ce que tu dessines du coup ? »

Il est curieux de toi, c'est un fait Daphné, qui ne changera pas.

kaspbarks